
Le 12 décembre
2002

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Perdre le fil d'Ariane
(Agence Science-Presse) - C'était la
plus grosse incarnation de l'histoire des fusées
Ariane. Mais pour son premier lancement réussi, ce
sera meilleure chance la prochaine fois. Après
avoir été retardée d'un mois, la
fusée Ariane s'est bel et bien envolée dans
le ciel de la Guyane française hier soir, 11 décembre...
pour voir ses espoirs retomber en morceaux trois minutes
plus tard.
Avec cette toute nouvelle version du lanceur
européen -qui fait depuis 20 ans une sérieuse
concurrence aux fusées russes et américaines,
sur le lucratif marché de la mise en orbite de satellites-
l'Agence spatiale européenne espérait pourtant
frapper un grand coup: la capacité de transporter
dans ses soutes jusqu'à 10 tonnes (contre six pour
la version précédente d'Ariane 5), dont ces
lourds satellites de télécommunications destinés
à la très haute orbite appelée géostationnaire.
Cela devait fournir à la compagnie Arianespace un
sérieux avantage sur ses concurrents. La toute
nouvelle fusée Atlas 5 de la compagnie américaine
Lockheed Martin, d'une part, ne peut "monter" là-haut
que huit tonnes à la fois. Et Boeing vient elle aussi
de lancer une nouvelle version de sa fusée Delta,
qui n'atteint pas elle non plus la capacité d'Ariane.
Mais il
aura suffi de trois minutes pour renvoyer les compteurs
à zéro. Ariane 5-ESCA de son nom complet,
s'était envolée dans le ciel de Kourou à
19 h 21 heure locale; elle a explosé au-dessus de
l'Atlantique trois minutes plus tard, à une centaine
de kilomètres d'altitude, sur ordre des contrôleurs
au sol, lorsque sa trajectoire est devenue erratique. Des
informations préliminaires font état d'un
échec du moteur principal, appelé Vulcain-2.
C'est un bogue informatique entourant ce même moteur
qui avait, à la dernière minute, reporté
le lancement, le 28 novembre dernier. Ariane 5 transportait
avec elle deux de ces lourds et coûteux satellites
de communication (500 millions$ à eux deux), Hotbird
TM7, du consortium européen Eutelsat, et Stentor,
un prototype du centre de recherche français CNES.
L'échec risque également de
mettre sur la glace une mission plus spectaculaire, celle
qui doit envoyer là-haut la sonde spatiale européenne
Rosette, destinée à aller se poser sur une
comète après un voyage de huit ans. Le départ
est théoriquement prévu pour le 12 janvier.
Mince consolation pour les Français,
les choses vont encore plus mal du côté des
Russes, par les temps qui courent (voir
autre texte).
Ce n'est vraiment pas le bon moment pour éprouver
des cahots. Car si le marché du satellite est lucratif,
il est aussi en régression. Les plus optimistes espèrent
un rebond à la fin de la décennie, alors
que plusieurs satellites actuellement en service devront
être remplacés en même temps; qui plus
est, l'accroissement de la demande en bande passante, avec
la multiplication des connections Internet à haute
vitesse et la surmultiplication des téléphones
mobiles, pourrait aussi donner un bon coup de main aux rêves
spatiaux. Mais tout ceci est à la merci des conditions
économiques qui règneront entre aujourd'hui
et demain.
A court terme, Ariane part de plus avec une
longueur de retard sur ses concurrents américains:
ceux-ci peuvent bénéficier du marché
plus solide des satellites militaires. Alors qu'Arianespace
s'appuie presque exclusivement sur les satellites commerciaux,
lesquels sont plus sensibles aux aléas du marché...
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