image0036.jpg
Non je ne veux pas parler de la grève étudiante et de ceux qui contestent la légitimé de la Loi 78. Il ne s’agit pas d’une branche de la formation qui a fait les beaux jours de la politique française. Je ne veux pas mentionner non plus ces entités réactives identifiées comme les responsables d’une myriade de problèmes de santé.

Dans mon cas, il s’agit d’un nouveau livre, «Free Radicals» en anglais, de Michael Brooks, un chroniqueur scientifique au New Statesman, un des hebdomadaires les plus respectés de Grande-Bretagne. Dans ce livre, les «radicaux» sont les scientifiques qui, convaincus de la validité de leurs idées, sont prêts à tout pour les faire accepter. Michael Brooks décrit un monde où la jalousie, la fraude, le dénigrement et les coups bas sont la norme.

Abonnez-vous à notre infolettre!

Pour ne rien rater de l'actualité scientifique et tout savoir sur nos efforts pour lutter contre les fausses nouvelles et la désinformation!

Le cas de l’astrophysicien d’origine indienne Subrahmanyan Chandrasekar est un bon exemple. Ce dernier a été le premier à postuler qu’un type d’étoiles, les naines blanches, ne peut excéder une certaine taille et qu’éventuellement, elles doivent se transformer en de nouvelles entités. C’est une idée révolutionnaire qui lui était venue alors qu’il n’était qu’un étudiant aux études supérieures à Cambridge, mais qui allait à l’encontre de celles du plus grand astrophysicien anglais de l’époque, Arthur Eddington. Bien que Chandrasekar ait soumis ses résultats à l’avance à Eddington, celui-ci le couvrit de ridicule alors qu’il présenta sa théorie lors d’une conférence de la Royal Astronomy Society. Devant les scientifiques rassemblés, Eddington présenta la théorie comme de la «bouffonnerie stellaire». N’en restant pas là, il en rajouta en déclarant «… qu’il doit y avoir une loi de la nature pour empêcher une étoile de se comporter de manière aussi absurde». Cet épisode a beaucoup affecté Chandrasekar et a joué un rôle dans sa décision d’émigrer aux États-Unis pour continuer ses travaux. Mais il persista dans ses idées et ses travaux qui lui valurent le prix Nobel de physique en 1983.

Un autre «radical libre» dont il est question dans le livre est l’Australien Barry Marshall. Dans les années 1980, celui-ci avait émis l’hypothèse que les ulcères gastriques étaient causés par une bactérie de type H. pylori, un concept ridiculisé par la communauté scientifique qui ne pouvait pas croire qu’une bactérie pouvait survivre dans le milieu acide de l’estomac. Pour les scientifiques, les ulcères étaient causés par le stress et des excès d’acidité, et les personnes en souffrant devaient s’attendre à faire face à des problèmes gastriques tout au long de leur vie. Pour convaincre ses détracteurs, Barry Marshall but une pleine solution d’H. Pylori. Trois jours plus tard, il sentit les premiers symptômes associés à l’apparition d’un ulcère. Aujourd’hui, on sait que la plupart des ulcères sont d’origines bactériennes, ce qui implique qu’ils peuvent être éliminés de façon définitive grâce aux antibiotiques. En 2005, Barry Marshall fut le lauréat du prix Nobel de médecine, mais sa plus grande récompense doit être toutes les personnes qui, aujourd’hui, sont libres d’ulcères grâce à sa persistance.

Parmi les personnages les plus fascinants décrits dans le live, il y a Kary Mullis*, prix Nobel de physique en 1993 pour ses travaux sur la réaction en chaine par polymérase (PCR en abrégé, pour polymerase chain reaction en anglais). Cette technique permet à une petite section d’ADN d’être copiée à l’infini. PCR est essentiel, entre autres, dans la détermination des empreintes génétiques en science policière. Avide consommateur de substances illégales, Kary Mullis a déclaré qu’il doit cette découverte à son utilisation du LSD. Peut-être était-il aussi sous l’influence du LSD lorsqu’il raconta qu’il avait été visité par des extra-terrestres ayant pris la forme de ratons-laveurs. Kary Mullis nie que le réchauffement planétaire soit causé par l’activité humaine et que le VIH soit responsable du SIDA. Par contre, il croit en l’astrologie.

Le livre de Michael Brooks souligne qu’avec ses nombreux «radicaux libres», la science n’est pas aussi ordonnée et prévisible que certains se l’imaginent. J’espère qu’il sera bientôt traduit en français. ___

* Kary Mullis partagea le prix avec le Canadien Michael Smith qui, pour sa part, obtint le prix pour ses travaux sur les oligonucléotides, de courts segments d’ARN ou d’ADN.

Je donne