
Le 22 mars 2004

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David contre Goliath
Goliath conserve le gros bout du bâton
(Agence Science-Presse) - Ceux qui espéraient
que l'entente internationale intervenue l'été
dernier permettrait enfin aux pays pauvres d'avoir accès
aux médicaments à bas prix, devront prendre
leur mal en patience: même au Canada, premier pays
à avoir déposé un projet de loi, ce
projet de loi fait grincer des dents.
Médecins sans frontières
critique notamment la liste des médicaments qui seraient
rendus accessibles aux pays pauvres: "pourquoi s'enfermer
avec une liste alors que l'accord de l'OMC ne demande pas
qu'il y en ait une?" Le Congrès du travail du Canada
(CTC), par la voix de sa division Afrique, parlait, dans
les pages du Devoir, de "nivellement par le bas:
nous donnons le mauvais exemple à tous les pays qui
devront adopter des lois similaires".
En gros, le problème est, encore et
toujours, celui des médicaments contre le sida, la
tuberculose, la malaria ou d'autres, dont les coûts
les rendent inaccessibles aux malades des pays pauvres et
parfois même, inaccessibles à leurs propres
hôpitaux. Les compagnies pharmaceutiques ont résisté
pendant des années à la distribution de médicaments
génériques (des copies des médicaments,
donc moins chers), invoquant leur propriété
intellectuelle, laquelle est clairement protégée
par les accords sur le commerce international.
Devant pareille attitude, qualifiée
d'odieuse la vie contre le droit d'auteur la
pression de l'opinion publique a commencé à
peser lourd en 2000-2001 (voir
ce texte). Lorsqu'elle est devenue intenable, les compagnies
pharmaceutiques ont commencé à céder
du terrain, mais il a encore fallu des années de
débats au sein de l'Organisation mondiale du commerce
pour en arriver à un accord, le 30 août 2003
(texte).
Le 6 novembre (texte),
le Canada devenait le premier pays à déposer
un projet de loi autorisant l'exportation vers les pays
pauvres de médicaments génériques.
Salué avec enthousiasme par les organisations internationales,
le projet est mort quelques jours plus tard en raison de
l'ajournement de la session parlementaire. Il a été
à nouveau déposé en janvier... et risque
de mourir à nouveau, si des élections sont
déclenchées.
Déjà que l'accord de l'OMC du
30 août dernier était critiqué par les
organisations non-gouvernermentales, qui le jugeaient insuffisants,
voilà que le projet de loi canadien ne réjouit
pas lui non plus. Une coalition formée notamment
de Médecins sans frontières, du CTC, du mouvement
Alternatives et d'associations d'étudiants en médecine,
demande au gouvernement de l'améliorer. Ces opposants
en ont notamment contre le droit de refus, qui permet aux
compagnies pharmaceutiques de demander à produire
elles-mêmes un médicament générique.
A long terme, la seule consolation de ces
opposants est que cet accord de l'OMC constituait, après
toutes ces années, la toute première main
tendue vers les malades d'Afrique. Donc, un premier pas
dans la bonne direction. Mais à court terme, les
gains les plus tangibles continuent de venir de ceux qui
tordent le bras aux géants pharmaceutiques, comme
devant les tribunaux thaïlandais en 2002 (voir
ce texte) ou sud-africains en 2001 (voir
ce texte).
Pascal Lapointe
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