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Il faut presque courber la tête pour pénétrer dans la petite salle B02 située au sous-sol du pavillon Macdonald-Harrington de l’École d’architecture de l’Université McGill, puis passer sous un vulgaire rideau rose isolant. Une entrée bien modeste pour le Ice Lab, le laboratoire de structures de glace prototypées fondé par Pieter Sijpkes.

Hollandais d’origine et Montréalais d’adoption, l’architecte est fasciné par ce matériau pourtant si commun six mois par année au Québec. «Il importe de se réconcilier avec l’hiver et la glace permet d’être créatif», annonce celui qui a réalisé des structures géantes de nylon et de glace et a même bâti un Panthéon de neige pour souligner le centenaire de l’École d’architecture et le 175e anniversaire de l’Université McGill, en 1996.

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Aujourd’hui, l’échelle de ses réalisations s’avère plus modeste et tiennent dans une glacière, plongées dans du kérosène à la température de –23 degrés Celcius, pour les conserver. Des chaînes et des sculptures de glace, et même la reproduction petit format de la toiture de la manufacture mexicaine Baccardi de Félix Candela.

Cette pièce exiguë renferme un robot de prototypage rapide grâce auquel des projets de génie et d’architecture naissent de l’eau pour prendre corps en glace. À la manière d’une imprimante 3D, le robot réalise ainsi la maquette des structures les plus délirantes imaginées par les étudiants.

Améliorée par l’ingénieur Éric Barnett, cette machine élabore également un échafaudage en un matériau en biodiesel, dont le point de gel diffère de l’eau, afin de supporter les parties les plus fragiles des structures, le temps que la glace se solidifie. Il faudra patienter toutefois près de trois jours pour assister à la réalisation d’une maquette haute de 50 cm et d’environ 150 couches de glace.

Grâce à la webcam, il est possible heureusement de le visionner de la maison. «Le futur est là et il est même possible de le filmer en slow-motion», explique l’architecte. Une prouesse qui intéresse des compagnies américaines et irlandaises qui ont déjà approché l’équipe du Ice Lab pour la réalisation d’images commerciales.

Un pont de glace entre architecture et génie

Imaginer un pont piétonnier qui enjamberait une voie ferrée ou concevoir des constructions pour l’Hôtel de glace de Montréal et le Carnaval de Québec, les projets de recherche d’architecture et de génie du Ice Lab varient de l’un à l’autre.

Ils sont pourtant tous issus du même programme nommé «Nouvelle architecture en changement de phase: construction de glace assistée par l’ordinateur», démarré en 2006 grâce à un soutien du Conseil de recherche en sciences sociales et humanités. Le Ice Lab réunit les professeurs Sijpkes de l’École d’architecture, Jorge Angeles du département de génie mécanique et du Centre des machines intelligentes, mais aussi d’indispensables associés de recherche, tel Damiano Pasini, et de nombreux étudiants.

Ce pont lancé entre l’architecture et le génie mécanique tente également de se libérer des contraintes de l’architecture classique. «Je trouve l’architecte Enrico Dini très inspirant. Le futur sera fait de structures légères et fluides bâties avec des mélanges de matériaux à la grande résistance, mais au poids minimaliste», avance-t-il.

L’architecte donne d’ailleurs un cours à l’Université McGill sur la «philosophie des structures». Au programme, faire réfléchir les étudiants sur ce qui les motive avant de les inviter à rêver à de nouvelles constructions «capables de prendre corps à partir de l’air et l’eau dans un environnement extrême».

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