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Il y a 35 ans, une idée qui, à l’époque, avait pu paraître farfelue, allait germer parmi les médias québécois : une agence de presse spécialisée en science, destinée à alimenter les petits médias en nouvelles scientifiques.

Depuis sa fondation, l’Agence a bien changé : d’un service de nouvelles desservant l’ensemble des hebdos régionaux à ses débuts, elle est devenue, avec Internet, un imposant site d’informations scientifiques, rejoignant des centaines de milliers de passionnés chaque année, dont une importante proportion venant de France.

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Nous vous proposons d’ici au 22 novembre, jour de célébration des 35 ans, de passer en revue certains des bons coups… et d’autres curiosités.

L'accident de Columbia

L’accident de la navette spatiale Columbia a déclenché une vaste crise existentielle à la NASA. Dix-huit mois plus tard, elle y serait encore.

Mais elle était apparente dès les premiers jours: la politique a-t-elle tué Columbia, demandait la manchette de l'Agence Science-Presse dès le 5 février. Une hiérarchie où chacun renvoie la balle à son voisin ou se décharge de ses responsabilités sur son supérieur; des ordres contradictoires venus de Washington, mais que la Nasa s'efforçait de suivre, par crainte de perdre un précieux financement. Avec pour résultat, des problèmes qui se sont accumulés et des accrocs à la sécurité sur lesquels on avait fermé les yeux. Tôt ou tard, un accident comme celui de Columbia devait fatalement se produire.

La politique a-t-elle tué Columbia?

La cause immédiate de la tragédie de Columbia se révélera peut-être un revêtement fautif ou un joint défectueux. Mais la cause à long terme, ce pourrait être la politique.

De coupes budgétaires en coupes budgétaires depuis 20 ans, le programme des navettes spatiales a vu également rétrécir ses marges de sécurité. Jusqu'au Vérificateur général des États-Unis qui, en juillet 2002, avait blâmé la gestion déficiente d'un programme qui, au cours des trois années précédentes, avait été marqué par une série d'incidents. Des incidents sans gravité au premier abord, mais dont l'accumulation inhabituelle laissait craindre le pire.

Ils seront donc sans doute nombreux à jeter la pierre aux autorités américaines au cours des prochaines semaines, et à parler de "budgets conduisant à un désastre", comme le titre cette semaine le magazine Alternet. En coupant dans tout ce que d'aucuns prétendaient être "non indispensable", la Nasa "est devenue une agence cédée aux militaires et, en deuxième lieu, aux corporations". La science est devenue à ce point marginale que les journalistes furent nombreux, ces derniers jours, à s'étonner de l'importance qu'elle avait prise dans cette mission-ci: une mission entièrement scientifique, on n'avait plus vu cela depuis longtemps!

Et il ne faut pas attribuer ces propos à un quelconque radicalisme de la part de ce magazine alternatif: le magazine de vulgarisation scientifique The New Scientist va dans la même direction, lorsqu'il rappelle que les budgets de la Nasa ont été réduits de 40% depuis 1990 —un "détail" qui avait conduit un groupe d'experts indépendant, en avril 2002, à prévenir que cela menaçait jusqu'à la sécurité des astronautes (voir notre manchette).

Dans sa proposition de budget 2004, déposée la semaine dernière, avant la tragédie de Columbia, le président Bush évoquait, pour la première fois depuis longtemps, une hausse du budget de la Nasa de près d'un demi-milliard, ce qui le ferait passer à 15,5 milliards$.

Une somme tout de même élevée. Seraient-ce les priorités qui auraient été mal placées? On s'est par exemple remis à parler de "l'avion spatial" ces derniers jours, ce projet de navette moins coûteuse, censée remplacer les navettes actuelles au cours de la décennie 2010... ou 2020. Un avion spatial qui aurait pu naître beaucoup plus tôt, si on l'avait placé plus haut dans la liste des priorités.

Mais l'avion spatial a eu la malchance d'apparaître sur les planches à dessin dans les années 80, à la même époque où nombre d'ingénieurs et d'investisseurs étaient mobilisés pour réfléchir à un tout autre projet spatial: "l'Initiative de défense statégique", aussi connue sous le nom de Star Wars.

- Article rédigé par l'Agence Science-Presse, 5 février 2003.

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