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Le documentaire Cool it! de Bjørn Lomborg, qui arrive en salle cette semaine, est une belle illustration de la facilité avec laquelle on peut dire n’importe quoi quand on veut critiquer la science, alors que le scientifique qui agirait de la même façon avec ses collègues verrait sa crédibilité réduite en cendres.

Que Bjørn Lomborg soit climato-sceptique, c’est son droit. Qu’il utilise depuis 10 ans une certaine désinformation pour faire passer ses arguments illustre toutefois, à l'envers, pourquoi la science a si mauvaise presse : une affirmation péremptoire, claire et nette, avec un parfum accusateur, ça fonctionne à tous les coups. Mais une explication plus réaliste, plus nuancée, avec des peut-être et des possiblement, ça fait bâiller. On préfère changer de chaîne.

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Je n’ai pas encore vu le film, puisqu’il n’arrive en salles que le 12 novembre — notamment aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal, ainsi qu’un peu partout en Amérique du Nord — mais la bande-annonce a déjà de quoi faire sursauter ceux qui en appellent à un débat rationnel : « si nous écoutons les gens qui crient le plus fort », reproche Lomborg... tout de suite avant une image du méchant de service, Al Gore. C’est d’un subtil.

Ce n’est donc pas dans ce film qu’on va rappeler que ceux qui crient le plus fort, depuis des années, ce sont les climato-sceptiques : ceux qui accusent la climatologie d’être un sombre complot de la gauche, qui parlent d’une science « fasciste », qui répètent ad nauseam les mêmes erreurs — les Vikings, 1998, etc. — sans s’embarrasser de rechercher un fait inédit. Qui ont créé des organismes factices à seule fin de désinformer et de « semer le doute » — tout cela est dûment documenté.

Je ne sais pas si le réalisateur de Cool It connaît la différence entre le fait scientifique, appuyé sur des données contre-vérifiées (y compris par des adversaires) et l’opinion. Je ne sais pas quelle proportion de son public est consciente que si un scientifique affirme que la Terre se réchauffe, il s’appuie sur des faits, et que Bjørn Lomborg, de son côté, présente des opinions. En apparence convaincantes, certes, mais des opinions tout de même : la lutte pour la réduction des gaz à effet de serre serait vouée à l’échec, les environnementalistes n’auraient jamais pensé — mais Lomborg, oui — que de changer nos voitures pour des Prius ne suffirait pas à freiner le réchauffement, etc. Et le message des messages qu’il promeut depuis une décennie : non aux réglementations pour réduire les gaz à effet de serre.

Ce qui sera le plus mêlant pour une partie de ses partisans, c’est que le statisticien Lomborg, celui qui se flatte d’être « l’environnementaliste sceptique », a cessé de nier que la Terre se réchauffe. En fait, certains ne découvriront que tardivement que Cool It porte sur les façons les plus efficaces de lutter contre le réchauffement... après avoir subtilement dissimulé le fait que les environnementalistes proposent toutes ces solutions depuis 30 ans.

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