Jusquà récemment,
cette proposition semblait logique. Mais pour la
première fois, elle vient dêtre
sérieusement mise en doute.
Deux études se sont à
ce sujet mérité la Une de la revue
britannique Nature. On y lit, en gros, que
ceux qui affirment que davantage de forêts
permettront dabsorber davantage de gaz polluants,
se mettent le doigt dans loeil. Ou du moins,
se montrent "exagérément optimistes".
Les études ne plairont pas
aux autorités de plusieurs pays, dont les
Etats-Unis. Jusquici, ces proposition "forêts
vs. usines" semblaient à ce point logiques
que les négociateurs internationaux sen
servaient comme dun compromis pour essayer
dobliger les pays riches à signer des
ententes internationales sur la réduction
de gaz polluants comme le fameux Protocole
de Kyoto.
Or, ce quon lit dans la dernière
édition de la revue Nature, cest
que dans le cas des forêts de conifères
dAmérique du Nord, les arbres plantés
dans des régions où la proportion
de CO2 dans lair était de 0,06% (contre
lactuelle norme de 0,04%) ont grandi plus
vite... mais pendant seulement trois ans. Après
quoi, ils sont revenus à leur état
original.
Ce que cela signifie ? Que léquation
"plus darbres égale plus de CO2
absorbé, donc moins de gaz polluants dans
lair" nest pas aussi simple quon
le pensait. De toute évidence, il y a une
partie importante de cette équation qui nous
échappe encore, sans quoi ces arbres, après
trois ans, auraient continué de profiter
de lapport supplémentaire en CO2 que
les humains leur offraient si gracieusement, résume
Ram Oren, de lUniversité Duke de Caroline
du Nord, directeur dune
des deux études.
Ces résultats, résume
pour le service dinformation de la revue Nature
Adam Hirsch, du Centre de recherche en foresterie
de Woods Hole, Massachusetts, nous démontrent
que "nous ne pouvons pas attendre des forêts
quelles nous autorisent à émettre
du dioxyde de carbone sans y penser à deux
fois". Chaque nouvelle étude nous révèle
combien nous savons encore peu de choses des milliards
dinteractions entre les plantes et leur environnement.
Peut-être que de préserver
les forêts déjà existantes serait
bien plus profitable pour léquilibre
naturel que de planter des forêts supplémentaires,
ajoute-t-il.
Ainsi, on sait par exemple quenviron
la moitié du carbone avalé par les
arbres s'en va dans leurs feuilles. Les climatologues
se demandent depuis des années combien de
temps ce carbone reste-t-il là, et au bout
de combien de temps se retrouve-t-il dans le sol.
La deuxième
étude, dirigée par deux chercheurs
du Collège Bowden de Brunswick, Maine, réserve
elle aussi une surprise: seule une très faible
quantité de ce gaz se retrouve finalement
dans le sol. Au contraire, le feuillage se brise
si vite que, en moins de trois ans, le carbone absorbé
par larbre se retrouve dans lair, et
non dans le sol. En dautres termes, la situation
ne sest guère améliorée...
"Les limites de la capacité
des forêts de conifères à agir
comme puits à carbone demeure à vérifier",
renchérit Jim Ehleringer, biologiste à
lUniversité de lUtah. De toute
évidence, lhypothèse des puits
à carbone sur laquelle ont misé beaucoup
de politiciens va dès maintenant être
étudiée de beaucoup plus près...