Pas de fusion froide pour cette fois
(ASP) - C'est, cette fois, clair et net:
l'expérience controversée d'il y a quelques
mois (voir
ce texte), qui alliait petites bubulles et fusion
nucléaire, était une erreur. Toutes les
tentatives de la reproduire se sont soldées par
un échec. Avec elle, meurt un autre bel espoir
d'une fusion "à froid"
et d'une
solution magique à toutes nos futures crises
d'énergie.
Au moins, cette fois-ci, la controverse
a-t-elle été mieux contrôlée.
Au contraire de l'histoire de "fusion froide" d'il y
a 12 ans qui avait enflammé les imaginations,
il a rapidement été compris, cette fois-ci,
que rien n'était certain, que tout était
encore au stade des hypothèses et que, de toutes
façons, à un million de degrés
Celsius, il était difficile de parler de fusion
"froide".
En gros, il s'était produit ceci
en mars dernier: des physiciens nucléaires américains
et russes, au Laboratoire national Oak Ridge, dans le
Tennessee, avaient affirmé avoir réalisé
une fusion nucléaire dans un banal récipient
contenant un liquide organique chauffé à
un million de degrés. Or, la fusion nucléaire
est ce processus qui se produit en permanence au cur
des étoiles (et qui explique qu'elles brillent).
Les scientifiques n'arrivent à reproduire ce
processus qu'à des milliards de degrés
Celsius, au cur de gigantesques appareils coûtant
des sommes énormes. Nos physiciens, eux, avaient
employé une méthode impliquant ce qu'on
appelle la cavitation acoustique, un phénomène
par lequel des ondes sonores passant à travers
un fluide créent des bulles minuscules. Sous
certaines conditions, ces bulles envoient un infime
jet de lumière lorsquelles éclatent:
on appelle cela la sonoluminescence. En théorie,
il suffirait de réunir les bonnes conditions
pour que ces bulles atteignent des températures
et une pression extrêmement élevées
juste assez pour provoquer une fusion nucléaire.
C'est ce qu'affirmaient avoir réussi ces chercheurs,
et s'ils avaient raison, c'était une révolution
scientifique majeure.
Mais avaient-ils raison? Déjà,
en mars, nous
rapportions que des collègues à eux
avaient tenté de reproduire leur expérience,
et avaient échoué. D'où la controverse:
pourquoi diable Science avait-elle accepté
de publier tout cela?
Cette fois, la cause est entendue. D'autres
experts en sonoluminescence, à l'Université
de l'Illinois, rapportent dans Nature avoir utilisé
une autre méthode pour tenter de mesurer cette
hypothétique énergie expulsée par
le liquide lorsqu'éclatent les bulles. Ils ont
ainsi pu mesurer les conditions sous lesquelles une
telle réaction est théoriquement possible.
Il en ressort que la température dans une telle
bulle n'atteint pas le million de degrés, mais
15 à 20 000, ce qui indique qu'il y a encore
du chemin à faire. Et que même ainsi, la
quantité d'énergie produite serait encore
extrêmement faible.