
Pour croire en la Terre plate, faut-il être irrécupérable face aux faits et à la raison? Pas pour une « vedette » de ces adeptes, qui a toutefois dû, pour se rallier à la réalité, se rendre en Antarctique.
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Pour ceux qui ignorent la géographie de la Terre plate, il faut savoir que sur leur planète, le continent antarctique n’existe pas. En lieu et place, il y a une muraille de glace infranchissable qui fait tout le tour de l’assiette qu’est censée être notre planète, empêchant ainsi l’eau des océans de se vider.
Or, le Terre-platiste en question, Jeran Campanella, s’est rendu en Antarctique avec deux autres croyants, dans le cadre d’un voyage intitulé « The Final Experiment », rien de moins. Et il n’a pas été converti à la réalité par le fait qu’il n’y a pas vu de muraille de glace, mais plutôt par le Soleil.
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C’est que, dans le vrai monde, en décembre et à seulement 1138 km du Pôle Sud —Union Glacier Camp— c’est le moment de l’année où le Soleil ne se couche jamais, en faisant un tour complet au ras de l’horizon. Alors que dans le modèle de la Terre plate, il n’y a ni Pôle nord ni Pôle sud: le Soleil est censé faire des cercles au-dessus de la Terre, éclairant un continent puis l’autre, à la manière d’un projecteur au théâtre. Quant aux récits d’un Soleil visible 24 heures, ce seraient donc des inventions créées par une grande conspiration mondiale.
« OK les gars, parfois, dans la vie, vous avez tort », a annoncé Campanella à ses abonnés. Influenceur sur YouTube, son collègue Austin Whitsitt a dû admettre lui aussi que le Soleil « faisait ce qu’ils avaient dit qu’il ferait ». Il n’est toutefois pas encore 100% convaincu : « je pense que certaines des données que nous allons avoir de ce voyage aideront à clarifier si c’est vraiment ce qui se passe ».
Ils avaient répondu à un défi d’un pasteur du Colorado appelé Will Duffy : celui-ci offrait à deux personnes, un « platiste » et un « globiste » (c’est comme ça qu’il faut appeler les gens dotés de raison), un voyage tous frais payés là-bas pour « régler la question de la forme de la Terre ». Les deux autres platistes ont payé leur voyage.
D’aucuns diront sans doute qu’il y aurait eu des méthodes moins coûteuses qu’un voyage en Antarctique pour « régler cette question », mais certaines croyances ont la vie dure…
Comme beaucoup d’autres théories du complot, celle de la Terre plate a bénéficié des réseaux sociaux dans la dernière décennie: aussi étonnant que cela paraisse, le mouvement a connu une croissance avant la COVID, constatait en 2019 la chercheuse australienne Jennifer Beckett, de l’Université de Melbourne. Cela s’inscrit dans un glissement général d’une partie de la population vers le populisme et une méfiance croissante face aux experts. Avec ce genre d’ingrédients, explique Beckett, « il devient vraiment facile pour des croyances marginales de gagner en importance ».