C'est
la nouvelle hypothèse
proposée par
des biologistes, et
cette fois-ci, ils n'y
sont pas arrivés
en étudiant les
crânes de nos
ancêtres hominidés,
mais en saisissant une
protéine: une
protéine-clef
pour les muscles de
la mastication chez
les primates.
Une mutation
dans un gène
survenue il y a 2,4
millions d'années
nous a
urait
rendus incapables de
produire cette protéine.
Avec pour résultat
que certains des muscles
de la mâchoire
auraient cessé
de se développer,
et se seraient donc
atrophiés au
fil des âges.
De larges crêtes
osseuses présentes
sur les crânes
des primates, et auxquelles
"s'accrochent" ces puissants
muscles de la mâchoire,
seraient ainsi à
leur tour devenues inutiles,
et auraient donc elles
aussi cessé de
se développer.
Ce qui, du coup, aurait
laissé à
notre cerveau l'espace
nécessaire pour
grossir, et grossir,
et grossir... Il est
aujourd'hui trois fois
plus gros.
Hypothèse
tirée... par
les cheveux? Pas pour
les chercheurs de l'Université
de Pennsylvanie à
Pittsburgh qui, sous
la direction de Hansell
Stedman, publient leurs
résultats dans
la revue Nature
et à qui
la dite revue a fait
l'honneur de sa page
couverture et
pas pour certains de
leurs collègues
qui se sont empressés
de commenter.
Une
découverte "étonnante",
déclare par exemple
dans le New Scientist
Peter Currie, expert
australien en développement
des muscles et du squelette.
"On sait que les changements
dans l'anatomie des
muscles altèrent
les os auxquels ils
s'attachent. Mais le
côté excitant,
ici, c'est que cette
mutation génétique
est survenue exactement
au moment où
se produit cette transition
chez nos fossiles."
De fait,
ça pourrait expliquer
le moment où
cette transition est
survenue chez nos ancêtres
primates. "C'est une
explication plausible",
juge Paul Pettitt, spécialiste
de l'évolution
humaine à l'Université
de Sheffield (Angleterre).
Mais Nature
a beau lui avoir accordé
sa Une, ça demeure
une théorie,
et non une preuve. Chez
les autres primates,
nul n'a jamais démontré
que les crêtes
du crâne avaient
bloqué le développement
du cerveau, s'indigne
Daniel Lieberman, spécialiste
de l'évolution
humaine à l'Université
Harvard (Massachusetts):
le cerveau d'un jeune
chimpanzé, donne-t-il
en exemple, atteint
sa taille maximale à
l'âge de trois
ans, bien que les crêtes
du crâne, elles,
ne se développent
pas avant l'âge
de huit ans.
Et il
y a le cas de l'homme
de Néandertal,
renchérit dans
Science Callum
Ross, morphologiste
à l'Université
de Stony Brook (New
York): ses muscles étaient
forts et son cerveau
était... plus
gros que le nôtre.
La protéine-clef
de cette histoire s'appelle
MYH16: elle est un composant
essentiel des puissants
muscles de la mâchoire
chez les gorilles, les
chimpanzés et
les autres primates,
mais pas chez les humains.
Chez nous, ont analysé
les chercheurs de l'Université
de Pennsylvanie, c'est
un défaut génétique
commun qui empêche
la production de cette
protéine. C'est
alors qu'ils traquaient,
il y a 10 ans, un gène
responsable des maladies
musculaires que ces
chercheurs sont tombés
sur cette protéine...
et qu'ils ont dès
lors donné à
leur recherche une orientation
inattendue.