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semaine du 15 mars 2004



Les chercheurs à la rue

La colère des chercheurs français ne semble pas près de s'arrêter. Mais c'est à travers une bonne partie de l'Europe, et même au-delà, que ces derniers mois, les universitaires ont quitté la tranquillité de leurs laboratoires et bureaux, et ont commencé à jouer un rôle de citoyen: protester.

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En France, après une pétition qui a désormais ramassé 70 000 noms, après être descendus dans la rue le 29 janvier (voir Les chercheurs à la rue), après une lettre de démission déposée le 9 mars par quelque 2000 des 3500 responsables de laboratoires, les chercheurs n'ont toujours pas reçu de réponse satisfaisante de leurs supérieurs.

Même la revue britannique Nature en fait son éditorial dans son édition du 12 mars, en commençant avec cette phrase mi-flatteuse mi-moqueuse: "Les scientifiques français prennent la rue plus facilement que la plupart des autres, mais ils sont à présent dans leur bon droit, confrontés à un gouvernement négligent."

Les discussions ont repris après la démission de masse du 9 mars, mais elles butent toujours, selon Libération, sur les 550 emplois à temps plein, transformés en postes temporaires, et dont le Syndicat national des chercheurs scientifiques réclame le retour.

Mais bien au-delà de ces 550 postes, c'est la diminution progressive des fonds alloués à la recherche qui irrite les chercheurs depuis des années. La pétition Sauvons la recherche fut lancée le 8 janvier, deux jours après le discours de début d'année du président Jacques Chirac, où il présentait la recherche comme une "priorité nationale". En réaction, la pétition dénonçait plutôt "l'asphyxie financière des laboratoires" et demandait une série de mesures d'urgence avant le 9 mars, faute de quoi les opposants démissionneraient en masse. Ce qui fut fait.

Le problème n'est pas limité à la France. En Italie et au Royaume-Uni, les universitaires protestent aussi contre le gel des salaires ou les perspectives de carrières bouchées. En Italie, cela s'est concrétisé par deux journées de grèves des jeunes scientifiques, en février et mars, en réaction à un projet de loi, publié le 16 janvier, qui accroît les heures d'enseignement et asseoit le contrôle du gouvernement sur l'embauche dans les universités. Dans tous les cas, on brandit l'argument de l'exode des jeunes cerveaux vers les Etats-Unis.

Mais même s'ils étaient des dizaines de milliers à protester, à descendre dans la rue ou à faire la grève, leurs cris auraient du mal à avoir autant d'impact que ceux de groupes moins favorisés. Comme l'a déclaré aux journalistes un neurologue d'Oxford, lors d'une journée de grève des universitaires londoniens, le 25 février: "bien sûr que les universitaires ne sont pas payés assez. Mais une grève ne fera aucun bien. Au contraire d'un conducteur d'autobus, personne ne se soucie de la grève d'un scientifique."

Ce n'est pas tout à fait exact, à en juger par un sondage récent du quotidien La Croix, selon qui huit Français sur 10 sont sympathiques à la cause des chercheurs. Une pétition d'appui circule également, en ce moment, parmi la population.

Même outre-Atlantique, au Québec, en janvier (voir ce texte), des scientifiques ont protesté, par lettres et mémoires, contre les coupes budgétaires du gouvernement, celles de l'an dernier et celles que l'on craint pour cette année. C'est beaucoup moins bruyant mais, pour le milieu universitaire québécois, c'est un de ces rares cas où ce groupe a haussé le ton.

Mais c'est en France que les cris sont les mieux organisés. Jamais les protestations n'avaient atteint une telle ampleur dans ce milieu si souvent associé à une tour d'ivoire. Dans un document de 24 pages signé par quatre prestigieux scientifiques (François Jacob et Jean-Marie Lehn, Prix Nobel, et Pierre-Louis Lions et Philippe Kourilsky, directeur général de l'Institut Pasteur), adressé au président Jacques Chirac et publié le 10 mars par le quotidien Le Monde, ils font une série de propositions visant à donner "un nouvel essor à la recherche": décentraliser, afin que les universités puissent retrouver leur rôle local et régional, réformer le système actuel d'emplois où des gens sous-payés sont insuffisamment évalués, au point où on "en arrive à dissuader l'excellence", etc.

La France investit déjà suffisamment en recherche, allègue le gouvernement, qui rappelle que l'Union européenne suggère d'allouer à la recherche 1% du PNB; et c'est une condition que remplit le pays de Pasteur. C'est oublier, lui rétorquent le mouvement Sauvons la recherche, qu'une partie imposante de cette somme va à deux méga-industries: celle du nucléaire et celle de l'aérospatiale.

Résistez à l'envie de faire des compromis à court terme, leur conseille Nature dans son éditorial, sauf si ces compromis permettent de garantir la santé à long terme de la recherche –un avis que l'on devine également destiné aux chercheurs britanniques. "Le gouvernement n'a aucune vision à long terme pour la recherche, et il n'y a aucune raison de croire qu'il veuille en développer une", poursuit le rédacteur en chef de la revue britannique –et on se demande bien s'il parle encore du gouvernement français ou s'il envoie un message à son propre gouvernrement.

Bref, ce qui se passe actuellement en France est suivi avec une grande attention dans les universités des autres pays –et servira peut-être de modèle.

 

Pascal Lapointe

 

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