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Il y a des choses que l’on croit bien connaître parce qu’on en parle depuis des années ou même des décennies mais dont une simple étude vous fait prendre la réelle mesure. C’est ce qui s’est passé pour moi à propos de la transmission synaptique en tombant sur l’article Synaptic vesicles transiently dock to refill release sites publié dans la revue Nature Neuroscience en septembre dernier.

Les auteurs principaux de l’étude, Grant F. Kusick et Shigeki Watanabe de la Johns Hopkins University School of Medicine aux États-Unis, ont utilisé une technique d’imagerie cellulaire appelée “zap-and-freeze” pour analyser la transmission chimique entre deux neurones. Ce qui les intéressait particulièrement était de comprendre comment les vésicules synaptiques qui fusionnent avec la membrane du bouton synaptique (le bout de l’axone) pour relâcher les neurotransmetteurs dans la fente synaptique se reforment pour que le neurone soit prêt pour l’influx nerveux suivant. Plusieurs dizaines, voire quelques centaines d’influx nerveux par seconde peuvent en effet arriver au bout d’un axone et cela implique la reformation extrêmement rapide d’une quantité suffisante de vésicules synaptiques contenant les neurotransmetteurs.

Or on n’avait jamais pu observer visuellement cette dynamique ultra-rapide de l’excrétion et de la reconstruction du pool des vésicules synaptiques en attente d’être excrétées. Et c’est ce qui a été réalisé avec cette technique du “zap-and-freeze” qui permet de stimuler des neurones in vitro puis de les congeler un nombre précis de millisecondes après la stimulation, ce qui permet ensuite de regarder ce « snapshot » au microscope électronique, seul outil capable de voir aussi petit que des vésicules synaptiques de neurone (voir l’image en haut de ce billet).

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La rapidité du phénomène dévoilée par les images de l’étude est bien sûr étonnante. Mais c’est le détail des différentes phases de ces phénomènes ultra-rapides, révélés par ces photos, qui a enrichi vraiment notre connaissance de la transmission synaptique. Il semble ainsi qu’à tout moment, il n’y a que quelques vésicules qui sont près de la membrane du bouton terminal de l’axone, prêtes à fusionner à l’arrivée d’un influx nerveux. Immédiatement après l’arrivée d’un influx nerveux, le nombre de vésicules diminue de 40%. De sorte qu’après 2-3 potentiels d’action ce stock de vésicules prêtes à être excrétées serait pratiquement épuisé.

Mais les photos ont montré qu’aussi peu que 14 millisecondes suivant l’arrivée d’un potentiel d’action, de nouvelles vésicules sont recrutées dans la région « en attente de fusion » (le « docked pool », en anglais). Mais cette mobilisation semble transitoire puisque ces vésicules vont être soit écartée de la région de libération soit vont fusionner à leur tour avec la membrane dans un délai de 100 millisecondes tout au plus (donc un dixième de seconde). Ces résultats montrent à quel point la transmission synaptique est rapide et flexible.

Et cette fusion et reformation de vésicules synaptiques se produit, comme je l’ai mentionné, des dizaines voire des centaines de fois par seconde pour des milliers et des milliers de neurones qui se connectent à des milliers d’autres parmi les 86 milliards de votre cerveau… Note à moi-même : faire dorénavant une pause de quelques secondes après avoir rappelé ces données sur la transmission synaptique pour permettre aux gens de digérer la sensation de vertige bien légitime que cette complexité évoque !

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