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La patate douce a-t-elle été importée dans les îles du Pacifique par des navigateurs venus des Amériques, ou si… elle a voyagé toute seule ?

La question peut sembler absurde, mais elle ne l’était pas pour les généticiens, puisque ceux-ci viennent d’apporter des données qui soutiennent que cette humble plante, qui constitue aujourd’hui l’un des principaux aliments sur la planète, pourrait bien avoir voyagé par elle-même.

C’est qu’avant d’être un mystère botanique, la patate douce (Ipomoea batatas) était un mystère historique. Les peuples d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud la cultivaient depuis longtemps lorsque Christophe Colomb et les Européens sont arrivés dans la région. Plusieurs des peuples du Pacifique rencontrés par le Britannique James Cook la cultivaient aussi lorsque celui-ci est plus tard devenu le premier Européen à débarquer sur ces îles. Et si on a pu croire que cela signifiait que d’autres Européens avaient précédé James Cook, les archéologues ont pu établir que certains insulaires cultivaient déjà cette patate depuis au moins 700 ans.

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L’idée que des Polynésiens aient pu voyager jusqu’en Amérique, ou que des habitants des Amériques aient pu faire le chemin inverse avant l’arrivée des Européens, circule depuis des décennies, et la patate douce est souvent citée en appui à cette hypothèse. La génétique a toujours semblé s’entendre sur le fait que l’ancêtre de toutes les variétés de patates se situait dans les Amériques. La nouvelle étude, publiée le 12 avril, a été réalisée par une quinzaine de chercheurs du Pérou, des États-Unis et de l’Université britannique d’Oxford, qui ont recueilli près de 200 échantillons d’ADN de patates à travers le monde, y compris dans des feuilles ramenées par James Cook et conservées au Musée d’histoire naturelle de Londres. Ils arrivent à la conclusion que « la patate douce aurait pu arriver dans le Pacifique par des moyens naturels » — autrement dit, en flottant, ou transportée par des oiseaux. La variété du Pacifique se serait séparée de la branche américaine il y a 110 000 ans — soit longtemps avant que l’Homo sapiens n’arrive dans la région.

Tous les archéologues ne sont pas convaincus, pointant le fait que toutes ces patates douces cultivées sur autant d’îles différentes ont fini par évoluer pour se ressembler, un scénario qui leur semble improbable s’il n’y a pas d’origine « humaine » commune.

 

Ajout 27 avril: Le biologiste Michael Matshiner publie en ligne une analyse contestant les conclusions de cette recherche.

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