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Cependant, l'astrobiologiste en moi ne peut s'empêcher d'y trouver un aspect positif et de rêver que le retour sur la Lune pourrait nous permettre d'élucider le problème de l'origine de la vie sur notre planète.
En effet, dans son dernier livre intitulé "Life as we do not know it" (2005, Penguin Group), le biologiste Peter Ward, discute de la possibilité que des fossiles d'organismes terrestres puissent possiblement se retrouver sur la Lune. Son argument est le suivant.
La Terre est constamment bombardée par des météorites et on en retrouve des milliers un peu partout à la surface (voir mon billet du 16 février 2006). La plupart de ces cailloux provient de la ceinture d'astéroïdes situés entre Mars et Jupiter. Toutefois, l'origine d'un petit nombre se trouve ailleurs dans le système solaire: la Lune, Mars, ou Vénus. C'est le cas du désormais célèbre météorite martien ALH84001 dont on a abondamment parlé au cours des dix dernières années. Ces petits météorites sont arrachés de la surface d'une planète par l'impact d'un gros fragment de comète ou d'astéroïde et projetés dans l'espace. Éventuellement, ils terminent leur course sur une autre planète du système solaire, dont la Terre.
L'inverse est tout aussi vrai. Des roches terrestres ont certainement été arrachées de la surface de notre planète suite à un impact violent, et ont voyagé jusqu'à la Lune, Mars, Vénus, ou Mercure.
À titre d'exemple, la collision de l'astéroïde qui a mis fin au règne des dinosaures il y a 65 millions d'années, a probablement projeté une quantité appréciable de roches sédimentaires dans l'espace qui se sont éventuellement écrasées sur les planètes proches dont la Lune (vue sa taille et son histoire, les astronomes considèrent souvent la Lune comme la moins massive des planètes telluriques). Ces roches ont transporté avec elles des bactéries, des plantes et peut-être même des petits débris d'animaux déchiquetés lors de l'impact (!). L'environnemnent froid et stérile d'une planète comme la Lune a certainement préservé ces fossiles sans les altérer.
Évidemment, il n'y a pas grand intérêt à essayer de récupérer ce type de fossiles sur la Lune puisque les "archives géologiques" terrestres de cette période sont abondantes et très bien documentées. Toutefois, ce n'est pas le cas des premières centaines de millions d'années de l'histoire de notre planète.
L'âge de la Terre est estimé à 4.6 milliards d'années et les plus vieilles traces incontestées de vie remontent à environ 3.5 milliards d'années. Des indices plus minces permettent de croire que la vie existait peut-être 300 millions d'années plus tôt, c'est-à-dire il y a 3.8 milliards d'années. Le problème est qu'on trouve très peu de roches sédimentaires de cette époque reculée à cause de l'activité géologique de notre planète (mouvement des plaques tectoniques, volcanisme, etc.).
Combien de temps après la formation de la Terre, la vie a-t-elle mis pour apparaître, et quelle était la nature de cette vie ? Voilà deux questions auxquelles il est difficile de répondre parce que les roches sédimentaires renfermant des fossiles de cette époque sont extrêmement rares. De plus, lorsqu'on en découvre, ces roches ont été fortement altérées par l'activité géologique et/ou biologique de notre planète.
D'où l'intérêt de chercher sur la Lune ! En effet, au début de son histoire, la Terre a été abondamment bombardée par des astéroïdes de toutes tailles. La preuve de cette période de bomdardement intensif est d'ailleurs très bien documentée par le registre des cratères d'impact sur la Lune. Il est donc raisonnable de croire que des roches sédimentaires très anciennes, renfermant possiblement les fossiles des premières formes de vie apparue sur notre planète, aient été projetées dans l'espace et se trouvent, aujourd'hui, mélangées à la régolithe lunaire. L'absence d'activité géologique et biologique sur notre voisine a certainement permis de préserver ces échantillons depuis lesquatre derniers milliards d'années.
Selon l'article publié dans la revue Icarus en novembre 2002 (Armstrong, Wells, et Gonzalez, 2002, Icarus, vol.160, p.183), il y aurait sur la Lune jusqu'à 20 tonnes de roches terrestres pour chaque 100 kilomètres carrés de surface. Donc une petite fraction du sol lunaire est d'origine terrestre.
L'analyse des 380 kg de roches lunaires, rapportées par les astronautes des 6 missions Apollo, révèle qu'environ 1% n'est pas indigène à notre satellite. Les échantillons lunaires contiennent donc certainement quelques grammes de roches terrestres. Cependant, personne n'y a encore recherché des traces de vie primitive fossilisées.
D'un point vue astrobiologique, le retour vers la Lune offre une occasion de mieux comprendre l'origine de la vie sur Terre. Plus encore, puisque qu'on y trouvera probablement aussi d'anciennes roches martiennes ou vénusiennes, nous avons la possibilité de découvrir si la vie est aussi apparue sur ces autres mondes.