Les grands singes font face à une grave crise. Déjà menacés par la perte de leur habitat et le braconnage, ils sont maintenant en danger à cause de l’inquiétante augmentation de plantations de palmiers. La pression de plus en plus grande pour remplacer les produits dérivés du pétrole par des biocombustibles entraîne la destruction de leurs forêts en Asie.

Les temps sont très difficiles pour les grands singes. De plus en plus de forêts d’Indonésie et de Malaisie sont coupées pour faire place à des plantations d’huile de palmier. Et les singes audacieux qui s’aventurent pour goûter aux jeunes pousses de palmier connaissent un bien triste sort. Des milliers d’orangs-outans ont déjà pris le chemin du commerce international. Plusieurs meurent, punis par les gardiens des palmeraies. Si rien n’est fait, les Nations Unies prévoient que les 50.000 à 60.000 orangs-outans qui vivent dans la nature disparaîtront au cours des dix prochaines années. Le Great Apes Survival Project (GRASP), une initiative des Nations Unies, affirme que les grands singes risquent de disparaître complètement à moins qu’une action drastique ne soit entreprise.

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La Malaisie et l’Indonésie produisent ensemble 83% de l’huile de palme utilisée mondialement. Obtenue en écrasant les fruits frais, cette huile d’une couleur rouge-brun est utilisée dans les biscuits, la pâte à dent, la crème glacée, les pains, les savons et les shampoings. Elle est la deuxième huile la plus populaire après l’huile de soya. La demande mondiale d’huile de palme a augmenté considérablement au cours des dernières années pour produire du biocombustible, une alternative écologique aux combustibles pétroliers. Le prix de l’huile de palme a ainsi augmenté de 40% en 2006 et de 15% depuis le début de l’année 2007. Pas étonnant que plusieurs pays sautent sur l’occasion pour faire des profits.

Des 6,5 millions d’hectares de plantations de palmiers cultivés en Malaisie et en Indonésie, presque quatre millions étaient encore des forêts vierges en 2004. Pour les grands singes, la situation est désespérée. Selon Dr Richard Leakey, paléo-antropologue, la pression grandissante pour les biocombustibles tels l’huile de palme entraîne la disparition des habitats des grands singes. «C’est paradoxal. La perte de forêts pour produire un biocombustible moins polluant entraîne une augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère,» indique Dr Leakey.

Conscient qu’il est impossible d’arrêter le développement, le Dr Leaky suggère la mise sur pied de crédits de biodiversité. Les pays pourraient recevoir des crédits pour conserver leurs forêts indigènes. «Il semble que nous ne puissions arrêter le développement mais nous pouvons arrêter la déforestation là où des espèces animales sont menacées», affirme M. Leaky. «Mais évidemment, il y a un prix à payer pour cette décision.»

La table ronde pour l’huile de palme durable (Round table on Sustainable Palm Oil, RSPO) regroupe plusieurs compagnies d’huile de palme de la Malaisie et de l’Indonésie de même que plus de 150 membres incluant plusieurs grandes compagnies telles Cadbury-Shweppes, Unilever et Body Shop qui désirent n’utiliser que de l’huile de palme provenant de palmeraies où la faune et la flore sont respectées. «C’est un premier pas pour développer la conscience de la population des effets de certaines plantations sur les animaux et les habitants», explique Fitrian Ardiansyah, membre du RSPO. «Mais je crains que le marché ne se déplace vers la Chine, l’Inde ou l’Afrique et ne menace la vie d’autres animaux.» Mais la pression des groupes de protection des animaux et de l’environnement semble importante également en Afrique. Le gouvernement de l’Ouganda a récemment annulé un projet de convertir des milliers d’acres de forêt tropicale en plantations d’huile de palme suite à une forte opposition dans son pays.

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