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Étranges, les circonstances qui amènent certains d’entre nous à porter le regard aux confins de l’univers...

Le jeune juriste prend son élan et d’un bond, saute les premières marches du grand escalier de marbre. Il gravit les autres quatre à quatre, mais, s’enfarge soudain dans sa toge et trébuche. Il déboule l’escalier de la Faculté de droit de l’Université d’Oxford. Les dossiers qu’il tenait sous le bras s’envolent. Entouré de sourires moqueurs. Il reprend graduellement ses esprits, affalé au pied des marches. Une page d’un de ses documents voltige devant la fenêtre où luit un mince croissant de lune.

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« La Lune? Tiens! Tiens! » se dit-il. Mais il n’a pas l’esprit trop clair. Sa chute l'a drôlement sonné. Comme la fois de son combat de boxe, lors du championnat à l’Université de Chicago, quand il y était étudiant de premier cycle. Un fameux combat, difficile à gagner et pendant lequel il en avait vu des « étoiles », presque autant que celles qui lui tournoient en ce moment autour de la tête. À Chicago, il aurait pu devenir boxeur professionnel, mais il avait décidé, pour faire plaisir à son père, de choisir une autre carrière.

Le jeune homme se relève, s’époussette, glisse la main dans la poche de son veston, sous sa toge défaite. Ouf! Sa pipe est intacte.

« Les étoiles? Tiens ! Tiens! » se dit-il. Quand il était plus jeune, l’astronomie était sa passion. Le Droit ne lui sourit pas. De retour aux États-Unis, il s’accorde une année de réflexion. Le soir, lorsque le temps le permet, il scrute le ciel étoilé au-dessus du lac Michigan avec son petit télescope. Sa fascination pour le vaste univers le reprend tout entier.

Astronome amateur? Astronome tout court? Il opte pour le second choix et se réinscrit à l’Université de Chicago. La thèse qu’il y soutient porte sur les énigmatiques nébuleuses, dont l’instrumentation de l’époque ne permet pas de déterminer la véritable nature.

Plus tard, beaucoup plus tard, assis devant le feu qui crépite dans le foyer de sa cheminée, tirant des bouffées de sa pipe, il tente de se préparer mentalement au voyage de pêche qu’il compte faire dans les Rocheuses avec son nouvel assistant; Milton Humanson. Mais la pêche à la truite, pourtant son passe-temps favori, n’arrive pas à retenir son attention. Il ne cesse de penser aux nébuleuses, devenues, avec de meilleurs instruments d’observation, des galaxies.

Milton Humason, ancien garçon d’hôtel, a transporté à dos de mulet les pierres destinées à la construction de l’Observatoire du mont Wilson, puis le ravitaillement des ouvriers, et par la suite, toujours à dos de mulet, les astronomes. En analysant des plaques photographiques de la galaxie d’Andromède, il est parvenu à y repérer des étoiles du type « Céphéides » et les deux hommes, grâce à la photométrie, en ont mesuré la distance, de même que celle de la nébuleuse d’Andromède.

Ils analysent la lumière d’étoiles d'autres galaxies. Ils ont découvert que plus elles étaient lointaines, plus elles s’éloignaient rapidement de nous. Comme si les galaxies se fuyaient les unes les autres, comme si l’univers se gonflait à une vitesse fulgurante.

Deux astronomes, un amateur et un professionnel, venaient de démontrer que l’univers est en expansion. Le saurions-nous si Milton Humanson était resté garçon d’hôtel ou si, pour voir plus d’étoiles, Edtvin Hubble avait choisi de devenir boxeur?

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