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Ce ne sont pas les mauvaises nouvelles de cette année sur le front climatique qui semblent empêcher les géants pétroliers de revenir sur leurs promesses de réduire leurs émissions. Coup sur coup, trois des plus gros ont fait des annonces allant dans l’autre direction.

En février —alors que tout l’Est des États-Unis battait des records de chaleur pour un mois de février— la compagnie BP annonçait que, plutôt que de réduire ses émissions de 35% d’ici 2030 comme promis, elle viserait une réduction de 20 à 30%. En mars, ExxonMobil annonçait qu’elle cessait de financer un projet de recherche —sur lequel elle avait investi beaucoup, en marketing— visant à créer un biocarburant à plus faible teneur en carbone, à partir d’algues. Enfin, Shell a annoncé qu’elle n’accroîtrait pas cette année ses investissements dans les énergies renouvelables, revenant ainsi sur ses promesses de 2021 de réduire de 20% sa production pétrolière d’ici 2030.

Ces annonces surviennent dans un contexte où, guerre en Ukraine aidant, les profits des compagnies pétrolières ont atteint des niveaux jamais vus en 2022. Les six plus grosses compagnies ont totalisé des ventes de plus de 1000 milliards, et des profits de plus de 153 milliards$ US. Phénomène rare, même la Maison-Blanche s’en est indignée, critiquant les pétrolières pour avoir maintenu pendant une bonne partie de 2022 les prix à un niveau aussi élevé, pour avoir si peu investi dans les énergies renouvelables, et pour avoir profité à ce point de la guerre en Ukraine

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Le journal The Guardian note que d’un côté, BP a annoncé en juin avoir accru ses forages gaziers, et que d’un autre côté, le président d’Exxon a déclaré lors d’une récente conférence de l’industrie que sa compagnie prévoyait doubler d’ici cinq ans la production de pétrole aux États-Unis.

Et ce n’est pas qu’aux États-Unis: le 6 juillet, le président de la compagnie française TotalEnergies, Patrick Pouyanne, déclarait que le gros des investissements de sa compagnie continuerait d’être, pour un long moment, dans le pétrole et le gaz.

Il est certain que les accusations d’écoblanchiment ou « greenwashing » à propos des compagnies pétrolières ou gazières sont chose courante. Mais celles-ci visent plus souvent des promesses vagues —comme celle de produire des carburants plus propres— ou bien la prétention de combattre les inégalités. Alors que les annonces des derniers mois concernent carrément un accroissement de la production.

L’Agence internationale de l’énergie (AIE), dans son rapport annuel publié à l’automne 2022 (World Energy Outlook), notait que la guerre en Ukraine avait au moins eu pour retombée d’accélérer les investissements mondiaux vers les énergies vertes. C’était aussi la première fois que ce rapport annuel concluait que la demande mondiale en carburants fossiles allait bientôt atteindre un sommet, quoique en 2035 seulement. Dans un autre document publié en mars 2022, moins d’un mois après l’invasion de l’Ukraine, l’AIE recommandait 10 mesures pour réduire à court terme la consommation de pétrole, plutôt que d’augmenter la production. Il semblerait que son message n’ait pas été entendu.

 

Photo: Une plateforme pétrolière du gisement Hibernia, au large de Terre-Neuve / Suncor

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