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La pandémie a entrainé un déluge d’études cliniques, dont plusieurs pourraient ne pas être à la hauteur des normes de la recherche. Des scientifiques rappellent, dans un article publié dans Science, l’importance de maintenir les normes de rigueur et de qualité, en dépit de l’urgence.

L’urgence ne justifie en effet pas le relâchement des normes, insistent les deux auteurs, le professeur en éthique et directeur du Centre d’éthique et de politiques à l’Université Carnegie Mellon, Alex John London, et le directeur de l’Unité d’éthique biomédicale de l’Université McGill, Jonathan Kimmelman.

Tous deux rapportent que des études préliminaires ont été lancées de manière prématurée, avant même de pouvoir les justifier. Ils relèvent aussi des essais de traitements effectués en raison de la seule facilité à les mettre en œuvre, qui pourraient ne pas réussir à démontrer de réels effets. Et le dédoublement de certains efforts de recherches. En plus de ces nombreux pré-papiers non révisés par les pairs qui ont suscité un engouement exagéré de certains médias et même du personnel soignant.

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Ils rappellent qu’en dépit des défis logistiques et pratiques posés par cette crise sanitaire, la mission morale de la recherche demeure de réduire l’incertitude et d’aider soignants, système de santé et décideurs à mieux faire des choix. 

L’urgence de trouver des traitements au coronavirus semble certes venir en contradiction avec la mise en place de protocoles rigoureux, approuvés, avec des groupes de contrôle. Pourtant, la volonté d’accélérer les choses ne peut pas contrevenir à l’obligation non seulement d’évaluer avec rigueur différents traitements, mais aussi d’éliminer les stratégies inefficaces.

Pour s’acquitter de ses responsabilités sociales, poursuivent les deux auteurs, toute recherche envisagée doit remplir cinq conditions : l’importance, la rigueur, l’intégrité, un rapport complet des essais et la faisabilité. Les essais devraient se pencher sur les interventions thérapeutiques les plus prometteuses et viser des effets réalistes et cliniquement significatifs.

Par exemple, plus de 18 études cliniques enrôlant plus de 75 000 patients ont été enregistrées en Amérique du Nord pour tester divers régimes d’hydroxychloroquine contre la COVID-19. Cela signifie beaucoup de ressources sur une seule hypothèse clinique, ce qui diminue la possibilité d’évaluer d’autres avenues, en plus de risquer de créer trop de faux positifs par le seul hasard.

Les auteurs formulent également des recommandations sur la conduite d’essais cliniques en temps de crise, à l’intention des cliniciens qui devraient se joindre à de vastes études bien orchestrées plutôt que de mener plusieurs essais à petite échelle et sans groupe témoin.

Des recommandations visent aussi les consortiums de recherche, les organismes sanitaires et les commanditaires de ces études cliniques, qui devraient plutôt prioriser les approches mettant à l’essai plusieurs traitements, et non un traitement unique, afin de faciliter les comparaisons.

Enfin, les organismes gouvernementaux de santé ont eux aussi la responsabilité de répertorier les études rigoureuses, de favoriser la collaboration et de signaler aux médias, au personnel soignant et même au grand public, quels sont les essais cliniques pertinents, transparents et rigoureux.

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