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Qu'est-ce qu'une ville en santé? Montréal ou Québec rentrent-elles dans cette définition? 5 ans après, retour sur notre dossier sur la ville en santé.

 

Ce billet a d’abord été publié sur le blogue Hinnovic.

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Il y a un peu moins de 5 ans, Hinnovic vous présentait un dossier sur les environnements favorables à la santé dans les villes. Par l’intermédiaire de deux billets et d’une entrevue filmée, nous nous interrogions sur les critères permettant de caractériser une ville qui favorise la santé, ou encore les solutions à mettre en œuvre afin de favoriser une meilleure santé des habitants des grands centres urbains. Qu’est-ce qu’une ville en santé?

Sophie Paquin, conseillère en urbanisme et santé publique à la Direction de santé publique de la ville de Montréal, nous expliquait en entrevue ce qui définit un environnement favorable à la santé ou au contraire non favorable à la santé (comme les centres d’achats éloignés des lignes de transport en commun). De plus, elle dressait un portrait en demi-teinte de Montréal en tant que ville favorable à la santé. La métropole québécoise se classant dans le trio de tête canadien en terme d’utilisation des transports en commun (TEC), mais péchant sur la question des traumatismes routiers principalement à cause de la vulnérabilité des piétons et des cyclistes face aux véhicules. Finalement, elle mentionnait l’efficacité des mesures basées sur la modification de l’environnement urbain (design, mesures d’apaisement de la circulation, marchabilité augmentée) ou sur le type de restauration disponible dans un quartier favorisant une alimentation saine au détriment de la malbouffe, connue pour être un des facteurs augmentant l’obésité ainsi que les maladies cardiovasculaires.

Cinq ans après

Un peu moins de 5 ans plus tard, certains arrondissements de Montréal ont mis en place des mesures de modification de l’environnement urbain et de la circulation visant à sécuriser les déplacements à vélo ou à pied tout en permettant la cohabitation avec les véhicules. L’idée bien sûr est de favoriser les déplacements en transports actifs et force est de constater qu’il y avait (et qu’il y a toujours) une attente forte de la population afin de disposer d’infrastructures permettant de se déplacer via des modes de transports bons pour la santé et l’environnement.

La petite reine : pédaler pour être en meilleure santé et protéger l’environnement

L’augmentation impressionnante des déplacements à vélo à Montréal est un fait notable. Dans sa plus récente enquête réalisée tous les 5 ans, l’Agence métropolitaine de transport (AMT) révélait ainsi que les déplacements à vélo ont augmenté de 54 % sur la période 2008-2013. L’augmentation est de 7 % pour les déplacements à pieds sur la même période. Ces bons résultats pour une ville d’Amérique du Nord sont à mettre sur le compte de plusieurs facteurs.

Tout d’abord l’arrivée du Bixi, le système montréalais de vélo en libre-service étant désormais un incontournable au sein de l’offre de transports actifs à Montréal, mais aussi dans toutes les villes qui ont pris la décision éclairée d’implanter ce type de service favorisant l’usage du vélo urbain. La progression de l’offre de pistes cyclables est également à mentionner, même si sur ce point il y a encore du chemin à faire. Il existait 400 km de pistes cyclables à Montréal début 2008, 560 km en 2010 (voir le tableau page 47) et désormais 680 km début 2015. L’augmentation est claire, mais certains estiment que la ville n’en fait pas assez et qu’elle devrait mieux se donner les moyens de ses ambitions. Pour ce qui est de la ville de Québec, la capitale comptait 280 km de pistes cyclables en 2010 (voir page 9), elle en compte désormais moins de 400. Par contre les cyclistes québécois parcourent plus de kilomètres annuellement que la moyenne au Québec, soit 1000 km en moyenne par an contre 624 km au Québec (voir page 15 du rapport de Vélo Québec). On voit donc que les instances politiques au pouvoir ont tout intérêt à tenir leurs promesses et à accélérer le rythme de l’augmentation de l’offre de pistes cyclables au Québec, tant la demande du grand public est présente. Il convient de se réjouir de l’attrait de la population pour un mode de transport qui incite les décideurs à exploiter les villes au profit de la santé métabolique.

 

Les études démontrent que la priorité des cyclistes est de se sentir protégé du trafic. Montréal est la preuve qu’en offrant un réseau de pistes cyclables interreliées, on augmente la pratique cycliste en ville. – Separated bike lanes are the way, The Globe and Mail, 22 juillet 2012

 

Et les piétons?

Une ville en santé, c’est aussi une cité qui permet à ses habitants de se déplacer à pied facilement et dans les meilleures conditions sécuritaires possible. C’est bien simple, faciliter et sécuriser les rues, artères et boulevards d’une ville, c’est inciter une plus grande part de la population à user de la bipédie. Il ne faut absolument pas oublier que sur la question de la vulnérabilité en ville, les piétons se placent malheureusement en haut de l’échelle. Le Ministère des Transports rappelle ainsi que «5 à 10 % des piétons heurtés par un véhicule roulant à une vitesse de 30 km/h risquent de mourir. Pour une vitesse de 50 km/h, la probabilité de décès est de 45 %, alors qu’à une vitesse de 65 km/h, elle est de 85 %.» (Source : Guide de détermination des limites de vitesse sur les chemins du réseau routier municipal, p18).

Comme dans beaucoup d’autres villes en Amérique du Nord, on octroie encore trop de place à la voiture dans les villes au Québec et cela a forcément des impacts sur la fréquence des accidents voiture-piéton. Ainsi, la Société de l’assurance automobile du Québec mentionne sur son site qu’en 2013, 65 piétons sont morts et 2,816 ont été blessés suite à une collision avec un véhicule.

 

Chaque jour, 8 piétons sont heurtés par un véhicule au Québec. – ministère des Transports du Québec

 

Encore trop d’intersections au Québec sont des «pièges à piéton». Durée des feux de circulation pour les piétons ne permettant pas une traversée sereine et sécuritaire, trottoirs et aires d’attente trop petites, absence de refuge central, signalisation au sol trop peu visible voire inexistante. Par exemple, l’intersection Avenue du Parc/Rue Jean-Talon à Montréal «figure au palmarès des carrefours les plus dangereux de la métropole» comme le mentionnait Le Devoir en 2012 (il se trouve d’ailleurs que l’École de santé publique de l’Université de Montréal est adjacente à cette intersection).

Cependant, il n’y a pas que les véhicules motorisés qui représentent un danger pour les piétons. Avec l’augmentation des usagers à vélo à Montréal ou à Québec, les accidents entre cyclistes et piétons sont amenés à être en augmentation et il en va de la responsabilité de chacun de faire usage de civisme et de prudence. On peut ainsi mentionner la récente décision de permettre aux cyclistes d’emprunter les voies piétonnes sous les viaducs de Montréal, occasionnant des frictions voire des blessures causées par des collisions piétons-cyclistes. Ainsi, plutôt que de donner moins d’espace aux véhicules motorisés, on déplace le problème en mettant en concurrence deux modes de transports actifs et on met encore plus en danger les usagers les plus vulnérables, les piétons.

Investir dans l’innovation et opter pour des villes en santé, c’est payant

On ne le répétera jamais assez, investir dans la prévention en santé, c’est un pari gagnant. Alors qu’une part grandissante de la population donne une place importante aux modes de transports actifs dans ses habitudes de déplacement en milieu urbain, les différents paliers de gouvernance doivent prendre des mesures qui vont dans le sens d’un environnement urbain plus sain et plus sécuritaire. N’oublions pas que les transports actifs permettent de réduire la pollution urbaine, « l’environnement dans lequel nous sommes étant un marqueur puissant de notre risque individuel de faire un infarctus ou un ACV », notait le cardiologue et professeur François Reeves dans une entrevue pour Hinnovic en 2013. De plus, l’effet collatéral de l’augmentation des transports actifs est de nous rendre moins dépendants aux énergies fossiles, un autre effet bénéfique des villes en santé. Même si depuis quelques années plusieurs villes au Québec commencent à prendre la mesure de l’importance de vivre dans des villes favorisant la santé, il reste encore beaucoup de chemin à faire.

Alors, rendez-vous dans cinq ans?

 

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