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Deux tragédies en cinq mois impliquant des Boeing 737 ont fourni l’occasion de pointer les projecteurs sur des exemples d’interrelations pas toujours rassurantes entre science et politique. Des cas où des décisions de nature technologique qui devraient être uniquement basées sur des données probantes ont relevé, ultimement, de choix politiques.

Ainsi, mercredi midi, les États-Unis étaient pratiquement le dernier grand pays à ne pas avoir encore cloué au sol ses Boeing 737 dans l’attente des résultats de l’enquête sur l’accident survenu dimanche en Éthiopie (le Canada avait annoncé sa propre décision dans la matinée). L’annonce du président Trump dans l’après-midi est venue après qu’il ait apparemment été décidé que cette annonce devrait être faite par l’agence fédérale de l’aviation (FAA), et après qu’il ait lui-même déclaré que la décision d’interdire de vol ces avions n’était pas urgente — une position qui était également défendue par Boeing.

Déjà, plusieurs experts de l’aviation avaient souligné combien la FAA était en retard, certaines des agences des autres pays ayant pris cette décision dès lundi. On a su entretemps que le président Trump avait eu des conversations téléphoniques quotidiennes avec le PDG de Boeing et d’autres actionnaires, à qui il avait offert son expertise personnelle sur les avions. Et c’est sur Twitter qu’il avait eu cette affirmation devenue virale, « les avions deviennent beaucoup trop compliqués pour voler ».

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Mais les racines plus profondes de la crise pourraient remonter à 2005, lorsque la FAA avait cédé aux compagnies, comme Boeing, une partie de la responsabilité de garantir la sécurité des appareils : les compagnies pouvaient désormais désigner leurs propres employés sur les comités de certification, plutôt que de laisser la FAA les choisir. Aujourd’hui, plusieurs administrateurs de Boieng ont été recrutés pour des postes de haut niveau dans l’administration Trump.

Le Boeing 737 Max 8 est un nouveau modèle, qui a fait son premier vol commercial en 2017, et qui vient donc de subir deux tragédies en cinq mois, en Indonésie en octobre et en Éthiopie dimanche dernier. C’est la raison pour laquelle les experts se demandent actuellement si les deux accidents pourraient avoir la même cause, et pointent du doigt le nouveau système supplémentaire de pilotage automatique (Maneuvering Characteristics Augmentation System, ou MCAS). Or, selon un reportage du Wall Street Journal mercredi, la fermeture de près d’un mois du gouvernement américain en décembre et janvier aurait retardé la mise à jour des logiciels des Boeing 737 Max 8, initialement prévue pour janvier. Le Journal fait également état de divergences d’opinions entre Boeing et la FAA sur le nombre nécessaire de mises à jour.

 

Ajout 18 mars: Comment des analyses bâclées et des vérifications défaillantes du Boeing 737 Max ont pu contribuer à l'accident en Éthiopie. Un reportage du Seattle Times.

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