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En temps normal, on en parle comme d’un amas d’algues couvrant des milliers de kilomètres carrés dans l’Atlantique. Mais voilà que ce « banc de sargasses », non content d’avoir atteint une taille inhabituelle, menace (à nouveau) les plages des îles des Antilles et de la Floride cet été.

Les amateurs de géographie connaissent la « mer des Sargasses »: une accumulation d’algues brunes ou Sargassum, qui se forme dans une région de l’Atlantique située à l’Est des États-Unis, qui croît et décroît au rythme des saisons. Bien que ce ne soit pas une « mer » à proprement parler, puisqu’elle n’est bordée par aucun rivage, les marins l’identifient ainsi sur les cartes depuis le passage de Christophe Colomb.

Sauf que cette année, on parle d’un banc de sargasses de 400 km de large et de 8000 km de long, soit l’équivalent de la distance séparant la Floride du Sénégal.

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Et ce n’est même plus inattendu: c’est depuis 2011 qu’on remarque une croissance de la zone couverte par ces grandes algues ou « macroalgues ». En 2019, une étude parue dans Science en parlait désormais comme de la « ceinture » des sargasses de l’Atlantique, s’étirant du Golfe du Mexique jusqu’aux côtes de l’Afrique. Il semble que cette ceinture ait été plus précoce cet hiver.

Cet élargissement a pour conséquence qu’un nombre de plus en plus grand d’algues s’échouent sur les côtes des îles des Antilles en été. Leur décomposition en aussi grand nombre entraîne une odeur nauséabonde, quelques gaz nocifs (sulfure d’hydrogène, ammoniac), en plus de problèmes économiques: il faut vider les plages de tonnes d’algues… et ne pas faire fuir les touristes.

On a d’abord présumé que les déversements de nutriments à partir des grands fleuves —à cause de l’agriculture et de la déforestation— expliquaient cette croissance. Une recherche publiée en 2021 a obligé à nuancer l’hypothèse: les périodes d’expansion des algues ne correspondent pas aux périodes d’augmentation des quantités de nutriments déversés par les fleuves Congo, Amazone et Mississippi. L’augmentation de la température des eaux est le suspect suivant.

Dans l’immédiat, la « ceinture » de cette année est en train de dériver vers l’ouest et devrait atteindre la Floride en juillet. Mais en réalité, c’est déjà commencé: des amas de ces plantes marines se sont déjà échoués en quantités inhabituelles en différents endroits du Golfe du Mexique, y compris sur les plages de Cancún, Mexique.

Et au-delà des tracas qu’elle pose aux humains, cette masse organique en décomposition nuit aux autres espèces marines. Elle peut étouffer la mangrove, un écosystème de marais maritimes. Et avant qu’elle ne s’échoue, sa masse à la surface est telle qu’elle monopolise l’oxygène dans l’eau des environs, asphyxiant les autres êtres vivants.

 

Photo: Gulf Coast Research Laboratory / Wiki Commons

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