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Créer un organisme vivant qui n’existe pas dans la nature. Voilà l’objectif de la biologie synthétique.

 

Cet objectif ne date pas d’hier. Déjà en 1912 Stéphane Leduc, un biologiste français, écrit : « Quand on est arrivé à connaître le mécanisme physique de la production d'un objet ou d'un phénomène, il devient possible de reproduire l'objet ou le phénomène, la science est devenue synthétique. La biologie est une science comme les autres, elle doit être successivement descriptive, analytique et synthétique. » Le titre de son ouvrage : La biologie synthétique.

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Mais l’acte de naissance officiel de cette branche de la biologie n'a eu lieu qu'en 2004 avec le congrès Synthetic Biology 1.0 au Massachusetts Institut of Technology.

 

Pourquoi avoir attendu si longtemps?

 

D’une part, les techniques de séquençage et d’assemblage d’ADN sont de plus en plus puissantes, d’autre part, leur coût a beaucoup diminué. Bref, on peut désormais fabriquer des gènes en laboratoire plutôt que de les « copier-coller » entre organismes.

 

Par ailleurs, les chercheurs en biologie synthétique utilisent les mathématiques et les simulations par ordinateurs pour prédire et modéliser la dynamique des systèmes biologiques avant de les reconstruire. Trois méthodes sont possibles :

 

1) prébiotique, soit d’utiliser des morceaux d’ADN (briques élémentaires) afin de créer un chromosome artificiel;

2) parabiotique, soit de modifier les conditions du milieu, afin de contrôler l’évoluer d’un organisme.

3) post-biotique, soit de diminuer le génome d’un organisme unicellulaire.

 

La biologie synthétique vise notamment à créer un organisme dont le génome serait minimal, le nombre de gènes serait d’environ 400. Ainsi, pas de fonctions superflues qui draineraient l’énergie!

 

En 2007, des chercheurs de l’Institut J. Craig Venter ont introduit le génome complet d’une bactérie (M. mycoides) dans une autre (M. capricolum). La greffe de génome a fonctionné dans une cellule sur 150 000, ce qui a été suffisant pour engendrer des colonies saines. Pour les repérer, les chercheurs avaient au préalable ajouté à l’ADN de M. mycoides un gène de résistance à un antibiotique et un gène qui donne aux bactéries une couleur bleue.

 

En 2008, les mêmes chercheurs ont fabriqué une copie conforme du génome de M. genitalium, la bactérie ayant le plus petit génome connu (485 gènes).

 

Prochaine étape : intégrer le génome synthétique dans une bactérie et vérifier si celle-ci est viable.

 

Par la suite, on intégrerait à cet organisme « minimal » des gènes d’intérêt pour diverses applications :

 

Production d’énergie (hydrogène ou éthanol) par la conversion efficace de déchets;

Dégradation de substances dangereuses par de nouvelles voies métaboliques;

Détection de produits chimiques. Par exemple, des bactéries deviennent fluorescentes en présence d’une molécule dangereuse.

 

Mais tout organisme vivant démontre une certaine capacité d'adaptation. Comment les organismes synthétiques vont-ils s’adapter à leur environnement? Afin d’empêcher les bactéries « artificielles » d’échanger leurs gènes avec les bactéries « naturelles », les promoteurs de la biologie de synthèse proposent trois types de confinement :

 

nutritionnel : créer un organisme nécessitant des substances rares ou inconnues dans la nature pour survivre (vitamines artificielles, catalyseurs n'intervenant pas ou peu dans le vivant comme la silice);

 

évolutif : créer un organisme mal adapté à la survie autonome dans la nature. Par exemple, une bactérie peu compétitive comparée aux formes « naturelles ». Elle ne survivrait que cultivée en condition optimale, entretenue par l'homme;

 

sémantique : créer un organisme ne pouvant pas échanger de gènes avec les autres organismes;

ou créer un nouveau code génétique avec des gènes ou des bases synthétiques ne pouvant pas se mélanger avec l’ADN des autres organismes.

 

Dans les conditions scientifiques et techniques actuelles, aucun de ces trois « verrous » n'offre à lui seul de protection absolue. On ne peut pas exclure la possibilité d'adaptations inattendues provoquées par des mutations spontanées. La combinaison de ces confinements devrait, en théorie, renforcer la sécurité envers des phénomènes d'adaptation biologique.

 

Toutefois, « Nous sommes encore loin de comprendre la relation entre une séquence particulière d’ADN, les protéines qu’elle engendre et les propriétés que cela apporte à un organisme. » C’est du moins l’avis de Jason Chin, chercheur en biologie synthétique à l’Université de Cambridge…

 

Pour en savoir plus :

 

Agence Science-Presse (12 juillet 2007) Je vous transplante un nouveau génome?

 

Agence Science-Presse (29 janvier 2008) Le propriétaire de la vie (1ere partie)

 

New Scientist (Peter Aldous, 28 juin 2007) Tycoon succeds in 'genome transplant'

 

Times (Jonathan Leake, 27 janvier 2008) The synthetic genome

 

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