Si rien n'est fait, le nombre de débris orbitaux dans l’espace sera bientôt si important qu’il compromettra l’avenir de l’exploration spatiale.

Depuis le lancement du Sputnik en 1957, un nombre grandissant d’objets se sont accumulés en orbite. Le U.S. Space Surveillance Network suit présentement 13000 objets de plus de 10 cm en orbite autour de la Terre. La masse totale de ces débris est des 5500 tonnes. Environ 40% de ces débris proviennent de désintégration de satellites ou d’étage supérieur de fusée. De plus, on retrouve aussi des centaines de milliers d’objets plus petits, allant du morceau de plastique au fragment de peinture.

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Certaines populations de débris proviennent des sources particulières. Ainsi, à 900 km d’altitude, on retrouve 70 000 particules de 0,5 à 5,5 cm de diamètre. Ces particules proviennent du liquide de refroidissement des réacteurs nucléaires de satellites de surveillance maritime russe (RORSAT). Il s’agissait d’un alliage de sodium et de potassium qui était relâché dans l’espace lorsque le réacteur était séparé du satellite en fin de fin afin de minimiser les risques d’une rentrée atmosphérique. De 1980 à 1988, 16 réacteurs ont été ainsi libérés dans l’espace.

À 3600 km d’altitude, on retrouve les restes du projet West Ford. Il s’agit d’un projet de l’armée américaine voulant créer une zone réflectrice des ondes radio dans l’espace pour assurer les communications en temps de guerre. En mai 1963, le satellite MIDAS 6 a relâché 480 millions de petites aiguilles de cuivre. Chaque aiguille mesurait 1,8 cm de long, par 18 micromètres de diamètre. Les aiguilles étaient noyées dans un bloc de gel de naphtalène qui lors de son évaporation dans l’espace les libérerait. L’ensemble pesait 19 kg. En deux mois, les aiguilles se sont dispersées en orbite créant un beigne de 15 km de large par 30 km d’épais entourant la Terre. La taille des aiguilles en faisait d’excellents réflecteurs à la fréquence de 8 GHz. Environ 25% à 40% des antennes furent libérées au niveau individuel alors que le reste était regroupé dans une centaine de fragments. La majorité des aiguilles individuelles retombèrent en quelques années, mais les plus gros fragments sont toujours en orbite. On retrouve aujourd’hui près de 40 000 de ses fragments en orbite.

Une autre source de débris orbitaux est les fragments d’oxyde d’aluminium (Al2O3) provenant de la combustion de propulseur à carburant solide. La combustion de ses moteurs produit un nombre important de particules de moins d’un millimètre. En fin de combustion, ces moteurs produisent aussi des fragments de taille centimétrique.

Voyageant à grande vitesse ces débris orbitaux représentent une menace constante pour les satellites en orbite. Ainsi, une sphère d’aluminium de 1 cm de diamètre voyageant à 10 km/s contient autant d’énergie qu’une grenade ! Pour les fragments les plus gros, les satellites peuvent modifier leur trajectoire afin d’éviter la collision. Pour les fragments plus petits, il est possible de protéger les installations dans l’espace à l’aide d’un blindage approprié. La conception de ce type de blindage n’est cependant pas triviale.

En effet, il est hors de question d’utiliser un blindage massif qui serait beaucoup trop lourd et de toute façon n’offrirait qu’une protection limitée. En effet, la force de l'impact est si importante que les matériaux se comportent comme des liquides. Dans ces conditions, même de petits fragments passeraient à travers un blindage très épais. Cette particularité est d'ailleurs utilisé dans la conception des obus-flèches équipant les blindés.

La solution à ce problème est connue sous le nom de bouclier de Whipple, proposé pour la première fois par l’astrophysicien Fred Whipple en 1946. Il s’agit de placer une plaque à une certaine distance de la paroi à protéger. Le choc de l’impact fragmente le débris tout en diminuant la vitesse des particules. Celles-ci se retrouvent étalées sur une plus grande surface ce qui minimise d’autant les dégâts. On peut aussi ajouter d’autres feuilles de métal intermédiaire ou encore de couche de tissus comme le Nextel et le Kevlar afin de fragmenter encore plus le débris.

Trop petits pour être détecté au radar et, par conséquent, pour être évité et trop gros pour le blindage des plateformes spatiales, les débris les plus menaçants ont des tailles entre 1 et 10 cm. Lors d’un impact, ces débris peuvent provoquer la destruction complète d’un satellite ce qui libère encore plus de débris dans l’espace. Heureusement, ce genre de catastrophe ne s’est produite jusqu’ici qu’à trois reprises.

La première de ces collisions eut lieue en 1991, alors que le satellite russe Cosmos 1934 entra en collision avec un débris du satellite Cosmos 926. Les deux objets se trouvaient alors à une altitude de 980 km et à une inclinaison de 83°. En 1996, ce sera au tour du microsatellite français de surveillance électronique CERISE d’entrer en collision avec un débris orbital. Le coupable était un fragment de l’explosion du troisième étage d’une fusée Ariane 1 s'étant prduit 10 ans plus tôt. La collision a sectionné la poutre de stabilisation par gradient de gravité, ce qui handicapa lourdement le satellite. Finalement, il faudra attendre en 2005 pour observer une autre collision. Cette fois ce sera la partie supérieure du dernier étage de la fusée américaine Thor 2A, lancée 31 ans plus tôt, qui entrera en collision avec un fragment du troisième étage de la fusée chinoise CZ-4 ayant explosé en mars 2000.

Fort heureusement, ces collisions ont été jusqu’ici des phénomènes relativement isolés. Cependant, des résultats de simulation récents indiquent que même sans futur lancement la population de débris orbitaux sera d’abord stable et continuera d’augmenter après 2055 en raison des collisions entre satellites! La situation est suffisamment alarmante pour que les différentes agences spatiales mettent en place un train de mesure afin de minimiser le nombre de débris orbitaux.

Premièrement, il tout mettre en œuvre pour qu’un minimum de débris soit laissé dans l’espace lors de l’opération normale des plateformes spatiales : les bouchons des optiques, les boulons explosifs doivent resté attachés aux vaisseaux spatiaux. De même, on doit éviter qu’il reste des résidus de carburant dans les réservoirs des fusées. Ces résidus sont souvent la cause d’explosions qui comptent pour 40% du total de débris. De plus, on doit soit désorbiter les satellites en fin de vie ou les ranger sur une orbite dépotoir. Ainsi, les missions spatiales doivent prévoir assez de carburant afin de s’assurer qu’une fois leur mission terminée les satellites ne demeurent pas plus de 25 ans en orbite.

Seule la prévention est envisageable à moyen terme, car il n’est pas possible de nettoyer l’espace. Les collecteurs géants placés en orbite ou les lasers placés au sol sont tout simplement hors de portée de notre technologie. Pis encore, le réchauffement de la planète fait empirer les choses.

S.V.P., n’en jeter pas plus, la cour est pleine !

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