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On avait annoncé depuis 10 jours une grande annonce sur la matière sombre. L’annonce a finalement été... qu’on n’a pas détecté de matière sombre.

Une conférence webdiffusée en direct dans l’avant-midi du 30 octobre, a permis à une équipe de physiciens américains, à la tête «du détecteur de matière sombre le plus sensible du monde», de dire qu’après quatre mois... il n’y avait rien.

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Le détecteur en question, appelé LUX pour Large Underground Xenon, est enfoui à 1500 mètres de profondeur dans une ancienne mine d’or du Dakota du Sud. Et l’ironie n’a pas échappé au New York Times, qui constate que cette ancienne mine semble se battre pour décrocher la palme du lieu où rien ne se passe: il y a plus de 35 ans, le physicien Raymond Davis Jr avait tenté d’y capturer des neutrinos. En vain.

À la défense de LUX, il faut dire que les neutrinos ont tout de même fini par être détectés. Mais la différence avec la matière noire, c’est que bien qu’on sache qu’elle est là —26% de la masse de l’Univers, ce n’est pas rien— les théoriciens ne s’entendent toujours pas sur ce qu'elle est —et par conséquent, le moyen par lequel on pourrait la détecter.

La méthode la plus simple serait qu’elle interagisse occasionnellement avec la matière «normale», et c’est la raison de ce détecteur au fond d’une mine, enfoui assez loin pour être isolé des rayons cosmiques. L’espoir est que des particules de matière sombre appelées WIMP (weakly interacting massive particles) traversant la Terre aussi facilement que les neutrinos, heurtent à l’occasion un des atomes des 368 kilos de xénon liquide qui constituent le coeur du détecteur LUX.

Mais encore faut-il que les particules de matière sombre se comportent d’une manière similaire aux neutrinos. On sait que la matière sombre interagit avec la gravité, puisque c’est ainsi qu’on sait qu’il y a «quelque chose» un peu partout. Mais on ne peut même pas affirmer qu’elle interagit avec la matière «ordinaire».

Les non-résultats, soumis à la revue Physical Review Letters pour publication, permettent au moins d’éliminer des possibilités : un certain nombre de paramètres qui, s’ils avaient été ceux de la matière sombre, auraient rendu celle-ci détectable dans cette soupe. Il faut aussi savoir que des expériences précédentes avaient laissé planer l’espoir qu’on avait déjà détecté quelque chose dans les paramètres fouillés par LUX.

L’expérience ne fait que commencer: il y en a pour un an encore. Pourquoi alors avoir fait une annonce cette semaine?

Peut-être parce qu’il y a une course. L’expérience de 10 millions$ est en attente de financement supplémentaire, dans l’espoir de passer de 368 kg à 7 tonnes de xénon —plus la «piscine» est grande, plus les chances «d’attraper» quelque chose augmentent. Par ailleurs, le ministère américain de l’Énergie pourrait aussi avoir le choix entre trois projets: LUX-ZEPLIN (le projet des 7 tonnes), un autre détecteur, prévu pour une mine du Minnesota (Super Cryogenic Dark Matter Search), et un troisième (DarkSide), installé à Gran Sasso, Italie. Comme dans toute course qui se respecte, bien des coureurs craignent de se faire coiffer au poteau...

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