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Se plonger dans la lecture d’un bon roman durant le temps des Fêtes est un excellent moyen de décrocher, comme on dit. En se mettant dans la peau des protagonistes d’une histoire de plusieurs centaines de pages, on a non seulement l’impression d’avoir accès à d’autres univers, mais ce sentiment peut ensuite nous accompagner pendant un certain temps, voire durant toute notre vie pour les livres qui nous ont le plus marqué.

Or une étude publiée cet automne par Gregory S. Berns et ses collègues dans la revue Brain Connectivity semble montrer les bases neurobiologiques de ce phénomène. Vingt-et-un jeunes adultes sont d’abord venus durant 5 jours consécutifs s’allonger dans un appareil d’imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) permettant d’établir pour chacun un diagramme général de la connectivité de leur cerveau.

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Puis, durant les neuf jours suivants, ils avaient à lire une trentaine de page du roman Pompeii, de Robert Harris, une histoire fictive enlevante basée sur l’histoire réelle de l’éruption du volcan Vésuve en l’an 79 en Italie. Et chaque matin, ils venaient s’allonger dans le scan pour permettre aux scientifiques de d’identifier des d’éventuels changements dans la connectivité cérébrale. Finalement, après avoir terminé le roman au bout de neuf jours, les sujets sont revenus pendant un autre 5 jours consécutifs dans l’appareil d’IRMf.

Berns et ses collègues ont alors observé une augmentation dans la connectivité des >grandes voies de communication (ou «hubs», en anglais) du gyrus angulaire / supramarginal gauche et du gyrus temporal postérieur droit. Ces zones cérébrales ayant par le passé déjà été associées à la prise de perspective d’une autre personne et à la compréhension d’une histoire, l’augmentation de leur connectivité suite à la lecture d’un roman semble être tout à fait cohérent avec ces fonctions.

Ces modifications diminuaient cependant rapidement durant les 5 jours suivants la fin de la lecture du roman. Ce qui n’était pas le cas d’un autre changement de connectivité observé cette fois-ci dans le cortex somatosensoriel autant dans l’hémisphère gauche que dans l’hémisphère droit. La connectivité accrue dans cette région construisant des représentations de nos sensations corporelles, qui semble avoir une durée beaucoup plus grande, suggère un mécanisme potentiel pour ce qu’on appelle la «sémantique incarnée».

Cette idée remonte à la publication de Metaphors we live by, de George Lakoff et Mark Johnson, où ils montraient d’une part que notre langage de tous les jours est rempli de métaphores (avoir une dure journée ou du temps devant soi, entrer ou sortir d’une relation, etc.), et d’autre part que la compréhension de ces métaphores s’enracinait dans nos expériences sensori-motrices corporelles.

Pour en revenir à l’étude de Berns, on savait déjà qu’un bon roman nous permet de nous mettre dans la peau des personnages. On découvre maintenant que cette expression peut être presque prise au sens propre, pour le phénomène qu’elle décrit, et même pour les mécanismes cérébraux qui nous permettent de la comprendre…

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