earworm_wide-8c54139dce8fed577972b49f4b7a97396e23cacc-s1400-c100.jpg

Pour les raisons que les lecteurs et lectrices assidues de ce blogue commencent à connaître (voir par exemple mon premier « journal de bord » de l’année intitulé « Le point sur le « sprint final » pour le bouquin avant sa sortie cet automne »), je me contenterai cette semaine de vous signaler un commentaire sur un phénomène intriguant, celui des « vers d’oreille ». Vous savez, ces bouts de chanson qui se mettent à jouer en boucles dans nos têtes pendant des heures, et parfois même des jours ! Je qualifie le billet de blogue de John Medina dont il est ici question de « commentaire » car comme il l’avoue d’entrée de de jeu, on ne sait pas grand-chose sur les causes de ce phénomène intrigant. Mais les deux points « neuro » abordés sont tout de même intéressants et renvoient à deux concepts clés, évidemment présents dans mon site et mon livre : celui de simulation mentale et de mémoire de travail.

Medina rapporte que lorsqu’on fait entendre une pièce musicale à quelqu’un dans un scan de résonance magnétique fonctionnelle, on voit son cortex auditif s’activer. Et lors qu’on arrête soudainement la pièce avec comme consigne de continuer alors à la chanter mentalement, on voit à peu près la même activation dans le cortex auditif. Rien de surprenant à cela aujourd’hui, alors qu’on sait que les aires sensorielles et motrices sont invariablement recrutées lorsque l’on fait ce qu’on appelle couramment de l’imagerie mentale. Cela aurait cependant paru étonnant à des scientifiques de la fin du XXe siècle qui baignaient dans les métaphores cognitivistes où penser et imaginer rimaient alors avec manipulation de symboles abstraits, et donc plutôt avec l’activation de régions associatives de haut niveau dans notre cerveau, pas des aires sensorielles ou motrices. Mais l’on s’est aperçu depuis que notre pensée est « incarnée », c’est-à-dire qu’elle s’ancre beaucoup plus qu’on pensait dans nos fonctions sensorimotrices, une approche qui traverse donc évidemment tout mon livre.

Médina signale ensuite le second point de son commentaire, à savoir que dans le cas d’un ver d’oreille, le réseau cérébral qui s’active est plutôt celui qu’on associe à la mémoire de travail, cette mémoire tampon qui nous permet de retenir quelques items pendant quelques secondes, mais qui s’évanouit normalement par la suite. Sauf, semble-t-il, pour les vers d’oreille, pour lesquelles un sous-ensemble de régions cérébrales qui correspond à ce qu’on appelle la « boucle phonologique » semble être le circuit où les vers d’oreille se « réverbèrent » inhabituellement longtemps. Pourquoi ? On ne semble pas pour l’instant en avoir la moindre idée, outre le fait que ce sont généralement des mélodies simples et accrocheuses.

Abonnez-vous à notre infolettre!

Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!

Quant à savoir comment s’en débarrasser, disons qu’ils finissent par passer, et que se mettre dans la tête d’autres mélodies peut parfois aider. En espérant qu’elles ne deviennent pas à leur tour un nouveau ver d’oreille ! On aura au moins alors « changé le mal de place »…

Je donne