En manchette la semaine dernière:
Qui a peur de l'uranium?
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Qui a peur de l'uranium (suite)
Notre cousin,
l'OGM
Les premiers
Chinois dans l'espace
Ballet cosmique
Le gène
des lève-tôt
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Que le véritable humain se lève!
Et s'il n'y avait pas une espèce humaine, mais
plusieurs ? Et si des humains tout à fait semblables à
nous avaient été nombreux à disparaître
au fil des âges? La leçon ne serait-elle pas applicable
à notre propre espèce ?
Voulez-vous discuter évolution?
Discutez-en dans le forum Science-Presse/Médito
La théorie classique, on la connaît: bien que
depuis trois millions d'années, les groupes de ce qu'on
appelle les hominidés aient compté de nombreuses
branches qui se sont éteintes, la toute dernière
branche, la nôtre, celle des humains" modernes",
ou Homo Sapiens, elle, ne connaît pas d'embranchements.
Nous descendons tous d'un petit groupe d'humains qui aurait vécu
en Afrique il y a moins de 150 000 ans, et dont la lignée
s'étendrait, ininterrompue, jusqu'à nous. On se
rappellera à ce sujet que des analyses de plusieurs échantillons
d'ADN ont conclu il y a quelques mois que nous avions tous un
ancêtre commun mâle, qui avait vécu en Afrique
il y a environ 59 000 ans (à ce sujet, lire
cet article).
Sauf qu'il y a une autre hypothèse, dérangeante.
L'extinction des espèces ne s'appliquerait pas qu'à
des hominidés qui vivaient il y a deux ou trois millions
d'années, comme les australopithèques, ou à
de vagues cousins comme les Néandertaliens (disparus il
y a environ 50 000 ans). L'Homo Sapiens lui-même se diviserait
en plus d'une espèce, dont au moins une se serait éteinte.
L'Homme serait donc bien plus fragile qu'on ne le soupçonne...
Cette réapparition de la théorie des "multiples
ancêtres", elle provient de prélèvements
d'ADN sur neuf corps vieux de 8000 à 15 000 ans, et un
dixième vieux de 60 000 ans, retrouvés en Australie.
Le plus vieux d'entre eux, appelé l'homme de Mungo -du
nom d'un lac près duquel il a été trouvé
il y a 26 ans- devient du même coup le
plus vieil individu dont on ait pu récupérer un
fragment d'ADN intact. Et cet homme de Mungo serait, concluent
des anthropologues au terme d'une comparaison entre son code
génétique et celui de 1000 personnes vivant aujourd'hui,
un homme tout à fait "moderne", c'est-à-dire
tout à fait semblable à nous... mais un homme dont
on ne retrouve pourtant, aujourd'hui, aucun descendant.
L'expression "homme moderne" signifie qu'il est
pareil à nous, qu'il est de la même famille que
nous, au
contraire des hommes du Néandertal, qui sont de lointains
cousins.
Cette découverte sur l'homme de Mungo ne peut signifier
qu'une chose, affirment les anthropologues de l'Université
nationale de Canberra, dirigés par Alan Thorne: des Homo
Sapiens vivaient en Australie il y a 60 000 ans, avant que n'y
arrive l'Homo Sapiens dont nous descendons -et qui, lui, est
bel et bien originaire d'Afrique, descendant de cet ancêtre
mâle qui vivait il y a environ 59 000 ans, et de cette
femelle, "Eve", d'il y a environ 143 000 ans.
Les chercheurs présument que ce "second"
Homo Sapiens serait originaire d'Asie, mais aurait une origine
plus lointaine encore, peut-être un de ces hominidés
connus depuis des décennies sous le sobriquet d'Homo Erectus,
qui aurait quitté l'Afrique il y a 1,5 millions d'années.
Il y a d'ailleurs longtemps que les anthropologues chinois prétendent
que les preuves sur leur territoire sont suffisamment concluantes
pour effectivement conclure à l'existence, jadis, d'un
deuxième groupe d'Homo Sapiens.
"Ce que nos preuves appuient, écrit Alan Thorne
dans les Proceedings of the National Academy of Sciences,
c'est que la situation est beaucoup plus complexe que ce que
les partisans de la théorie africaine ont imaginé."
Les Homo Sapiens auraient pu émerger simultanément,
en Afrique, en Europe et en Asie, à partir d'une descendance
remontant aux Homo Erectus.
Au
même moment, un autre groupe d'anthropologues, américains
ceux-là, publie dans la dernière
édition de la revue Science un tout autre type
d'analyse, mais qui arrive lui aussi à la conclusion que
l'homme moderne aurait pu compter plusieurs branches -dont une
serait liée aux Néandertaliens (alors qu'on avait
conclu ces deux dernières années que les Néandertaliens
étaient au contraire de lointains cousins sans lien génétique
avec nous). Milford Wolpoff, de l'Université du Michigan,
et ses trois collègues ont examiné des crânes
anciens sur trois continents, et concluent que plusieurs groupes
d'humains ont partagé des abris, de la nourriture -et
ont formé des couples, mélangeant ainsi leurs gènes
respectifs.
Il faudrait, disent-ils, concentrer les recherches sur des
squelettes d'il y a quelques dizaines de milliers d'années,
vivant aux limites entre l'Europe et l'Asie par exemple, ou aux
limites entre l'Europe et l'Afrique, afin
d'en trouver qui possèdent des traits caractéristiques
à deux "espèces" humaines.
Il y a bien sûr des sceptiques. Chris Stringer, du Musée
d'histoire naturelle de Londres, rappelle qu'il subsiste une
incertitude quant à la fiabilité de fragments d'ADN
aussi anciens. Les preuves fossiles en faveur d'une seule et
unique origine africaine restent également, pour l'instant,
indisputées.
Mais si les partisans d'une origine "multiple" ont
raison, alors cela pose un tout autre problème. On a toujours
supposé que les "disparus", tels que l'homme
de Néandertal, avaient pu disparaître pour des raisons
qui étaient propres à leurs espèces: mauvaise
adaptation aux changements climatiques, épidémies,
voire guerres fratricides contre les Homo Sapiens. Mais si l'Homo
Sapiens lui-même peut aussi facilement disparaître,
ou du moins une ou quelques-unes de ses branches, que conclure
de la branche qui nous intéresse -c'est-à-dire
nous-mêmes?
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