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À travers le monde, des milliers de femmes témoignent sur les réseaux sociaux avoir eu des troubles du cycle menstruel variés après une injection du vaccin contre la COVID. Faut-il s’en inquiéter? Le Détecteur de rumeurs résume.


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L’origine de la rumeur

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Selon des médias comme Radio-Canada ou Le Journal de Montréal, de nombreuses femmes ont rapporté des menstruations plus intenses après avoir reçu une dose de vaccin contre la COVID-19.

Par ailleurs, les résultats préliminaires d’une étude espagnole menée auprès de plus de 14 000 personnes sur les réseaux sociaux révèlent que 7 femmes sur 10 disent avoir observé un changement temporaire de leurs règles après avoir été vaccinées.

En Grande-Bretagne, l’Agence de réglementation des médicaments avait reçu, pour la période du 9 décembre 2020 au 20 octobre 2021, un peu plus de 41 000 signalements concernant des règles plus abondantes, des retards ou des saignements inattendus. Ces changements étaient, dans la majorité des cas, temporaires. Selon l’Agence, environ 49,2 millions de doses de vaccins ont été administrées à des femmes pendant cette période. La fréquence de cet effet secondaire est donc faible.

Malgré cela, le 30 juillet 2021, en France, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a ajouté ces troubles à sa la liste de « signaux potentiels ou événements déjà sous surveillance ».

Système immunitaire et menstruation

Le cycle menstruel pourrait être affecté par toute réponse immunitaire, selon Benoît Barbeau, professeur au Département des sciences biologiques de l’UQAM et spécialiste en virologie. En effet, tous les vaccins, pas seulement ceux contre la COVID-19, provoquent une réponse inflammatoire dans l’organisme. Par exemple, les plus bénignes de ces réactions prennent la forme de rougeurs sur le bras.

Ces réactions sont le signe que notre système immunitaire réagit au vaccin de la bonne façon. La muqueuse utérine faisant partie du système immunitaire, celle-ci pourrait ainsi réagir au vaccin, rappelle d’ailleurs une chercheuse britannique dans une entrevue à la BBC. Cela entraînerait ainsi des saignements ou des règles plus précoces.

Une étude japonaise a d’ailleurs observé que le vaccin contre le virus du papillome humain (VPH) peut, pour la même raison, affecter temporairement le cycle menstruel. De plus, le fait que l’effet sur les règles ait été observé autant pour les vaccins à ARNm que pour les vaccins à vecteur viral confirmerait que c’est bien le système immunitaire qui est en cause et non pas une composante particulière des vaccins, écrivait en septembre la chercheuse britannique Victoria Male. Par ailleurs, la plupart des femmes touchées racontent que leur cycle menstruel est revenu à la normale le mois suivant, ajoute-t-elle.

Selon des experts interrogés par le New York Times, il est présentement impossible d’affirmer avec certitude que le vaccin contre la COVID-19 cause un dérèglement du cycle menstruel puisque plusieurs facteurs peuvent influencer les menstruations comme le stress, la maladie ou un changement des habitudes de vie.

Des effets secondaires négligés?

Dans les dépliants d’informations produits par le ministère de la Santé et des Services sociaux sur les vaccins à ARNm ou à vecteur viral, les perturbations du cycle menstruel ne sont pas mentionnées parmi les réactions connues causées par le vaccin.

Ce manque d’information pourrait être une source d’inquiétude. Par exemple, un article de la BBC mentionne que des hommes transgenres et des femmes ménopausées ont aussi connu des saignements après avoir reçu une dose de vaccin. Parce que ces saignements peuvent être un signe de cancer, une personne qui ignore qu’il s’agit d’un effet secondaire normal de la vaccination pourrait être préoccupée.

De nouvelles études en cours

Au mois de juin, une équipe de chercheurs de l’Université de Bristol déplorait que l’enjeu des menstruations ait été exclu de la plupart des études sur la COVID-19, incluant les essais cliniques des vaccins. Selon eux, des recherches supplémentaires doivent être entreprises, d’autant que la moitié de la population mondiale est concernée.

De plus, des études plus poussées aideraient à lutter contre la désinformation à propos des risques des vaccins et à rassurer les femmes qui craignent que leur système reproductif puisse être affecté, souligne encore la chercheuse britannique Victoria Male.

Début septembre, l’Institut national de la santé des États-Unis a alloué 1,67 million $ à cinq institutions, dont la faculté de médecine de l’Université Harvard et l’École de santé publique de l’Université de Boston, pour mener des études approfondies sur le sujet.

- Mahé Cayuela

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Cet article a été produit en association avec le cours Quête de sens journalistique, animé par Jean-François Gazaille à l’UQAM

Crédits photo: Surprising_Shots / Pixabay

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