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Quand les abeilles vont à l'école
Le club des animaux capables d'apprendre compte un nouveau
membre : l'abeille.
Dans le cadre d'une expérience qui représente
en même temps un exploit technologique, des
chercheurs américains ont suivi à la trace les
vols de plusieurs abeilles, pendant des mois. Ils espéraient
en dégager des tendances, et tendance il y a bel et bien
eu : les abeilles " débutantes " sont celles
qui s'éloignent le moins de la ruche. Plus elles prennent
de l'expérience, et plus elles s'aventurent loin pour
aller chercher leur nectar.
Mais ce n'est pas tout : leurs " plan de vol " semblent
avoir un objectif bien précis, celui de tourner en rond
au-dessus d'un territoire, comme si elles effectuaient une mission
de reconnaissance; une fois ce territoire bien " cartographié
", elles passent au suivant, et ainsi de suite. Bref, elles
apprennent progressivement, par essais et erreurs -comme nous.
Preuve supplémentaire : les abeilles qui parcourent
les plus grandes distances ne sont pas celles qui restent le
plus longtemps absentes de la ruche. Ce qui signifie qu'elles
sont celles qui volent le plus vite, sans faire tout un tas de
détours, comme si leurs missions de reconnaissance leur
avaient servi à découvrir le meilleur raccourci!
Cette découverte, rapportée dans la dernière
édition de la revue Nature, constitue, mine de
rien, une première mondiale.
L'exploit technologique derrière tout cela, c'est le
radar, associé à la miniaturisation : des centaines
d'abeilles ont été équipées d'une
antenne et d'une micro-puce, permettant aux humains de les suivre
à la trace, une par une. Ce n'est qu'en 1996 qu'on a fait
les premiers pas vers le " suivi électronique "
des insectes; avant cela, il n'y avait aucun moyen de reconstituer
le parcours d'une abeille sur de longues distances, puisqu'elles
volent trop vite pour être suivies à l'oeil nu,
ou même par une caméra.
Tout ce que les scientifiques pouvaient faire, et ils l'ont
fait pendant des décennies, c'était de rester sagement
assis à proximité d'une ruche, et d'observer le
vol des seules abeilles qui n'effectuent que de petits déplacements,
à proximité de la ruche -par exemple, en identifiant
certaines d'entre elles avec une tache de peinture. La méthode
paraît primitive et pourtant, c'est grâce à
elle qu'on sait depuis 30 ans que les abeilles communiquent par
ce que d'aucuns ont appelé une " danse "
: lorsque l'une d'elles a trouvé un garde-manger, elle
le signale aux autres, à son retour près de la
ruche, par une série de cercles et de virages indiquant
grossièrement distance et direction.
L'utilisation du radar ne s'arrête pas là, expliquent
les chercheurs, dirigés par Elizabeth Capaldi, de l'Université
de l'Illinois. "Ce
n'est que le début", renchérit Thomas
Collett, de l'Université du Sussex, en Angleterre. Nous
ne savons pas, par exemple, si les vols de reconnaissance sont
effectués dans la zone où l'abeille trouvera plus
tard son nectar. " En d'autres termes, procède-t-elle
entièrement par essais et erreurs, ou bien a-t-elle, avant
de commencer, déjà quelques informations sur la
direction qu'elle doit choisir?
En fait, le radar fait carrément rêver les entomologistes.
Une des questions que ceux-ci se posent depuis des décennies,
c'est : les insectes encodent-ils l'information dans leur cerveau
de la même façon que nous? Une étude plus
poussée de l'évolution de leurs " plans de
vol " permettrait peut-être de répondre à
cette question.
Coïncidence, en même temps que paraissait cette
étude dans Nature, une autre, complètement
distincte, apparaissait dans Science, sur la façon
dont les abeilles mesurent les distances : en effet, comment
font-elles, lorsqu'elles effectuent cette fameuse " danse
", pour savoir quelle distance elles ont parcourue entre
la fleur et la ruche? Deux théories s'affrontent depuis
longtemps : la première, que les abeilles évaluent
l'effort physique qu'elles ont accompli pour revenir de la fleur;
la deuxième, qu'elles emploient des repères visuels
(après le septième arbre, tu tournes à gauche,
et puis à droite après le bouquet de marguerites).
Conclusion des biologistes qui publient dans Science :
les abeilles emploient bel et bien des repères visuels.
La preuve a été obtenue lorsque l'équipe,
dirigée par Mandyan Srinivasan, de l'Université
nationale australienne, a installé des tunnels débouchant
à proximité des ruches -à l'intérieur
desquels les abeilles ont été attirées par
des morceaux de sucre. Puisque toutes les abeilles passant par
le même tunnel avaient le même parcours à
effectuer, il n'y avait plus d'ambiguïté possible
sur leurs " repères " : dans certains cas, le
tunnel était plus long; dans d'autres, on y avait ajouté
une tapisserie : lorsqu'on changeait la décoration, les
abeilles qui étaient venues là en suivant les "
indications " de leurs consoeurs ne s'y retrouvaient plus!
Après les humains, les chimpanzés et même
les rats, que l'on sait depuis quelques mois capables d'apprendre,
voici venir les abeilles. A qui le tour?
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