L'événement de la semaine.


Pour tout trouver
sur Internet!


Tous les médias
en un clin d'oeil!


Nos nouvelles brèves
  
  


Notre chronique de
vulgarisation scientifique!


Plus de 1500 questions





Hommage à...
Le monde delon GOLDSTYN
La science ne vous interesse pas?
Dossiers
Promenades






semaine du 27 mai 2002



Stephen Jay Gould: le héros de l'évolution


I
l était le biologiste le plus célèbre du monde. La clarté de son style de vulgarisateur et son visage sympathique ont contribué à mieux faire comprendre à des millions de personnes les mystères de l’évolution. Mais paradoxalement, son insistance sur le rôle du hasard dans l’évolution biologique a été si mal comprise par certains qu’elle a été récupérée par les créationnistes.

Que pensez-vous de cette nouvelle?
Discutez-en dans le forum Science-Presse/Médito


Stephen Jay Gould, décédé d’un cancer la semaine dernière, à l’âge de 60 ans, était "le visage public de l’évolution", titre le service d’information de la revue scientifique Nature.

Un bel hommage, pour cet homme qui a effectivement fait partie de cette minuscule poignée de scientifiques à avoir acquis une célébrité publique. Il est l’auteur de plus de 20 livres, dont neuf sont des recueils d’une chronique mensuelle publiée pendant un quart de siècle dans le magazine Natural History.

 

Biographie de Stephen Jay Gould (avec hyperliens)

Une interview du magazine Salon (septembre 1996)

Une entrevue du magazine Mother Jones (1997)

Une entrevue du magazine Skeptic (1996)

Ses articles dans la New York Review of Books

Hommage: un scientifique et un sceptique dont les préoccupations allaient au-delà de la science

 

 

Dans ces textes, il avait le don de parler de biologie, d’évolution des espèces et de fossiles, en utilisant des exemples tirés de l’art... ou du baseball. Parmi ses ouvrages plus étoffés publiés en français, on note Le Pouce du panda, Le Sourire du flamant rose et Les Pierres truquées de Marrakech.

Ses conférences publiques à Harvard entraînaient traditionnellement des salles combles. Il a eu droit à la page couverture du magazine américain Newsweek en 1982 —un événement si rare pour un scientifique, qu’on s’en souvient encore, 20 ans plus tard- et les médias américains étaient bien fiers de rappeler cette semaine qu’en 1997, il avait obtenu "la marque ultime de la célébrité": une apparition dans le dessin animé Les Simpsons.

Mais plus sérieusement, c’est sa relecture et son rebrassage du vaste univers de l’évolution biologique qui lui a valu la célébrité, aussi bien chez le grand public que parmi les scientifiques. En 1982, il publiait, conjointement avec le paléontologue Niles Eldredge, une théorie dite des équilibres ponctués.

Une théorie qui marche dans les pas de celle de Darwin, sur l’évolution des espèces, mais en lui ajoutant un petit quelque chose: l’évolution ne serait pas quelque chose de linéaire, de graduel, de progressif. Les animaux et les végétaux évolueraient plutôt par à-coups: de brusques bonds en avant, suivis de longues périodes de stagnation. Des bonds en avant qui peuvent être provoqués par un changement climatique brutal, une catastrophe écologique... ou la chute d’une météorite.

Exprimé autrement, c’est le hasard que Stephen Jay Gould fait ainsi intervenir. Un événement totalement imprévisible, la chute d’une météorite, a entraîné il y a 65 millions d’années la disparition des dinosaures et a redirigé ainsi l’évolution biologique dans une direction inattendue.

Résultat: que la bestiole intelligente d’aujourd’hui soit un primate doté de l’apparence que l’on sait, relève en bonne partie du hasard. L’intelligence aussi bien pu échoir, au fil des millions d’années, à un reptile ou à un autre type de mammifère, plus poilu, moins grand ou, pourquoi pas, marchant à quatre pattes. L’humain, a dit Gould, est un "accident de l’évolution".

Les créationnistes s’en donnent depuis à coeur joie: les "savants", disent-ils, prétendent que l’évolution est le fruit du hasard, ce qui est impensable, ajoutent-ils aussitôt, quand on considère la complexité de la nature et son merveilleux équilibre. Or, tout ce que Gould a dit, c’est que, parmi les milliards de chemins qu’aurait pu suivre l’évolution —qui auraient tout aussi bien pu aboutir à une créature dotée d’intelligence- le chemin qu’elle a suivi, le nôtre, relevait, lui, du hasard.

Ce n’est pas le seul rebrassage de la paléontologie et de la biologie qu’a provoqué Gould. En fait, il a irrité plus d’un de ses collègues, au fil de sa carrière. Comme le rappelle le New York Times, le Dr John Maynard Smith, biologiste de l’évolution à l’Université du Sussex (Angleterre), a écrit que plusieurs biologistes "tendent à voir (Gould) comme un homme dont les idées sont si confuses qu’elles méritent peu d’être prises en considération". Il avait, de fait, tendance à tirer dans plusieurs directions à la fois, ce qui rendait ses théories si larges et si malléables qu’il en devenait impossible de les vérifier. "Le mot que j’utiliserais est exaspérant, raconte Paul Harvey, de l’Université Oxford. Chaque fois que vous arriviez avec une bonne règle générale, Steve aimait la déchirer avec de petites anecdotes."

Né en 1941 à New York, fils d’un sténographe judiciaire et d’une artiste, il a obtenu son doctorat en paléontologie à l’Université Columbia, de New York, et est devenu professeur à l’Université Harvard en 1967. Il racontait souvent avoir fait "ses premiers pas vers une carrière de chercheur" à l’âge de 5 ans, lorsqu’il fut amené par ses parents au Musée américain d’histoire naturelle, lequel abritait notamment un "terrifiant" squelette de tyrannosaure.

A Harvard, le coeur de ses recherches initiales fut... les fossiles d’escargots des Antilles. En 1977, un ouvrage spécialisé, Ontogénie et phylogénie, attira l’attention des biologistes sur la relation, jusque-là laissée de côté, entre la façon dont un organisme se développe, dans l’oeuf ou dans l’utérus, et la façon dont il évolue au fil des millions d’années. Ce livre, à lui seul, contribua à faire naître une nouvelle branche de la biologie, l’étude de l’évolution et du développement.

Il avait été diagnostiqué d’un cancer de l’abdomen en 1982, forme rare et jugée incurable, qui l’avait amené à écrire là-dessus, à se laisser soumettre à des traitements expérimentaux... et à militer pour l’usage de la marijuana à des fins médicales.

Marié deux fois, il a eu deux enfants de son premier mariage.

Son dernier livre, The Structure of Evolutionary Theory, publié en mars dernier, est une somme de 1433 pages qui rassemble une bonne partie de son travail des 20 dernières années, en même temps que sa vision de l’évolution.

Stephen Jay Gould est décédé dans sa maison de Manhattan, au milieu de ses livres et auprès de sa seconde femme, Rhonda Roland Shearer.

 


En manchette la semaine dernière:
Les deux dernières fins du monde

A lire également cette semaine:
Pourquoi votre génome est-il aussi petit?

Reniflez votre cancer

Les balles de caoutchouc peuvent tuer

Les lunes de Jupiter

Les glaces de Jupiter

Et plus encore...


Archives des manchettes




 
Accueil | Hebdo-Science | Le Cyber-Express | Bibliothécaire Québécois | plan du site