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C’est la mauvaise nouvelle qu’ils craignaient: une carte de la poussière interstellaire réduit considérablement les chances qu’on ait, en début d’année, détecté une empreinte de l’après-Big Bang. Portrait d’un dérapage aux dimensions cosmiques.

Physiciens et astronomes voyaient venir cette nouvelle depuis des mois. En fait, dès le moment où, en mars, une équipe de chercheurs appelée BICEP2 (Background Imaging of Cosmic Extragalactic Polarization) avait annoncé avoir détecté dans le ciel de l’hémisphère sud une légère variation du «bruit de fond cosmique». Une variation infime, qui ne pouvait être causée, disaient-ils, que par des ondes gravitationnelles: le signal depuis longtemps espéré de la période cruciale appelée inflation, qui aurait immédiatement suivi le Big Bang.

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Toutefois, les sceptiques avaient rapidement fait valoir que les données d’une équipe concurrente, celle du télescope spatial européen Planck, pourraient contredire ce résultat. Et c’est apparemment juste une question de poussière: dans une étude déposée le 22 septembre sur le serveur de pré-publication ArXiv, l’équipe Planck dévoile des données plus précises que jamais auparavant du taux de poussière qui imprègne le cosmos. Et il s’avère que ce taux est plus élevé dans la région de l’hémisphère Sud que ce qu’avait estimé l’équipe BICEP. Une différence suffisante pour fausser les résultats et faire erronément croire à la présence de ces ondes gravitationnelles.

Une analyse conjointe des données par les équipes BICEP2 et Planck est attendue en novembre. Mais il faut savoir que la façon dont BICEP a dévoilé ses données fait jaser depuis le début. Le télescope Planck (dont la mission est aujourd’hui terminée) était à l’oeuvre depuis quelques années, son équipe avait déjà dévoilé des données préliminaires, et la poussière cosmique faisait partie des raisons pour lesquelles il tournait là-haut, occupé à cartographier les premiers temps de l’univers.

La poussière était donc un paramètre qui ne pouvait être ignoré des experts, et l’équipe BICEP2 se serait appuyée sur des données de Planck incomplètes. Pire, certains sont allés jusqu’à suggérer, notamment dans un reportage du Scientific American , que l’équipe aurait été sélective dans son utilisation des données de Planck.

S’agit-il d’un artefact de la course à la publication, où une équipe, l’américaine BICEP2, aurait craint d’être coiffée au poteau par l’autre, l’internationale Planck? Le profane aurait du mal à l’imaginer, mais il semble en effet qu’on puisse bel et bien s’entredéchirer autour des infimes traces de l’après-Big Bang.

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