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Le chaînon manquant du chaînon manquant
Des chercheurs de l'Université de Chicago
croient avoir découvert une des bases fondamentales de la vie, et
du fait qu'elle se perpétue de siècle en siècle: un
groupe de molécules qui, littéralement, gère l'évolution.
"Les
bases moléculaires de l'évolution", décrit
un reportage de la BBC. Plus précisément, des scientifiques
décrivent dans la dernière édition de la revue Nature
ce
qui se produit dans les gènes d'un être vivant pour permettre
à ses descendants de s'adapter et de survivre.
Rappelons avant d'aller plus loin la base de la biologie moderne: toute
espèce vivante, animale ou végétale, est en constante
évolution. Des changements climatiques ou géologiques, la
présence ou non de prédateurs, obligent tous les êtres
vivants, du plus microscopique au plus grand, à s'adapter, à
changer, bref, à évoluer au fil des générations.
L'espèce qui ne s'adapte pas meurt, ou est supplantée par
une autre.
Ce que nos chercheurs de Chicago avancent dans leur article, c'est que,
bien que l'ADN d'un individu évolue au fil du temps, la plupart des
variations génétiques restent indécelables: elles s'accumulent
et ne deviennent effectives qu'au moment où l'organisme est soumis
à un "stress environnemental" -autrement dit, elles ne
se mettent en marche que le jour où on a besoin d'elles.
"Si
la planète devient soudain plus chaude, donne en exemple l'Associated
Press, vous pourriez mieux survivre avec une peau plus sombre, ou vous
pourriez utiliser une queue pour manoeuvrer dans la forêt tropicale
plus dense... Et si les scientifiques ont raison, vous pourriez d'ores et
déjà être porteur de ces gènes."
"Bien qu'un animal, résume la BBC, puisse être parfaitement
adapté à son environnement, dans l'arrière-scène,
des copies redondantes des gènes sont en mutation. C'est seulement
lorsque l'environnement de la créature s'altère, et que celle-ci
a besoin de s'adapter, que ces mutations surgissent à l'avant-scène."
La plupart de ces mutations seront sans conséquence et n'aideront
en rien la créature. Mais quelques-unes d'entre elles pourraient
lui fournir un avantage décisif. Et ces mutations se produisant au
niveau des gènes, elles peuvent par conséquent être
passées aux enfants.
L'auteur de ce tour de magie s'appelle Hsp90, une molécule -une
protéine, plus précisément- que l'on connaissait jusqu'ici
comme étant celle qui vient en aide aux autres molécules de
la cellule lorsqu'elles sont aux prises avec une trop grande chaleur (Hsp:
Heat Shock Protein, si vous voulez tout savoir). Autrement dit, Hsp90 est
un gardien de sécurité: quand la température s'élève,
il empêche les autres protéines de trop s'énerver et
de déranger le reste de la cellule dans son travail.
Le secret du changement
Bien que ce portrait de l'évolution soumise aux fluctuations du
reste du monde soit connu depuis longtemps, "pour la première
fois, explique Susan Lindquist, professeure de génétique moléculaire
et biologie cellulaire, nous avons un mécanisme moléculaire
qui explique comment les organismes qui ont gardé la même forme
pendant des millions d'années peuvent évoluer vers de nouveaux
traits qui les aident à s'adapter aux conditions changeantes".
Et cette découverte, mine de rien, vient confirmer une idée
qui était de plus en plus répandue parmi les biologistes:
l'évolution n'est pas toujours d'une extrême lenteur, étalée
sur des millions d'années. Elle peut aussi, à l'occasion,
être brusque, ou saccadée.
Susan Lindquist et Suzanne Rutherford, étudiante au post-doctorat,
en sont arrivés à ces résultats à partir de
manipulations génétiques sur des banales mouches à
fruits.
Mais il n'y a pas que de bonnes nouvelles derrière cette découverte,
tout comme il n'y a pas que de "bons" gènes. Si un travail
s'effectue en coulisse dans notre bagage génétique, cela signifie
qu'au milieu des mutations potentiellement bénéfiques s'en
glissent d'autres, qui ne nous seraient d'aucune utilité, voire carrément
malsaines. Existe-t-il un risque de voir ces mutations malsaines se "réveiller"
au mauvais moment? Pire encore: le fait que l'on ait maintenant trouvé
le mécanisme pour les réveiller, ouvre-t-il la porte à
des manipulations génétiques d'une ampleur que les expériences
de clonage et d'aliments transgéniques n'ont pas encore laissé
soupçonner?
On n'en est pas là. Si on a trouvé le coupable, à
savoir Hsp90, on ignore encore comment il contrôle cette alternance
entre des périodes de "stabilité génétique"
et d'autres de soudaines fièvres de changement. C'est là une
tout autre question, et la réponse, on ne l'aura sans doute pas avant
des années. |