En manchettes la semaine dernière:
Le tueur transgénique
A lire également cette semaine:
Cure de rajeunissement universelle
N'oubliez pas vos gants et
votre foulard
Mars en 3-D
Le quart d'un être humain
est une plante
Un dinosaure qui a du nez
Et plus encore...
Archives des manchettes

LE KIOSQUE
Pour être branché sur la science
Notre nouvelle section:
Capsules québécoises
Qui sommes-nous?

Retour à
la page d'accueil

En manchettes sur le Net est
une production Agence Science-Presse
 |
Le clonage est-il mort?
Non, il n'est pas mort. Mais la triste nouvelle qu'il a fallu annoncer
à la brebis Dolly la semaine dernière -tu vieillis plus vite
que prévu, ma petite- renvoie soudain le clonage au rang des technologies
en plein essor certes, mais pour lesquelles la route est encore longue,
beaucoup plus longue qu'on ne le soupçonnait...
Ce n'est pas que Dolly soit ridée. Non plus que des cheveux blancs,
des problèmes d'arthrite ou des pertes de mémoire soient apparus
chez elle. C'est
qu'elle a les télomères moins longs.
Les télomères, ce sont les extrémités des
chromosomes de tous les êtres vivants. Ils ont pour fonction de retarder
l'inévitable dégradation des chaînes de chromosomes
-un peu comme le fil retient les perles d'un collier. Au bout d'un certain
temps, la dégradation devient telle que la cellule meurt -ou plus
exactement, elle se suicide. C'est tout le corps qui vieillit, et au-delà,
c'est la mort qui pointe le bout de son nez.
Dolly n'a pourtant que trois ans. Elle ne devrait donc pas avoir déjà
des télomères montrant des signes d'usure. Mais le hic, c'est
que cette brebis a été conçue par clonage, et plus
précisément, clonée à partir d'une cellule d'un
animal adulte. Et cet animal avait six ans. Dolly,
en conséquence, aurait-elle neuf ans?
Autrement dit, la pendule des télomères, clé du
vieillissement, "n'aurait pas été remise à zéro
au moment du clonage", explique le Dr Ian Wilmut, de l'Institut Roslin,
en Ecosse, où est née Dolly, et
qui est à l'origine de cette étude "entre deux âges".
Encore du travail
Cette nouvelle ne réduit toutefois pas à néant les
perspectives de clonage, comme certains l'ont affirmé fort témérairement.
Tout d'abord, le lien entre télomères et vieillissement est
loin d'être clair aux yeux des scientifiques: ce n'est pas pour rien
qu'il s'agit actuellement d'un des secteurs-clefs des études sur
le vieillissement (manchette du 22 mars 1999).
Par ailleurs, il faut rappeler que le clonage à partir de cellules
d'embryons, (beaucoup plus ancien que le clonage d'adultes), ne semble pas
rencontrer ce même problème, lui. Ensuite, Dolly n'a pas vraiment
l'âge de ses télomères. Après tout, elle est
suivie régulièrement par l'Institut Roslin et tous les tests
démontrent qu'elle est en pleine forme. Maman deux fois, ses bébés
se portent à merveille. Sauf que, de toute évidence, dans
les profondeurs de ces cellules, il se passe quelque chose de pas normal.
Et il n'y a pas que le vieillissement: serait-il possible que ces cellules
transportent aussi avec elles les problèmes de santé de l'individu
cloné? Une question qui est loin d'être résolue, et
qui repousse un peu plus loin toute perspective de clonage humain...
Etonnamment, c'est exactement cette question qu'avait soulevé
Libération il y a moins d'un mois: intitulée "Plus de 40% des clones
d'animaux adultes meurent prématurément", une entrevue
avec Jean-Paul Renard, directeur de recherche à l'INRA rappelait
tour à tour le décès prématuré (une anémie
sévère) d'une vache, premier clone d'un mammifère adulte
né en France, et les nombreux échecs dont on parle bien moins
souvent que des quelques rares succès de clones d'adultes, nés
en Ecosse, aux Etats-Unis (on vient tout juste d'annoncer la naissance
du premier mâle cloné à partir d'un adulte, tous
les autres ayant été jusqu'ici des femelles) et au Japon depuis
1996.
"Sur les huit veaux nés au Japon, quatre sont morts à
la naissance ou peu de temps après. Et il y a aussi une grande mortalité
chez les animaux clonés à partir de cellules prélevées
non sur des adultes mais sur des foetus. Les publications annonçant
la naissance de clones relatant toujours le nombre de clones morts ou avortés
dans la même série d'essais, nous avons fait les comptes :
entre 40% et 74% des clones issus de cellules somatiques meurent pendant
les derniers mois de gestation ou juste après la naissance. Généralement
suite à des problèmes circulatoires ou respiratoires. Chez
nous, à l'Inra, sur sept naissances de clones à partir de
cellules somatiques, nous avons eu trois décès. C'est anormal.
En plus, comme le montre notre étude, le clonage semble induire des
effets délétères à plus long terme."
S'agirait-il d'un "défaut de reprogrammation" de la
cellule utilisée pour cloner? Si tel est le cas, les firmes de biotechnologie
ont bien du travail devant elles, et pas seulement sur le plan du clonage:
toute cette recherche, abordée sans fin depuis l'automne dernier,
autour des cellules-souches, implique elle aussi une "reprogrammation"
de la cellule (les cellules-souches sont ces cellules qui ne se sont pas
encore spécialisées et auxquelles on pourrait, en théorie,
ordonner de donner naissance à un muscle, un foie, de la peau, etc.).
Se pourrait-il que, même reprogrammées, elles transportent
en elles l'âge du donneur, voire ses maladies? |