
Le 10 mars 2006

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Geysers saturniens
(Agence Science-Presse) - Comment diable de
l'eau pourrait-elle jaillir d'un endroit où il fait
moins 150 degrés? C'est la question fondamentale
à propos de laquelle pas moins de neuf études
parues simultanément ont beaucoup d'hypothèses
mais aucune réponse.
Faisant à nouveau surgir l'espoir de
trouver de la vie ailleurs, une petite lune jusqu'ici méconnue
de Saturne, Encelade, vient donc de s'ajouter au petit groupe
de mondes qui, dans notre système solaire, cachent
probablement de l'eau. Non
pas de la glace, mais de l'eau.
Mais de tous ces mondes, Encelade est le plus improbable.
Ce caillou fait à peine 500 kilomètres
de diamètre, trop petit pour, en théorie,
abriter une activité volcanique une particularité
qui pourrait être à l'origine de la chaleur
faisant fondre une partie de la glace, et maintenant
donc une "couche" d'eau sous la couche de glace.
Les photos et données qui sont en train de
faire le tour du monde proviennent de la sonde américaine
Cassini, qui poursuit sa ronde autour de Saturne et
de sa trentaine de lunes, et ce sont ces données
qui font l'objet de pas moins de neuf études
dans l'édition du 10 mars de la revue américaine
Science.
La découverte est d'autant plus étonnante
que depuis les débuts de la mission Cassini,
c'est vers Titan, la plus grosse des lunes de Saturne,
que toute l'attention était dirigée.
Avec Titan, les planétologues avaient à
leur disposition non seulement un monde d'une taille
respectable, mais doté en plus d'une atmosphère.
Avec Encelade, révèle une des études
publiées dans Science, ces planétologues
ont toutefois, au milieu des jets de vapeur d'eau
et de cristaux de glace détectés par
Cassini, des molécules à base de carbone:
méthane et dioxyde de carbone. La présence
de ces éléments dans "l'air" suggère
la présence d'éléments plus complexes
à la surface et
ces éléments complexes seraient les
premiers constituants d'une hypothétique forme
de vie.
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Des
mondes de glace ou d'eau?
La
glace est un élément très répandu
dans notre système solaire: les comètes,
par exemple, sont des boules de neige et de glace,
et de nombreux mondes, dont Mars et Pluton, ont révélé
abriter de la glace. Les anneaux de Saturne sont également
en partie composés de blocs de glace.
La
présence d'eau, en revanche, est plus difficile
à démontrer. Trois mondes sont en lice:
- Mars:
plusieurs chercheurs affirment que leurs observations
démontrent la présence d'eau sous
la surface de Mars. Les arguments sont très
solides, mais ne font pas encore l'unanimité
- Europe:
depuis 20 ans, la plupart des planétologues
sont convaincus que, sous la couche de glace de
cette lune de Jupiter, dort une couche d'eau.
Leur principal argument: les fissures et autres
craquements de la glace, qui ont toutes les allures
d'une banquise qui flotterait sur de l'eau, ou
à tout le moins une couche de neige mouillée.
- Ganymède:
plus récemment, certains scientifiques
ont affirmé que sous la couche de glace
de Ganymède pourrait aussi subsister de
l'eau. Les arguments sont moins solides, parce
que la couche de glace de cette grosse lune de
Jupiter est beaucoup moins épaisse que
la couche de glace d'Europe et, de ce fait, laisse
moins de place à l'interprétation.
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Qui plus est, l'absence de cratère
dans la région d'où émanent ces jets
le Pôle Sud suggère qu'il ne s'agit
pas d'une "éruption de chaleur" résultant
d'un impact récent. Il faut que ça dure depuis
longtemps: un milliard d'années, vont jusqu'à
risquer certains des scientifiques. Et ça, c'est
largement suffisant pour permettre l'éclosion d'une
forme de vie.
"Il s'agit d'une conclusion extrême",
résume Carolyn Porco, directrice de l'équipe
d'imagerie, reconnaissant du coup que les données
qu'ils ont sous la main sont très incomplètes
et très imparfaites: si la présence des jets
d'eau et de cristaux est difficile à nier, leur origine
est impossible à établir, et leur âge
encore plus hypothétique. L'espoir, à présent,
est que Cassini puisse nous en apprendre plus lors de son
prochain passage à proximité d'Encelade au
printemps 2008.
Quant à l'avenir plus lointain, les
scientifiques spécialistes des planètes n'ont
pas manqué de saisir la perche qui leur était
tendue: cette découverte relance l'intérêt
pour l'exploration des planètes, au moment même
où la NASA sabre férocement dans son budget
scientifique (3 milliards $ en moins dans les cinq prochaines
années), au bénéfice d'un très
incertain retour sur la Lune réclamé par le
président Bush. Si cette tendance se maintient, il
n'y aura certainement pas d'autres missions vers Saturne
avant un gros demi-siècle...
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