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Parmi les arguments avancés par les résistants aux vaccins contre la COViD, il y a celui selon lequel nous serions « des cobayes », puisque « ces vaccins ont été testés en un temps record, alors qu'il faut normalement des années ». Le Détecteur de rumeurs a analysé cette affirmation.


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À l’origine de l’inquiétude

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L’argument est vrai sur un point: ces vaccins ont effectivement été testés en un temps record. On a coutume de dire qu’historiquement, un record de vitesse avait été établi lors de l'épidémie du Zika, en 2015, alors qu'il avait fallu sept mois pour développer un candidat vaccin acceptable pour passer à l’étape des tests cliniques. Mais le vaccin en question n’avait finalement pas été testé, puisque l’épidémie s’était résorbée d’elle-même.

Rappelons que les essais cliniques de phase 3 sont l’étape où l’on vérifie l’efficacité d’un vaccin. Ils sont souvent menés en administrant le vrai vaccin à un grand nombre de personnes et en administrant un faux vaccin (un placebo) à un aussi grand nombre de personnes. Après un certain temps, on compte ceux qui ont attrapé la maladie dans les deux groupes. Si la différence est suffisamment importante, on considère le vaccin comme efficace. Et combien de temps attend-on? Le temps qu’il faut pour obtenir cette différence « suffisamment importante » entre les deux groupes.

 

Le facteur temps: deux choses à savoir

Si l’on fait abstraction des délais administratifs et autres retards indépendants de l’activité de recherche, cette période de temps dépend d’au moins deux variables : le nombre de volontaires et la vitesse avec laquelle la maladie se propage entre les individus.

Avant 2020, le Prevnar, un vaccin développé dans les années 1990 par la compagnie Wyeth (rachetée par Pfizer depuis) pour combattre les infections à pneumocoque, détenait le record du nombre de volontaires testés lors d’un essai clinique de phase trois : 18 927 nourrissons avaient reçu le vaccin et 18 941 avaient reçu un placebo. En 2020, Pfizer a battu ce record avec son vaccin anti-COVID, le BNT162b2 : elle a recruté 21 720 adultes qui ont reçu le vaccin et 21 728 qui ont reçu un placebo.

Or, du côté de Prevnar, il avait tout de même fallu trois ans pour recruter et vacciner tous ces bébés (octobre 1995 à novembre 1998). Du côté de Pfizer, comme on l’a vu en 2020, il n’a fallu que quelques mois. Mais ce n’est pas parce qu’on avait été moins prudent du côté du Pfizer: c’est plutôt à cause de la très forte médiatisation de la pandémie et de l’impact important qu’avaient les confinements. Ces deux facteurs ont contribué à ce que le recrutement se fasse à la vitesse de l’éclair; les volontaires se sont littéralement bousculés. On a donc pu commencer les premières injections rapidement.

Restait à attendre qu’un nombre suffisant de personnes attrapent la maladie. Dans le cas du Prevnar, il a fallu attendre un an et quatre mois (jusqu’en mars 2000) pour que suffisamment d’enfants dans le groupe placebo contractent des infections à pneumocoque pour qu’on puisse avoir une comparaison significative. Il faut savoir que les infections à pneumocoque ne sont pas si fréquentes dans la réalité - environ 3 cas par 1000 enfants par année. Résultat: 55 enfants ont été malades dans le groupe placebo, contre seulement 3 chez les vaccinés, pour une efficacité de 94,5% (voir les résultats officiels).

En comparaison, l’automne dernier, comme la pandémie faisait rage, il n’a fallu que trois mois et une semaine pour atteindre un nombre de malades suffisant dans le groupe placebo des tests de Pfizer, afin d’avoir des résultats statistiquement significatifs (il faut dire que les essais étaient fortement concentrés en Floride, au Texas et en Californie, des États américains parmi les plus touchés par la COVID). Après ce délai, ce sont 8 cas de COVID-19 qui s’étaient déclarés chez les vaccinés, contre 162 cas chez les non-vaccinés. Une efficacité de 95% (voir les résultats officiels).

L’idée que les vaccins d’avant la COVID aient été testés pendant de longues périodes de temps est donc une illusion: cela dépend plutôt de facteurs propres au moment et aux circonstances entourant la maladie. Et il ne faut pas sous-estimer le nombre de volontaires: dans le cas des vaccins contre la COVID-19, on n’a jamais testé de vaccins sur autant de volontaires. Des vaccins utilisés depuis longtemps avaient à l’origine été testés sur beaucoup moins de gens. Par exemple, l’un des vaccins contre la polio a été testé sur 924 personnes, et l’un de ceux contre la diphtérie et le tétanos a été testé sur seulement 314 volontaires...

 

Et les effets secondaires?

Il est vrai que les essais de phase 3 ne permettent pas de détecter les effets secondaires sur le long terme, ni les effets très rares qui surviennent une fois sur 50 000 ou moins souvent encore. Ce n’est que lorsqu’on entreprend des vaccinations massives et à grande échelle qu’on peut détecter ces effets secondaires rares.

Le vaccin développé par la compagnie AstraZeneca et l’Université d’Oxford en est un bon exemple: les fameuses thromboses n’avaient pas été détectées lors des essais cliniques mais semblent bel et bien devoir être incluses dans la liste des effets secondaires rares de ce vaccin. En Ontario, il a été retiré du marché alors que les dernières statistiques faisaient état de probabilités d’une thrombose dans un cas sur 60 000 (mais il faut se rappeler que les risques de thromboses sont plus élevés lors d’une grossesse ou lors de la prise d’anovulants).

Quant à la crainte des effets secondaires à long terme, deux siècles de science vaccinale ont démontré qu’ils sont très rares. La grande majorité des effets s’estompent dans les 48 heures suivant la vaccination, et presque toujours après une semaine. Exception notable: le cas très particulier du PANDEMRIX utilisé contre l’épidémie de grippe H1N1 en 2010. Il avait provoqué des narcolepsies (troubles du sommeil) environ 3 mois après l’injection. D’abord détectée en Finlande, l’association entre le vaccin et ce problème a ensuite été constatée dans d’autres pays européens. Chez les jeunes Finlandais de 4 à 19 ans, cette réaction est survenue chez un vacciné sur 12 000, alors que les narcolepsies sont normalement neuf fois moins fréquentes chez les enfants.

 

Photo: torstensimon / Pixabay

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