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Il y a 35 ans, une idée qui, à l’époque, avait pu paraître farfelue, allait germer parmi les médias québécois : une agence de presse spécialisée en science, destinée à alimenter les petits médias en nouvelles scientifiques.

Depuis sa fondation, l’Agence a bien changé : d’un service de nouvelles desservant l’ensemble des hebdos régionaux à ses débuts, elle est devenue, avec Internet, un imposant site d’informations scientifiques, rejoignant des centaines de milliers de passionnés chaque année, dont une importante proportion venant de France.

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Nous vous proposons d’ici au 22 novembre, jour de célébration des 35 ans, de passer en revue certains des bons coups… et d’autres curiosités.

L'information scientifique de demain

À quoi ressemblera le journalisme scientifique de demain ? C’est une question qui n’était pas de rigueur en 1978, quand a été fondée l’Agence Science-Presse : le journalisme scientifique, en Amérique du nord et en Europe, vivait alors une période d’expansion. Mais elle est devenue de rigueur dans les années 1990 et 2000. La crise des médias, puis la montée d’Internet : le réseau a sur-multiplié les sources d’informations... mais pas les revenus.

Les blogues de science et tout ce qu’ils symbolisent —droit de parole élargi, pont entre scientifique et citoyen, conversation 2.0— sont sûrement une partie importante de cet avenir. Mais jusqu’où? C’est la question qui était posée dans un congrès tenu en janvier 2008.

Les blogues: l'avenir du journalisme?

Les blogues sauveront-ils le journalisme scientifique? Chose certaine, aux États-Unis, on est en train d’assister à un basculement des pouvoirs : tandis que les blogueurs expérimentent à fond de train et vont chercher un public déjà motivé, les médias, eux, en sont encore à se questionner.

« Le New York Times a fait beaucoup de chemin depuis trois ans, décrit Tom Levenson, enseignant au MIT, en donnant en exemple le blogue du journaliste Andrew Revkin, qu'il voit comme un modèle d’appropriation de la blogosphère. « Mais leur ADN est encore un vieil ADN. »

Tom Levenson était l’un des 225 inscrits au deuxième congrès annuel sur le « science blogging » —les blogues en science— un congrès auquel assistait l’Agence Science-Presse pour Science! On blogue. Et un congrès dont l’existence témoigne que quelque chose est en train de se passer, qui bouscule les vieilles habitudes.

Il y a d’abord de moins en moins de journalistes scientifiques, a rappelé Becky Oskin, journaliste pigiste en Caroline du Nord, et ce déclin, qui a commencé bien avant Internet, oblige à considérer avec optimisme le débarquement d’une foule de blogueurs intéressés par les sciences : s’il y a moins d’informations d’un côté, il y en a plus de l’autre.

Ce débarquement suscite certes, en contrepartie, des inquiétudes : la facilité avec laquelle on émet son opinion dans la blogosphère conduit-elle à une confusion entre opinions et faits? Qu’en est-il de la crédibilité des blogueurs? Et de l’absence de contrôle éditorial?

Ces inquiétudes ne sont pas nouvelles. On les retrouve par exemple, en plus détaillées, dans le livre Science! On blogue publié cet automne par l’Agence Science-Presse. Ce qui est plus récent, c’est d’entendre des artisans des médias vanter les avantages du blogue —davantage de transparence dans la collecte et la diffusion de l’information— et les opportunités que cela ouvre à tout le monde.

Par exemple, a-t-on pu entendre lors de l’atelier « Science journalism », un individu qui veut en savoir plus sur la sonde américaine Messenger, arrivée la semaine dernière en orbite de Mercure, peut aller sur le site de la NASA, puis chez ses blogueurs préférés. Résultat : un grand nombre de lecteurs et de téléspectateurs arrivent devant leur « média traditionnel » beaucoup mieux préparés qu’avant. Journaux et magazines ont intérêt à s’ajuster...

Ceci dit, il ne faut pas attendre de miracles. L’importance qu’accordent les médias à la science est toute relative. En après-midi, Jennifer Jacquet, biologiste et blogueuse à l’Université de Colombie-Britannique, a jeté une douche d’eau froide —et lancé dans la salle une séance de défoulement contre les médias— en racontant comment une conférence de presse d’Al Gore sur la plus importante fonte de la calotte glaciaire depuis des décennies, avait été évincée de l’actualité le 1er octobre par Britney Spears.

Selon elle, sur 20 ans, le pourcentage du public portant une « très grande attention » à l’information scientifique aurait reculé de moitié.

Face à tout cela, il serait simpliste de résumer le futur par « les blogues sauveront-ils le journalisme scientifique », a relancé la Californienne Jennifer Ouellette —elle-même journaliste scientifique— en faisant la synthèse de cette journée.

« Le journalisme scientifique n’a pas besoin d’être sauvé. Mais il a certainement besoin d’être amélioré. »

- Article rédigé par Pascal Lapointe et Josée Nadia Drouin, 19 janvier 2008.

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