La vache avait en fait été identifiée
en novembre dernier: suspectée d'être malade,
elle avait ensuite été innocentée.
C'est un nouveau test, effectué avec une méthode
différente et réputée plus complète,
qui a permis de détecter la maladie.
Si cette mauvaise nouvelle se confirme, cela
en fera la deuxième vache ainsi identifiée
sur le territoire américain, mais la première
née aux Etats-Unis: l'autre, en décembre 2003,
dans l'État de Washington, était une vache
importée du Canada.
Les tests sont-ils fiables?
Il n'y a pas bien longtemps que l'on admet
que la maladie de la vache folle (encéphalopathie
spongiforme bovine) est causée par une mystérieuse
protéine appelée prion. Et parce qu'on ne
la connaît pas encore très bien, les tests
de dépistage ne sont pas efficaces à 100%.
L'un de ces tests est appelé ELISA. C'est
lui qui a été utilisé par le
gouvernement américain, après la découverte
du premier cas, en 2003, sur les bovins "à
risque": ceux qui montrent des comportements neurologiques
bizarres, qui sont retrouvés morts ou sont
incapables de se tenir debout. Quelque 375 000 animaux
ont été testés, et aucun cas
de vache folle n'a été détecté.
En comparaison, le Canada a testé 30 000 animaux
et a détecté trois cas de vache folle.
Mais il y a un hic: le Canada a employé un
autre test, appelé "western blot" (littéralement:
tache de l'Ouest). Et plusieurs experts affirment
que western blot est plus fiable qu'Elisa,
parce qu'il est plus complet (et plus coûteux).
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A
lire aussi
La
vache qui rend fou (12.01.2004)
Et
La
douce folie de la vache folle
(26.05.2003)
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Le défaut d'Elisa: il détecte
davantage de "faux positifs": c'est-à-dire des cas
qui semblent d'abord suspects, puis se révèlent
sans dangers. De fait, en 2004, Elisa avait détecté
trois cas parmi le bétail américain, dont
celui qui nous occupe ici, identifié le 18 novembre.
Lorsque les cerveaux de ces trois bovins avaient été
à nouveau analysés, Elisa s'était avéré,
cette fois, négatif. Le 23 novembre, ils avaient
même été soumis
à un troisième type de test, dit immuno-histochimique
(IHC): on injecte dans une mince couche du cerveau des anticorps
du prion. Là encore, résultats négatifs.
L'Inspecteur général du ministère
américain de l'Agriculture n'était sans doute
pas convaincu, puisqu'il a été révélé,
le 10 juin, qu'il avait ordonné une nouvelle batterie
de tests utilisant, cette fois, la méthode western
blot. Et c'est là qu'un des trois animaux a été
déclaré porteur de la maladie.
Risqué pour la santé ou non?
Les médias américains ont été
remarquablement discrets. La
dépêche de l'Associated Press se contente
de signaler ce cas possible et de souligner tout de suite
qu'il n'y a aucun risque pour la santé.
Il est exact que cette vache de 9 ans n'est
jamais entrée dans la chaîne alimentaire. Autrement
dit, personne n'en a pris la moindre bouchée. C'est
l'ingestion de la viande d'animal contaminé par l'encéphalopathie
spongiforme bovine qui peut, dans un petit nombre de cas,
provoquer chez l'humain la maladie de Creutzfeldt-Jakob.
Mais combien d'autres cas de vaches folles
reste-t-il à détecter aux États-Unis?
Ce n'est qu'en 1997 que ce peays a mis fin à l'alimentation
à base de viande chez les bovins. Cette vache suspecte
est donc née juste avant l'interdit. Statistiquement,
il doit y en avoir d'autres.
Par ailleurs, les premiers timides programmes
de dépistage (19 000 animaux) ne remontent qu'à
2002, et le gros programme dont il est question ici (375
000 animaux) n'a eu lieu qu'en 2004 (voir
la chronologie). Déjà, il y a 18 mois,
deux journalistes américains, Sheldon Rampton et
John Stauber, avaient déploré que moins d'un
bovin sur 1000 soit testé avant d'être envoyé
aux abattoirs, loin en-dessous des normes britanniques.
En Grande-Bretagne, l'épidémie
a touché, après 1986, quelque 200 000 bovins.
On peut se rassurer en se rappelant que, depuis le premier
décès, en 1994, "seulement" 120 personnes
en sont mortes.
Pourquoi échapper à un test et pas à
un autre?
Le prion est une protéine encore peu
connue. "Si elle n'est pas suffisamment présente
dans le cerveau, vous
pouvez obtenir un signal faible avec le test Elisa, et un
signal négatif avec l'IHC", explique au New
Scientist Marcus Doherr, de l'Université de Berne,
en Suisse, qui a contribué à développer
le système de surveillance dans son pays.
Conclusion optimiste: peut-être est-ce
le test western blot qui est dans l'erreur. Autrement
dit, peut-être que cette vache est tout à fait
saine. Un échantillon de son cerveau a été
expédié au laboratoire britannique de Weybridge,
qui constitue la référence internationale
en la matière.
Conclusion pessimiste: peut-être faudra-t-il
au contraire reprendre les 350 000 animaux déjà
testés, ou une partie d'entre eux, et les faire passer
par le test western blot.
Pascal Lapointe