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Une étude d’une équipe de l’Université Laval, sous la direction de Simon Larose, levait le voile le 2 février dernier sur les ratés de la réforme scolaire au primaire et au secondaire. Échecs, décrochage et abandon sont trop souvent l’aboutissement des études; c’est le destin qui attend 30% des élèves. Il existe pourtant une solution simple pour relancer l’intérêt des jeunes pour l’école, particulièrement chez les garçons : l’enseignement des sciences. Avec des matériaux simples et de la créativité, on peut initier les enfants dès leur plus jeune âge à la chimie, à la physique, à la géologie…

Bien expliquée, la science est la plus vivante des matières et peut être une solution au décrochage des garçons, surtout dans les quartiers défavorisés. C’est ce que soutient depuis longtemps Marcel Thouin, professeur en didactique des sciences de l’Université de Montréal, ainsi qu’il me l’expliquait dans un entretien paru dans L’actualité en 2009. « Les jeunes se montrent vite passionnés par ce qu’ils découvrent. Construire la plus haute tour possible avec des cure-dents et de la pâte à modeler permet de faire avec enthousiasme son initiation à la physique et au génie civil. »

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La nature, poursuit ce physicien de formation, est le plus formidable des laboratoires. Surtout pour les gars qu’on mettra au défi de fabriquer planeurs et catapultes avec quelques bouts de bois et des élastiques. Il a vu des garçons considérés comme de futurs décrocheurs se passionner pour les sciences après avoir participé à ce type d’expérience.

Le « renouveau pédagogique », lancé en 2005 pour diminuer le décrochage scolaire, n’a donc pas atteint son premier objectif. On sait moins qu’il a provoqué des dommages collatéraux pour la culture scientifique des jeunes. C’est un fait documenté par le Programme pancanadien d’évaluation des compétences des élèves de la 2e secondaire. Selon ce classement, le Québec est passé du 2e rang des dix provinces canadiennes en 2007 au 9e en 2010 en sciences. Une nouvelle édition du concours, en 2013, montre une légère amélioration dans la performance des Québécois. Mais ceux-ci demeurent derrière les jeunes de sept des autres provinces; seuls le Nouveau-Brunswick et le Manitoba affichent un pire bilan.

Les milieux concernés sont sensibles à cette réalité. En 2013, le Conseil supérieur de l’éducation a sollicité un avis à un comité d’experts sur les façons d’y remédier. Marcel Thouin était du nombre. « L’une de nos recommandations était d’imposer un test de science uniforme au Québec, comme il en existe pour le français et les mathématiques. Cela aurait forcé les enseignants à un enseignement plus uniforme. Le ministère n’a pas retenu l’idée. »

Il n’y a pas que des mauvaises nouvelles en ce qui concerne l’enseignement des sciences, souligne le professeur Thouin. La formation scientifique des enseignants, jadis défaillante, a connu une amélioration notable. « Les jeunes enseignants qui arrivent sur le marché du travail ont de meilleures notions de didactique des sciences. De plus, cette génération est beaucoup plus à l’aise avec les concepts du renouveau pédagogique que les enseignants qui ont connu la transition et qui, souvent, les ont appliqués sans conviction. »

Cela dit, les milliers d’enseignants des écoles du Québec ne sont pas tenus à une formation professionnelle continue où on aurait pu les outiller pour mieux aborder en classe les thèmes scientifiques. Le Conseil supérieur de l’éducation recommandait d’ailleurs de « mettre sur pied un centre national de soutien à l’enseignement de la science et de la technologie ». Non seulement le ministère n’a pas davantage retenu cette idée; il continue de forcer les écoles à comprimer le temps consacré à l’enseignement de la science et de la technologie.

Résultat, une nouvelle tendance apparaît : la « privatisation » de l’enseignement des sciences. Elle consiste à inviter occasionnellement à l’école des animateurs qui offrent, une heure durant, des spectacles scientifiques avec nuées d’azote, irruption de mousse colorée et explosions contrôlées. Si les passionnés qui montent sur scène avec sarrau et lunettes de protection sont d’extraordinaires communicateurs, ils peuvent avoir pour effet de priver des enfants de leur meilleur outil d’apprentissage : leurs mains!

- Mathieu-Robert Sauvé

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