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Un impact du CO2 dont on ne parle pas souvent: l’acidification des océans. L’humain doit sûrement avoir un impact là aussi, puisque le taux est sur le point d’atteindre un niveau inégalé... depuis 300 millions d’années.

Et cette fois, c’est la pierre qui parle. Là où est inscrit le passé, et là où les spécialistes du passé des océans —les paléo-océanographes— peuvent lire les traces des «spasmes» de notre planète: ils y trouvent ainsi des signatures de périodes marquées par d’intenses activités volcaniques, qui ont eu la particularité d’éjecter de grandes quantités de CO2... mais dont peu égalent notre signature d’Homo sapiens.

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Or, trop d’acidification signifie la mort de certaines espèces. La fois précédente, c’était il y a 56 millions d’années, quand une soudaine hausse des émissions de méthane a entraîné la mort de plusieurs types d’organismes unicellulaires. Aujourd’hui, le même scénario est en train de se reproduire avec le CO2... mais dix fois plus vite. Et si la tendance se maintient, ça ne s’arrêtera pas là: nous dépasserons le record établi il y a 300 millions d’années, selon une recherche publiée dans Science . Et «l’événement» d’il y a 300 millions d’années est associé à une extinction de masse.

Qu’est-ce que l’acidification des océans?

Il faut savoir que le CO2 produit en surplus, que ce soit le nôtre ou celui de la nature, ne va pas seulement s’accumuler dans l’air. Une grosse partie (un quart, selon plusieurs estimations) tombe dans les océans, où il forme de l’acide carbonique: d’où la diminution du niveau de ce qu’on appelle le pH.

Le pH est une de ces valeurs méconnues qui, avec l’eau, l’oxygène et la couche d’ozone, sont intimement liées à la vie sur Terre. Mais l’importance du pH, donc de l’acidité des océans, n’a commencé à être sérieusement étudiée que dans la dernière décennie. Premières victimes connues: les coraux et leur blanchiment. Deuxièmes victimes: les huîtres, oursins de mer, palourdes et autres bestioles dont les carapaces ou les enveloppes de calcaire sont affaiblies.

À partir de là, tout relève de la spéculation, faute d’avoir des bases de comparaison. Les algues et les herbes marines profiteraient probablement d’un excès de CO2, comme toute plante qui se respecte. Mais un surplus d’algues marines n’est jamais une bonne nouvelle pour le reste des habitants de la région.

Ce qui est certain, écrivent les chercheurs dans Science —leur travail est une étude géologique des traces laissées par l’acidification des océans à travers les ères de notre planète— c’est que nous expédions plus de CO2 que les océans ne peuvent en absorber: 530 milliards de tonnes depuis deux siècles et demi. Mais quel en sera l’impact exact à long terme, personne ne peut le dire pour l’instant, sauf qu’il commence déjà à y en avoir un, à en juger par le déclin des récifs de corail.

Notre ère à nous

Depuis quelques années, des géologues débattent de la possibilité de rebaptiser notre ère géologique anthropocène, ce qui serait une façon de reconnaître que l’humain est en train de laisser derrière lui une signature indubitable, sans égal dans toute l’histoire des temps géologiques. L’étude du passé des océans est en train de leur donner raison.

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