Semaine du 23 août 1999

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Le grand pas en arrière -y a quelqu'un?


L
e grand pas en arrière accompli par l'Etat du Kansas, dont nous parlions la semaine dernière, a fait sursauter le reste du monde, et -Dieu merci- une partie des Etats-Unis. Mais un petit tour sur Internet révèle que bien peu de décideurs américains s'en étaient préoccupés à haute voix avant qu'il ne soit trop tard.

 

Le Bureau du tourisme de l'Etat du Kansas aurait sûrement souhaité avoir une meilleure publicité. Le Times de Londres, parmi d'autres, parle de ces étranges américains, chez qui les autorités responsables de l'éducation peuvent effacer -tout au moins, dans l'Etat du Kansas- toute notion d'évolution -y compris le Big Bang!- de tous les examens de scolaires. Gênant. Et jusqu'à l'aussi prestigieuse qu'internationale revue Science qui met l'accent sur la vision tordue qu'ont de la science ces gens. Avant de donner la parole à une foule d'intervenants de l'éducation, des six présidents d'universités et de collèges jusqu'au gouverneur de l'Etat, qui font part de leur indignation. "Un recul d'un siècle"; "une solution terrible, tragique, embarrassante, à un problème qui n'existait pas".

"Les changements que le Kansas tente de faire sont les plus étendus que nous ayons jamais vus", déclare au Times la porte-parole du National Centre for Science Education.

Le problème avec tous ces intervenants, c'est qu'on peut se demander où ils étaient depuis six mois, alors que l'intention du comité d'Etat sur l'éducation de voter sur cette question était largement connue.

Par exemple, une petite visite à la section Enseignement des sciences de notre Bibliothèque révèle des groupes directement concernés par ce débat. Or, sur leurs sites web, c'est le silence total: le National Science Institute for Science Education, co-géré par la National Science Foundation, principal organisme subventionnaire américain, qui proclame avoir pour mission de "s'attaquer à l'absence de culture scientifique qui sévit aux États-Unis" ne disait pas un seul mot du Kansas au moment où nous l'avons visité. En fait, il n'avait pas dit un seul mot depuis mai 1999.

Silence total aussi avec CoVis, autre site lié au monde de la recherche et des universités et voué à la promotion de la culture scientifique.

Remontons d'un cran et considérons la section plus large Science - Associations et organismes. Sur le site de la Union of Concerned Scientists, on ne semble pas très "concerned" (préoccupé) par le débat.

Tout de même: la National Science Teachers Association (NSTA), elle, a émis un communiqué le 13 août. II faut dire que c'est cette association qui s'était impliquée dans le débat en avril 1998 avec la publication d'un courageux document, Teaching Evolution. Mais celui-ci s'adressait aux professeurs, et non au grand public: il avait pour but premier de donner des éléments de réponse à ceux qui se retrouvaient confrontés en classe au débat "évolution vs. création"... ou à ceux qui, car il y en a, avaient carrément décidé de ne plus parler d'évolution en classe, en raison du nombre croissant de maux de tête que cela leur causait (parents opposés, élèves méfiants, etc.)

On peut lire dans ce communiqué du 13 août: "Il est clair que la bataille pour éduquer les enfants aux sciences reste encore à gagner." On ne saurait mieux dire.

Car la vision des créationnistes, suivant laquelle l'évolution est une théorie qui n'a jamais été prouvée et devrait donc être traitée sur le même pied que la création en six jours, gagne carrément du terrain. Bien que le dernier coup d'éclat remonte à quatre ans -c'était la décision de l'Alabama d'apposer sur tous les manuels de biologie un auto-collant stipulant que "l'évolution est une théorie controversée" parce que "personne n'était présent lorsque la première forme de vie est apparue", les créationnistes n'ont pas chômé depuis. En fait, la décision rendue au Kansas s'inscrit dans une plus vaste stratégie, résume le magazine britannique The New Scientist. Ils ont tenté dans les années 80 d'imposer dans les programmes scolaires un enseignement de l'évolution sur un pied d'égalité avec la création et ils ont échoué -entre autres, devant les tribunaux. Ils tentent donc maintenant d'exclure toute référence à l'évolution et ils viennent de remporter leur plus importante victoire. Les profs ne sont pas empêchés de parler évolution, mais ils y perdent toute motivation, puisque celle-ci sera exclue des examens de fin d'année, à tous les niveaux. Ni australopithèques, ni évolution géologique étalée sur des millions d'années, ni évolution cosmique.

Et la stratégie ne prendra pas fin au Kansas: outre l'Alabama et de ses auto-collants, au Texas, la partie "conservatrice" du comité d'Etat sur l'éducation insiste beaucoup pour que soit adopté un manuel de biologie qui ne parle pratiquement pas d'évolution; en Californie, en Ohio, au Michigan et en Virginie, constate le Kansas City Star dans une éclairante mise en contexte, des groupes de chrétiens conservateur s'approprient des représentations de plus en plus pesantes dans les comités d'Etat sur l'éducation et dans les comités locaux. La plupart ne cachent pas leur volonté d'intervenir dans ce que l'école enseigne à leurs enfants.

Mais dès lors qu'on sait que ce débat dure depuis des décennies, on s'étonne encore plus que si peu de gens aient travaillé sur l'éducation populaire, la vulgarisation, l'explication des fondements de l'évolution, la clarification de notions telles que "preuves", "théorie", "méthode scientifique".

Dans son communiqué, la NSTA encourage enseignants et scientifiques à s'impliquer davantage dans leurs communautés. Jusqu'à l'Union géophysique américaine qui s'est réveillée et suggère à ses membres de s'intéresser à ce qui se passe au niveau politique régional. Il faut dire que ce n'est pas tous les jours que ces distingués experts apprennent que leurs contemporains croient que le Grand Canyon s'est formé en quelques heures, des suites d'une éruption volcanique...

 

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