La génétique est décidément à l'honneur des Nobel cette année. Après le Nobel de médecine, voici que celui de chimie récompense lui aussi une percée de taille dans l'exploration de nos gènes.

Est-ce que vous vous êtes déjà demandé comment on "lit" un gène? Lorsqu’une recherche dévoile que tel gène est en réalité une succession de quelques centaines de paires de base (les fameuses lettres A, C, T, G), comment le sait-on?

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La première étape de cette "lecture" s’appelle transcription. Elle est devenue des plus banales aujourd’hui dans les laboratoires, mais il a tout de même bien fallu que quelqu’un ne découvre "comment ça marche". Ce quelqu’un, c’est Roger Kornberg, de l’Université Stanford, ce qui lui a valu cette semaine le Prix Nobel de chimie.

La transcription, c’est le mécanisme par lequel le contenu d’un gène est copié –en vue du moment où la cellule se divisera pour former une nouvelle cellule– sur un brin de matériel génétique appelé l’ARN messager. C’est l’indispensable point de départ qui permet au "livre de la vie" de se transmettre d’une génération à l’autre, et c’est cet indispensable point de départ que Roger Kornberg a mis 20 ans à étudier.

Symbole parfait de cette "transmission d’information" d’une génération à l’autre: le père de Roger Kornberg, Arthur, il y a un demi-siècle, avait étudié la façon dont l’ADN est copié lorsque les cellules se divisent. Ce qui lui avait valu le Nobel de médecine en 1959!

Le fils, lui, a démontré que le processus était encore plus compliqué chez les créatures complexes, comme nous, que chez les créatures à une seule cellule, comme les bactéries.

Au passage, cela pose une question qui hantera de plus en plus les chimistes: où tracer la frontière entre la biologie et la chimie? Le travail de Kornberg porte sur un mécanisme de nature chimique –notamment la structure chimique de la polymérase II de l’ARN, si vous voulez tout savoir– mais qui est indispensable au vivant –et qui, de ce fait, relève donc de la biologie. Il en est de même alors que la génétique s’enfonce dans les profondeurs du vivant: elle découvre des mécanismes qui, il y a quelques décennies, auraient relevé du territoire des chimistes, mais qui sont au fur et à mesure absorbés dans le territoire des sciences de la vie (biologie, ou plus exactement, ici, génétique).

La chose n’a pas échappé au journaliste de la revue Nature, qui fait dire à quelques-uns de ses interviewés que Kornberg aurait tout aussi bien pu gagner le Nobel de médecine (comme son père!). Cela n’enlève rien à la valeur de son travail: en fait, qu’il soit le seul gagnant du Nobel de chimie –alors qu’un Nobel est souvent partagé par deux ou trois auteurs– est révélateur en soi du caractère fondamental, pour l’avancement des sciences en général, qu’a acquis ce phénomène appelé transcription dont il a été le premier à percer les mystères.

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