
Jeudi, une nommée Lyn Redwood faisait une présentation devant le nouveau comité du ministère américain de la Santé sur les vaccins. Et elle y citait une étude qui n’existe pas, pour appuyer sa croyance à l’effet que les vaccins causeraient des problèmes neurologiques. Le même jour, des médias révélaient que Lyn Redwood venait d’être embauchée par le ministère de la Santé.
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Lyn Redwood a surtout été pendant des années la directrice du Children’s Health Defense, l’organisme qui, fondé en 2011 par Robert F. Kennedy Jr (RFK), est l’un des principaux propagateurs de fausses nouvelles sur les vaccins aux États-Unis —incluant la fausse idée voulant que les vaccins causent l’autisme. Enfin, Lyn Redwood a aussi travaillé pour la campagne présidentielle de RFK.
Le poste qu’elle occupera au ministère de la Santé n’a pas été confirmé, mais son apparition de jeudi devant le comité aviseur sur les vaccins (Advisory Committee on Immunization Practices, ou ACIP) survenait dans le contexte de la rencontre au cours de laquelle celui-ci avait décidé de discuter du rôle du thimérosal dans les vaccins. Dans l'après-midi, le comité annonçait que, désormais, les vaccins contenant cet ingrédient ne pourraient plus être vendus aux États-Unis.
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Seulement 3% des vaccins vendus aux États-Unis contiennent du thimérosal (ou thiomersal). Et aucun n’est un vaccin pour enfants. Des rumeurs sur le lien entre autisme et thimérosal ont circulé dans les années 1990 mais depuis, de nombreuses études ont démontré une absence de lien —et son retrait généralisé dans plusieurs pays aurait dû mettre fin au débat, puisque ce retrait n’a pas fait disparaître l’autisme ou les problèmes neurologiques. Dans un livre écrit en 2014, RFK réitérait pourtant, sans fournir de nouveaux arguments, que le thimérosal est responsable des problèmes neurologiques.
Le comité ACIP est celui qui a créé la controverse plus tôt ce mois-ci: c’est celui dont les 17 membres —des experts en santé publique, en épidémiologie, en pédiatrie et en gériatrie— ont été mis à pied le 9 juin pour être aussitôt remplacés par huit personnes choisies par RFK (une s’est retirée depuis), dont quelques-unes s’affichent fièrement comme antivaccins. Ces nouveaux membres ont été nommés dans l’urgence, en prévision de la rencontre qui était au calendrier cette semaine.
Le rôle du comité est, depuis 1964, de recommander au gouvernement américain quels vaccins doivent être autorisés, parmi tous les vaccins qui sont passés par les étapes de vérification et d’approbation.
Comme quoi l’expertise n’est pas plus la priorité que le choix des sources, c’est aussi du ministère de la Santé qu’est venu le mois dernier un rapport (The MAHA Report) qui, a-t-on appris le 29 mai, citait des études qui n’existent pas et qui attribuait à d’autres études de fausses conclusions. Plusieurs auteurs cités dans ce rapport s’en étaient plaints et cette semaine, le neurologue californien Robert Berman s’est plaint à son tour d’avoir été cité par Lyn Redwood pour une étude de 2008 qu’il n’a jamais écrite, et pour une conclusion qui ne correspond pas à celle de ses vraies études sur le sujet.
« En tant que médecin et scientifique qui a consacré sa vie à prévenir et traiter les infections, cette réunion de l’ACIP était pénible à regarder », commentait jeudi dans le New York Times le Dr Lakshmi Panagiotakopoulos, expert en vaccins qui a récermment démissionné du Centre de contrôle et de prévention des maladies (CDC).