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Malheureusement, la nouvelle n'a pas vraiment fait les manchettes dans la presse francophone. La compagnie Boiron, numéro un mondial de l'homéopathie, a décidé de verser la somme de 12 millions de dollars pour régler hors cours une série de recours collectifs pour publicité mensongère au sujet d'un de ses produits phares, l'oscillococcinum.

Développée au 18e siècle par un médecin allemand, Samuel Hahnemann (1775-1845), l'homéopathie repose essentiellement sur deux principes. Le premier, celui de la similarité, stipule que si, à haute dose, une substance cause certains symptômes, elle peut être utilisée sous une forme diluée pour traiter un patient souffrant de ce type de symptômes, quelle qu'en soit la cause. Par exemple, l'arsenic à haute dose engendre des brûlures d'estomac, des vomissements et de la diarrhée.

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Donc, d'après la théorie de l'homéopathie (du grec homios pathos ou semblable souffrance), des doses diluées d'arsenic sont indiquées contre les problèmes gastriques. De plus, d'après la loi des infinitésimaux, plus la solution est diluée, plus elle est efficace. Dans le cas de l'oscillococcinum, la compagnie Boiron le recommande sur son emballage comme traitement contre le rhume et la grippe. Lorsque l'on comprend comment ce médicament est préparé, il est facile de comprendre pourquoi la compagnie n'avait pas beaucoup de choix que de régler hors cours.

Le produit a son origine dans les années 1920, au temps de la grippe espagnole. Un médecin français, le docteur Joseph Roy, avait remarqué la présence d'une bactérie au mouvement oscillant dans le sang de ses patients. Il lui donne en conséquence le nom d'oscillocoque. Il chercha ensuite à identifier la présence de la «bactérie» dans divers animaux avant de la retrouver soi-disant dans le cœur et le foie des canards de Barbarie. D'après les principes de l'homéopathie, ce sont des solutions diluées de ces deux organes qui sont utilisées par les laboratoires Boiron dans leur produit contre «les états grippaux; fièvres et courbatures».

Même si l'on croit au principe de l'homéopathie, la grippe étant d'origine virale, des solutions diluées d'une bactérie n'ont pas de sens. De plus, aujourd'hui, tant les partisans que les opposants à l'homéopathie reconnaissent que la bactérie n'existe pas et qu'elle n'était que le produit de l'imagination du docteur Roy. Toutefois, les revenus que la compagnie Boiron retire de l'oscillococcinum, eux, dépassent l'imagination.

Pour la préparation d'oscillococcinum, un extrait de cœurs et de foies de canard de Barbarie est placé dans un récipient qui est ensuite rempli d'eau. Après cela, la solution est agitée vigoureusement pour la «dynamiser». Une fois cette opération complétée, le récipient est vidé. Il est ensuite à nouveau rempli d'eau et agité. Cette opération de vidange, remplissage et d'agitation est répétée 200 fois. Dans ces conditions, on peut conclure que cette solution finale ne contient aucune trace de la préparation de départ. C'est cette solution, en fait de l'eau pure, qui est utilisée pour imprégner les pastilles de glucose et de lactose qui sont vendues en pharmacie sous le nom d'oscillococcinum.

Avec des couts de «matière première» quasi inexistants, il n'est pas étonnant que, l'année dernière, Boiron ait déclaré des revenus de près de 700 millions de dollars dont une grande partie provenait de la vente d'oscillococcinum. Incroyable lorsque l'on sait que l'ensemble des études scientifiques indique que l'homéopathie n'apporte aucun avantage au-delà de l'effet placébo.

C'est justement sur l'absence d'ingrédients actifs et de preuves d'efficacité que les plaignants poursuivaient Boiron pour publicité mensongère. D'après les modalités du règlement, Boiron s'est engagée à indiquer sur l'emballage que le produit n'avait pas été évalué par la FDA et à expliquer son mode de fabrication.

Malgré tout, je trouve inconcevable que la compagnie puisse, dans ces conditions, continuer à vendre son produit. S'il s'agissait de l'industrie pharmaceutique, cela soulèverait un tollé auprès du public, si celui-ci apprenait qu'un produit dont l'efficacité médicale n'est pas prouvée se trouve sur le marché*.

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*Au Canada, deux groupes, The Committee for the Advancement of Scientific Skepticism (CASS) et the Centre for Inquiry Canada (CIC), font pression sur la chaine de pharmacies Shoppers Drug Mart pour qu'elle cesse de vendre des produits homéopathiques. D'après ces groupes, la chaine trompe ses clients en vendant à côté de ses médicaments des produits qui n'ont aucune efficacité.

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