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En manchettes sur le Net est
une production Agence Science-Presse
 |
Recul gênant
Réalisant qu'elle avait accompli un désastre en terme
de relations publiques, la compagnie Monsanto abandonne son "gène
Terminator". Un gène qui, pourtant, n'existe pas, sur lequel
elle ne détient même pas de droits... et à propos duquel
les recherches n'ont jamais vraiment démarrées!
Cette décision survient au moment même où, en Grande-Bretagne,
un groupe
de trois scientifiques attaque les aliments transgéniques dans
la revue Nature. Une question de timing ?
L'idée derrière le gène Terminator, dont l'Agence
Science-Presse vous avait parlé en manchette dès
février, était pourtant, d'un point de vue strictement
économique, géniale: depuis quelques années, Monsanto
vend des graines génétiquement améliorées à
des fermiers de l'Ouest américain et canadien; Monsanto, par contrat,
exige de ces fermiers qu'ils n'utilisent pas ces graines pour réensemencer
leurs champs l'année suivante, mais qu'ils se réapprovisionnent
exclusivement chez Monsanto; Monsanto constate que les fermiers ne lui obéissent
pas, mais qu'ils utilisent les graines de la récolte précédente,
comme ils le font depuis des milliers d'années; Monsanto annonce
donc qu'elle cherche à mettre au point un gène qui, injecté
dans ces graines, les rendra stériles après la première
récolte. Donc, les fermiers n'auront cette fois plus d'autre choix
que de revenir acheter chez Monsanto -puisque les graines en question sont
vraiment plus efficaces que celles des concurrents.
D'un point de vue économique, c'est génial, mais d'un point
de vue sociologique, c'est foutument dangereux: ça devient un contrôle
direct sur "les semences de la vie". Quelqu'un a donc appelé
ça le gène Terminator. Et beaucoup de médias ont convaincu
le public que le gène existait d'ores et déjà, ce qui
n'a fait qu'amplifier l'image de Monsanto comme le "méchant"
de toute cette histoire.
La semaine dernière, Monsanto annonçait
donc qu'elle abandonnait toutes ces recherches sur ce gène. Celui-ci
avait encore des années de recherche avant de devenir réalité,
mais de toute évidence, les millions de dollars que ces recherches
auraient encore coûté n'auraient
été rien à côté de la dégradation
de l'image de marque de la compagnie -ou de ce qu'il en reste. Les groupes
écologistes ont bien entendu crié à la victoire, leurs
pressions ayant sans doute joué dans la balance.
Mais
Monsanto prépare sa revanche, souligne Libération.
L'annonce de la semaine dernière était prévisible:
dès avril, le président de la multinationale de Saint-Louis
(Missouri), Robert Shapiro, avait engagé une consultation de cinq
ans sur la légitimité de développer ou non des semences
stériles. Par ailleurs, cet abandon ne devrait pas coûter cher
à Monsanto, puisque les recherches n'avaient jamais réellement
démarré! En fait, la compagnie travaille depuis des mois déjà
sur d'autres façons de se lier les agriculteurs: on parle en particulier
de semences qui, si on osait les réutiliser l'année suivante,
perdraient la propriété (par exemple, la résistance
à un insecte) que leur avait justement ajoutée la manipulation
génétique. Bref, elles reviendraient à leur état
"normal" -d'où une perte sèche pour l'agriculteur.
Sécuritaires, pas sécuritaires
Coïncidence ou pas, au même moment, la revue Nature publiait
un
texte d'opinion signé par trois chercheurs britanniques, qui
critique les critères utilisés jusqu'ici pour décréter
sécuritaires les aliments transgéniques.
Ces normes, écrivent-ils, utilisées aussi bien en Europe
qu'en Amérique du Nord, "sont biaisées et devraient être
abandonnées". La base sur laquelle ont été érigées
ces normes ("substantial equivalence": si la composition chimique
d'un aliment transgénique est la même que celle d'un aliment
naturel, on peut l'approuver) serait fausse au départ, selon Erik
Millstone, du groupe de recherche sur les politiques scientifiques à
l'Université du Sussex, Eric Brunner, du département d'épidémiologie
au Collège universitaire de Londres, et Sue Mayer, du groupe de pression
GeneWatch. Ils qualifient cette base de "concept pseudo-scientifique",
rien de moins.
Et ils réclament que soit démontré hors de tout
doute le caractère inoffensif des aliments transgéniques,
sans dire toutefois comment ce miracle pourrait être accompli. |