Semaine du 28 février 2000

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P
endant que les débats se poursuivent sur le droit d'utiliser ou non des cellules d'embryons pour faire progresser la recherche médicale, les retombées possibles de ces cellules se multiplient à un rythme tel que ces débats apparaissent soudain complètement déphasés.

 

La revue Science ne s'y trompe pas, elle qui intitule un de ces articles de cette semaine : " The Business of Stem Cells ". La recherche sur les cellules-souches (stem cells) est bel et bien devenue, désormais, une question " d'affaires " bien plus que de science. Et la chose est d'autant plus étonnante que ces cellules-souches, hormis une poignée d'experts, personne n'en avait entendu parler avant novembre 1998. Depuis, elles se sont transformées en l'un des domaines les plus importants de la recherche -et on ne compte plus les compagnies qui ont sauté dans le train dans l'espoir de trouver une application commerciale.

Ce que le biologiste James Thomson avait annoncé en novembre 1998 était, nul ne le nie, révolutionnaire : il avait réussi à faire croître en laboratoire des cellules embryonnaires humaines -appelées aussi cellules-souches. Des cellules qui, parce qu'elles ne se sont pas encore spécialisées, pourraient en théorie être ordonnées de se transformer en n'importe quoi : un poumon, un rein, un morceau de peau... Bref, le rêve ultime des spécialistes des greffes et des transplantations, un marché qui se calcule en... milliards de dollars par an.

Certes, ces cellules étaient des cellules d'embryons humains, ce qui posait tout de même de menus problèmes éthiques. Mais il en fallait plus pour arrêter les entrepreneurs, parmi lesquels la firme Geron Corp., de Menlo Park, Californie, qui allait rapidement prendre la tête du peloton. " Nous avons certainement investi un paquet ", déclare à Science son président, Thomas Okarma. C'est également Geron qui a signé l'an dernier un partenariat avec l'Institut Roslin, en Ecosse, là où est née la brebis Dolly.

Décidées à ne pas se laisser distancer, d'autres firmes ont investi un paquet ailleurs : c'est ainsi qu'on s'est aperçu, depuis 15 mois, que des cellules-souches, on pouvait aussi en trouver dans la moëlle osseuse. C'est ainsi qu'une expression bizarre est apparue en cours de route : " cellules-souches adultes ". Elles semblent aussi polyvalentes que les autres -et, avantage non-négligeable, elles ne posent pas de problèmes éthiques.

Quinze mois plus tard, certains produits testés par ces compagnies en sont déjà au stade des essais cliniques, ce qui en dit long sur la " ruée vers l'or " qui est en train de se produire ­quinze mois, c'est très court, en science. Et ce, sans que le grand public en ait le moindrement entendu parler -sauf ceux qui lisent régulièrement cette page, bien sûr. Le secret le plus absolu domine ces expériences, mais on parle de traitements contre la maladie de Parkinson (en greffant des tissus cervicaux) ou l'arthrite.

Et c'est là que le bât blesse, parce que si ces cellules-souches constituent vraiment la révolution dont on parle, alors seule une poignée de gens aura le contrôle sur cette révolution. Geron, par exemple, détient l'exclusivité sur le traitement découlant des recherches de James Thomson, et dénonce l'Université du Wisconsin, où travaille Thomson, parce qu'elle distribue à tout chercheur qui en fait la demande les cellules descendantes de la lignée créée par Thomson. Ou Osiris Therapeutics, de Baltimore (Maryland), qui a identifié un type de " cellule-souche adulte "... et a déposé un brevet.

Tant qu'à breveter ces cellules, pourquoi ne pas carrément breveter le clonage? Il y a un mois, nous signalions que l'Institut Roslin avait obtenu du gouvernement britannique un brevet lui conférant les droits exclusifs sur la technologie de clonage mise au point chez lui. Une décision qui pourrait faire des petits : la semaine dernière, c'était au tour du Bureau européen des brevets d'être sur la sellette pour avoir accordé un brevet sur le clonage. Et cette fois, pas sur la technologie, mais sur les produits issus du clonage : autrement dit, les clones d'animaux, comme Dolly... et les clones humains.

La décision avait été rendue en décembre, mais ce n'est que la semaine dernière que Greenpeace en a pris connaissance, réagissant de la manière qu'on peut imaginer. Le Bureau des brevets s'est immédiatement rétracté, expliquant qu'il n'avait jamais été dans son intention de breveter des clones humains, et qu'il fallait y voir une erreur de formulation.

Mais ce ne sont évidemment pas les compagnies engagées dans des expériences sur le clonage qui auraient signalé cette erreur au Bureau des brevets...

Des cellules-souches aux OGM

Somme toute, ces dilemmes ne sont pas si différents de ceux qui frappent les aliments transgéniques, où les compagnies engagées dans la recherche ont elles aussi des intérêts commerciaux. A ce sujet, le lobbying annoncé en novembre se poursuit : la BBC vient d'apprendre qu'un consortium de firmes britanniques de biotechnologie a fait un don de près de 500 000 livres à un groupe de scientifiques "pour contribuer à un débat plus équilibré autour des plantes modifiées génétiquement". Les commanditaires ont par contre signé un accord par lequel ils s'engagent à n'user d'aucun droit de veto sur aucune des prises de position de ces scientifiques, dont aucun ne travaille pour l'une ou l'autre de ces compagnies.

L'avenir dira de quelle côté la balance penchera...

 

 

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