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Faudra-t-il réviser des épisodes de la télésérie CSI? Voilà qu’on apprend qu’un cheveu ne serait pas une preuve aussi incriminante qu’on l’a fait croire depuis deux décennies. Mais il se trouve que beaucoup de gens ne sont pas surpris du tout.

«La conclusion n’est pas une surprise pour les scientifiques» écrit Eric Lander, professeur au MIT et directeur du comité-conseil de la Maison-Blanche sur la science, dans l’édition du 21 avril du New York Times .

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Il fait référence à l’annonce-choc faite dimanche par le Washington Post, citant des sources au sein du FBI: sur les dossiers de 268 procès des années 1980 et 1990 révisés par une équipe d’enquêteurs, pas moins de 257 comportaient des «preuves» dont la valeur avait été «surestimée».

On parle ici essentiellement de l’analyse microscopique de l’apparence d’un cheveu, méthode qui était déjà contestée dans les années 1970, et non de l’analyse de l’ADN d’une goutte de sang ou de salive, qui est venue plus tard.

Eric Lander voit dans ce rapport le point final d’une «collision entre droit et science» commencée en 1989 dans un tribunal new-yorkais où avait lieu un procès pour meurtre. D’un commun accord, autant la poursuite que la défense avaient accepté de laisser tomber l’analyse des échantillons de cheveux, la jugeant peu fiable.

Ébranlés, le FBI et l’Académie nationale des sciences avaient alors établi des normes par lesquelles des échantillons de cheveux ou d’ADN devaient être recueillis. Et c’est en vertu de ces normes que les policiers fonctionnent aujourd’hui encore, raconte Eric Lander. Mais le problème avec le cheveu demeure entier: si l’analyse microscopique des cheveux a souvent permis de confirmer que deux cheveux n’appartiennent pas à la même personne, ça n’a jamais été considéré par les scientifiques comme une méthode crédible pour démontrer qu’un cheveu provient de telle ou telle personne.

«Pas surprenant du tout», renchérit dans le New Scientist Peter De Forest, consultant en médecine légale à New York, en référence aux dernières nouvelles. En fait, même l’analyse génétique d’un cheveu laisse à désirer, poursuit le New Scientist, tant qu’on ne possède pas la racine du cheveu. C’est pourquoi les chercheurs insistent pour s’en tenir à des échantillons de sang ou de salive.

Il a pourtant fallu y mettre du temps. Eric Lander rappelle qu’après le procès de 1989, deux des avocats, Barry Scheck et Peter Neufeld ont lancé le Projet Innocence, qui visait à utiliser l’analyse de l’ADN pour réévaluer la justesse de condamnations basées sur une analyse de cheveux, de tissus de vêtements, de morsures ou de traces de souliers, par exemple. Depuis, plus de 300 condamnés ont été libérés grâce à ce travail —dont 20 attendaient dans le corridor des condamnés à mort.

En 2009, un rapport du Conseil national de recherche des États-Unis concluait qu’à l’exception de l’analyse de l’ADN, aucune méthode en médecine légale n’était capable de démontrer de manière crédible un lien entre un élément de preuve et une personne. C’est dans ce contexte qu’en 2012, le FBI, en collaboration avec le Projet Innocence, s’était lancé dans une vaste révision de près de 2600 dossiers allant de 1985 à 1999, et ce sont les premiers résultats de ce vaste travail qui ont commencé à émerger cette semaine.

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