Microphotographie d'algues volvox

L'évolution du vivant pose des défis à la communauté des scientifiques. Petit à petit des observations leur suggèrent des réponses. Le problème de la transition des organismes unicellulaires aux organismes multicellulaires  est intéressant à considérer.

Pour tâcher d'avoir un début de réponse à ce problème, les biologistes peuvent retracer les organismes multicellulaires les plus simples qu'on retrouve aujourd'hui. À ce compte, le Volvox est un cas intéressant puisqu'il se situe à la frontière entre les organismes unicellulaires et multicellulaires. Cette algue est constituée d'une colonie de cellules parmi lesquelles deux types différents sont identifiés : des cellules somatiques et des cellules reproductrices, un peu plus grosses, appelées gonidies. Les cellules somatiques rassemblées ne sont pas différenciées et c'est pourquoi, il est plus approprié de parler de colonie que d'organisme dans ce cas-ci. S'agit-il d'un descendant de la forme primitive de vie qui a permis d'établir le pont entre organismes uni et multicellulaires? Apparemment non car «...la transition entre l’ancêtre unicellulaire de Volvox et la forme coloniale, telle que nous la connaissons aujourd’hui, a commencé il y a environ 200 millions d’années, et a duré approximativement 35 millions d’années. Cela correspond à la fin du Trias et à une partie du Jurassique, c’est-à-dire à une époque où les végétaux pluricellulaires étaient largement répandus, et ce depuis longtemps. » [1]

D'ailleurs il n'est pas sûr que la transition de l'unicellularité à la pluricellularité se soit amorcée à partir d'une algue ou, à tout le moins, uniquement à partir de ce type d'organismes. Les levures sont des organismes unicellulaires qui font partie du règne des fungi, les champignons. La plupart d'entre eux forment des hyphes qui sont des réseaux constitués de nombreuses cellules. Une équipe a observé que, dans certaines conditions, la levure Candida albicans peut former ce type de réseau. [2]

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Récemment, une étude, publiée en 2019, faisait état d'une expérience au cours de laquelle une algue unicellulaire a évolué au bout de 750 générations en organisme pluricellulaire lorsque cette algue réagissait à la présence d'un prédateur. Il n'a fallu que 50 semaines à ce processus évolutif pour se réaliser. Une grande variété était observée parmi ces nouveaux organismes. L'équipe a pris soin de vérifier par des tests de survie « ...que les traits multicellulaires évolués offrent une protection efficace contre la prédation ». [3] Une évolution en un temps aussi bref peut sembler étonnante. Il faut toutefois préciser que ces organismes actuels, aussi «primitifs» qu'ils nous apparaissent, disposent sans doute d'un patrimoine génétique beaucoup plus évolué que leurs ancêtres ayant existé il y a plus d'un milliard d'années. De plus, elle a été réalisée dans des conditions artificielles. On peut supposer qu'un processus évolutif semblable a dû exiger des millions d'années pour se concrétiser pour la première fois à cette époque reculée.

Le transfert horizontal de gènes

La voyria est une petite plante qu'on rencontre dans les forêts du Panama. Elle arbore une unique fleur de couleur bleue. Elle affiche une caractéristique très particulière : cette plante n'effectue pas de photosynthèse. La photosynthèse est l'une des principales caractéristiques du règne végétal. À l'évidence, cette plante a perdu cette capacité. C'est fort possible, mais en est-on certain? Un phénomène dont les biologistes de l'évolution doivent tenir compte est le transfert horizontal de gènes. Dans ce type de processus, des gènes sont transmis d'un organisme à un autre sans qu'il y ait reproduction. Jusqu'ici ce phénomène n'avait été observé que chez les procaryotes, les organismes unicellulaires dépourvus de noyau, essentiellement, dans ce cas-ci, des bactéries. L'an passé une équipe de l’Université de Montréal l'a observé chez un parasite, la Leishmania. C'est à l'intérieur de vésicules que les gènes sont expulsés hors du parasite. [4] Ce transfert de gènes entre cellules eucaryotes n'avait apparemment pas encore été mis en évidence.

Se pourrait-il alors qu'un tel transfert de gènes puisse se produire entre des organismes d'espèces différentes? Comment savoir si un tel phénomène ne s'est pas déjà produit par le passé? Revenons à notre petite plante qui n'effectue pas de photosynthèse. La raison la plus simple est qu'elle aurait perdu cette capacité et c'est sans doute la plus probable, mais ce n'est pas la seule possibilité. Et si, à l'inverse, l'espèce ancestrale de la voyria n'était pas une plante? L'espèce en question n'aurait-elle pas pu acquérir certaines caractéristiques, et même plusieurs, des végétaux par un transfert horizontal de gènes qui aurait pu se produire plusieurs fois? En science, le plus probable ne doit jamais être élevé au rang de vérité. Les scientifiques doivent imaginer toutes les hypothèses possibles, même les plus improbables, et procéder à leur vérification quand la possibilité leur en est donnée. Car un tel mécanisme était peut-être à l’œuvre beaucoup plus fréquemment à certaines époques pour permettre le passage de "sauts évolutifs" comme celui ayant permis le passage des simples organismes dotés d'une seule cellule à ceux disposant de nombreuses cellules différenciées en plusieurs types pour leur constitution.

 

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