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Et pourtant, il tourne!
Or donc, des scientifiques auraient fabriqué le plus petit
moteur du monde: un moteur de la taille d'une molécule. Et deux fois
plutôt qu'une. Comment ça peut bien fonctionner, vous demandez-vous.
Et surtout, pourquoi se donner tout ce mal?
On croit rêver: on ne parle pas ici d'ingénieurs qui ont
patiemment assemblé de minuscules pièces d'équipement
s'apparentant à des vis et à des boulons, si petites qu'il
aurait fallu les manipuler au microscope -un exploit qui n'a pourtant eu
lieu qu'il y a deux ans. On parle de plus petit encore: des physiciens qui
ont patiemment assemblé 78 atomes, pour former une molécule
"artificielle", laquelle a pour caractéristique d'être
dotée de mouvement: elle tourne sur elle-même. Et ce mouvement,
exactement celui d'un moteur, peut en retour alimenter en énergie
à peu près n'importe quoi.
Bon, d'accord, il faut y aller mollo: il a fallu quatre ans pour assembler
ces 78 atomes, ce qui revient assez cher l'atome. Et la molécule
-que ces 78 atomes font ressembler à un entrelacement de trois roues-
met tout de même quelques heures à faire un tiers de tour.
Mais à l'ère de la miniaturisation qui est la nôtre,
ce "moteur moléculaire" constitue une révolution:
désormais, il devient par exemple possible d'imaginer de
microscopiques robots se promenant dans notre corps, à la recherche
de l'endroit où aller "déposer" leur "cargaison"
de médicament.
Et mieux encore: ce n'est pas un, mais deux moteurs moléculaires
qui sont décrits dans la dernière édition de Nature,
par deux articles différents. Le second, composé de 58 atomes
de carbone, est moins "créatif", si l'on peut dire. Il
a pour but premier de copier
la nature: un moteur moléculaire, pour elle, c'est en effet de
l'histoire ancienne. C'est ce qui permet aux bactéries de se mouvoir,
aux muscles de se contracter, ou aux spermatozoïdes de nager.
Le premier moteur a été produit par l'équipe
du Dr Ross Kelly, du Collège de Boston. Leur travail démontre,
selon le Dr John Schwab, du National Institute of General Medical Sciences,
qui a financé la recherche, que "nous comprenons, au moins à
un certain niveau, comment la nature peut convertir l'énergie chimique
en mouvement contrôlé".
"Bien que les biologistes les étudient depuis des décennies,
explique le Dr Kelly à la BBC, nous n'avions toujours aucune idée
de la façon dont ils (ces moteurs) travaillent au niveau moléculaire.
Maintenant,
nous avons une réponse."
Cette réponse, pour ceux qui pourront suivre jusqu'au bout, c'est
que l'énergie nécessaire à la rotation provient, pour
le moteur du Dr Kelly, d'une enzyme appelée ATP, source d'énergie
des cellules composant tout être vivant. L'ATP possède une
énergie interne qui peut se traduire par cette rotation. Quant au
second "moteur", réalisation d'une équipe composée
de chercheurs allemands, néerlandais et japonais, il
est mû par la lumière et une hausse de la température
(à plus de 40 C) -mais ne peut tourner que dans une seule direction.
Un "grain" de lumière -un photon- fait basculer la molécule
de 90 degrés, ce qui la place dans un état instable qui l'amène
à tourner encore de 90 degrés. Un autre photon, et on recommence
le processsus.
Quant à l'autre moteur, il peut aller dans l'une ou l'autre direction,
mais "bloque" au bout d'un tiers de tour. En d'autres termes,
l'un comme l'autre sont encore loin de pouvoir réellement imiter
la nature.
Mais tout le monde s'entend pour dire que c'est un premier pas qui pourrait
mener très loin les nanotechnologies (ces technologies de l'infiniment
petit): le fait de comprendre les mécanismes à la base de
la contraction de nos muscles, par exemple, stimule d'ores et déjà
l'imagination. Prochaine étape de ce rêve: des moteurs moléculaires
au mouvement continu. Ca ne saurait tarder... |