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Les vestiges de l’ouraqan Debby en août, avec leurs inondations majeures, ont été qualifiés d’événement climatique « le plus coûteux de l’histoire du Québec ». Et ce n’est pas la première fois qu’on a l’impression que la facture des changements climatiques grimpe. Le Détecteur de rumeurs s’est demandé si on en connaissait réellement le coût.


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La facture des catastrophes climatiques

Une grande partie des informations provient des programmes d’aide gouvernementaux et des compagnies d’assurances. Dans un document intitulé La pointe de l’iceberg publié en 2020, l’Institut climatique du Canada a analysé les données des Accords d’aide financière en cas de catastrophes du gouvernement fédéral, de même que celles du Bureau d’assurances du Canada (BAC). Ils ont constaté que le nombre annuel de catastrophes au pays est passé de 8 par année en 1970 à 27 en 2016. De plus, le coût moyen par catastrophe a grimpé de 8,3 millions dans les années 1970 à 112 millions dans les années 2010 (exprimés en dollars de 2019).

Dans un communiqué publié le 13 septembre dernier, le BAC estime que les « pertes assurées » qui sont « liées aux phénomènes météorologiques violents au Canada dépassent désormais régulièrement les 2 milliards de dollars par an ».

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Quant au Québec, le BAC rapportait qu'en 2023, ces événements météorologiques avaient généré des dommages assurés de 680 millions de dollars. Ce montant était de 580 millions en 2022. À eux seuls, les feux de forêt ont provoqué 22 millions de dollars de dégâts en 2023.

C’est également du BAC qu’est venue le 16 septembre l’estimation « préliminaire » des 2,5 milliards$ de dégâts causés par les restes de l’ouragan Debby qui ont frappé le sud du Québec les 9 et 10 août 2024.   

À première vue, les changements climatiques semblent donc être responsables de cette tendance à la hausse des factures. Cependant, avant de tirer des conclusions, il faut tenir compte de l’évolution de divers facteurs socio-économiques qui influencent eux aussi l’ampleur des pertes, soulignaient en 2021 des chercheurs canadiens dans un rapport sur les enjeux nationaux associés aux changements climatiques.

Par exemple, les données sur les pertes assurées doivent être ajustées pour tenir compte de l’augmentation de la richesse des habitants et de la hausse à la fois des prix de production et de ce que les consommateurs doivent payer pour remplacer leurs pertes. C’est en incluant ces facteurs que les auteurs ont conclu que les changements climatiques jouent bel et bien un rôle dans cette tendance à la hausse des pertes assurées; cette hausse ne peut s’expliquer uniquement par une augmentation de l’exposition aux risques, de la valeur des actifs ou de l’inflation.

Des coûts pour le gouvernement 

L’État québécois a déjà commencé à débourser des sommes importantes. Ainsi, selon des données du ministère de la Sécurité publique, les inondations printanières de 2019 auraient jusqu’à présent coûté plus de 470 millions $ dans le cadre du programme d’aide financière aux sinistrés.

Par ailleurs, depuis 1970, les coûts de protection contre les feux incontrôlés au Canada ont augmenté de 120 millions $ par décennie. Au Québec seulement, le ministère des Ressources naturelles et des Forêts a dû débourser plus de 167 millions pour éteindre les feux de forêt sur le territoire québécois en 2023, soulignait la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU) dans son rapport annuel. Ce montant était de 27 millions en 2022 et de 49 millions en 2021.

D’autres coûts à venir

Les dommages aux infrastructures ne risquent pas de diminuer dans les prochaines décennies. Dès 2015, le Bureau de projet des changements climatiques du Québec appréhendait que les dommages causés aux infrastructures par les inondations pourraient représenter jusqu’à 171 millions $ pour le gouvernement du Québec d’ici 2065. Ceux causés par l’érosion côtière coûteraient pour leur part 859 millions au gouvernement et 123 millions supplémentaires à la société québécoise.

Enfin, les dépenses publiques allouées aux dommages climatiques pourraient atteindre 5 milliards $ en 2025 et 55 milliards en 2100, estimait l’Institut climatique du Canada en 2022.

Des coûts indirects difficiles à déterminer

Les perturbations du climat ne sont pas seulement responsables de pertes matérielles, rappelait en 2020 le rapport La Pointe de l’iceberg de l’Institut climatique du Canada. Elles engendrent aussi une multitude de coûts indirects comme le ralentissement des activités de certaines entreprises, en plus des effets sur la santé et sur la qualité de vie. Toutefois, il peut être ardu de distinguer les impacts qui sont spécifiques aux changements climatiques de ceux associés à la variabilité naturelle du climat, comme le soulignaient en 2015 les auteurs du rapport québécois.

Par ailleurs, la perturbation des chaînes d’approvisionnements lors des événements météorologiques graves ou les impacts sur les finances des familles —pertes de revenus d’emplois, dépenses imprévues dont on ignore si elles seront remboursées— sont d’autres coûts indirects dont il faut tenir compte, mais qui sont compliqués à calculer.

Quels impacts sur l’économie?

Les changements climatiques ont aussi eu un effet sur l’économie en général. Dans un document publié en 2022 par le Bureau du Directeur parlementaire du budget du Canada, l’augmentation de 0,9°C de la température et la hausse de 2,5 % des précipitations en 2021, auraient entraîné une baisse du produit intérieur brut (PIB) de 0,8 %.

Toujours selon cette analyse, si on ajoute l’effet des changements climatiques futurs, cela signifierait une réduction totale du PIB de 5,8 % en 2100. Selon l’Institut climatique du Canada, les pertes de revenus nationaux pour le pays représenteraient alors entre 391 et 865 milliards $.

Entre autres choses, les répercussions climatiques risquent de causer des pertes d’emplois, une perte de productivité et une baisse de main-d’œuvre. Par exemple, selon l’Institut climatique du Canada, la chaleur mènera à la perte de 128 millions d’heures de travail d’ici 2100, l’équivalent de 62 000 employés à temps plein. Les changements climatiques pourraient même réduire le revenu des ménages de 19 % pour la population en général et de 23 % chez les moins nantis.

Enfin, qu’il s’agisse des vagues de chaleur ou de la pollution de l’air, il y aura une augmentation des dépenses en santé. Selon le rapport préparé pour le Bureau de projet des changements climatiques en 2015, les coûts au Québec seraient particulièrement élevés pour la chaleur et le pollen, avec respectivement 33 milliards et 359 millions d’ici 2065.

Verdict

De quelque façon qu’on fasse le calcul, il est certain que la société paie déjà en partie la facture des changements climatiques. Même si certains coûts indirects sont difficiles à évaluer pour le moment, les dépenses en cause sont vraisemblablement en train d’augmenter.

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