Vous êtes le directeur d’une entreprise de biotechnologie, spécialisée dans le tout nouveau domaine de la synthèse de gènes. Vous recevez une commande pour la production d’une séquence liée au génome de la variole. Votre entreprise a besoin de ce contrat, vos administrateurs réclament des profits. Acceptez-vous la commande?

En 2004, la compagnie américaine Blue Heron Bio, basée à Seattle, sur la côte Ouest, a reçu une telle commande. Elle l’a refusée, de crainte qu’un tel travail ne tombe aux mains de terroristes.

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Cette fois-là, la commande provenait d’une compagnie basée au Moyen-Orient ce qui, pour des Américains, étaient déjà suffisant pour penser au mot « terrorisme ». Mais si la commande était venue d’un citoyen américain? Ou britannique? Aucune loi, ni aux États-Unis ni en Europe, n’oblige une telle compagnie à filtrer ses clients.

La réflexion lancée en 2004 chez Blue Heron Bio a abouti le mois dernier, sous la forme d’un document énumérant des lignes directrices à l’intention des compagnies désireuses de filtrer le nombre —de plus en plus élevé— de commandes dans le domaine du génome. « Nous croyons qu’il s’agit d’une façon intelligente de gérer les risques sans ralentir le domaine », résume un des co-auteurs de ce document, John Mulligan, administrateur chez Blue Heron.

Entre autres choses, le document recommande que tout client doive identifier l’institution à laquelle il appartient et doive décrire les mesures de sécurité dont il dispose pour manipuler et entreposer des agents biologiques potentiellement dangereux.

Il est toutefois difficile de dire quel impact aura ce document. Pour une demi-douzaine de compagnies prêtes à s’y soumettre, combien sont prêtes à passer outre? Pour les critiques, il s’agit tout simplement d’une manoeuvre pour montrer au gouvernement qu’il n’aura pas besoin d’imposer des réglementations à cette industrie.

Car la question devient de plus en plus pressante. D’ici la fin de la décennie, les scientifiques seront passés de l’époque « artisanale » où ils « décodaient » des génomes et où ils transféraient des gènes un par un, à l’époque de la « synthèse des gènes », c’est-à-dire la création de séquences entières de génomes : la semaine dernière, l’entrepreneur Craig J. Venter annonçait avoir réussi le premier transfert complet d’un génome, d’une bactérie à une autre (voir ce texte).

Le domaine a déjà un nom: la biologie synthétique. Ce n'est pas de la science-fiction, son congrès annuel en était déjà, le mois dernier, à sa troisième édition...

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